Ne jamais accorder par anticipation des congés payés qui ne sont pas encore acquis
Puisqu’ils doivent permettre aux salariés de se reposer du travail effectué, les congés payés ne peuvent en principe être pris avant que le travail permettant de les acquérir soit accompli ( Cass. soc., 10 juill. 1980, no 78-40.609 ). Si rien ne le lui interdit formellement, il est toutefois déconseillé à l’employeur d’accepter la prise par anticipation des congés qui ne sont pas encore acquis.
En effet, en cas de rupture du contrat de travail, les congés pris par anticipation avant leur acquisition peuvent poser problème. Dans cette situation, le salarié devra rembourser le trop-perçu à l’employeur, sauf si la résiliation du contrat de travail est due à la faute lourde de ce dernier (C. trav., art. L. 3141-29 ).
Mieux vaut donc prévoir une solution moins « risquée » : le congé sans solde. Le salarié qui n’a pas travaillé un temps suffisant pour s’ouvrir des droits à congés payés, ou qui souhaite en prendre alors qu’il a épuisé tous les congés payés qu’il avait acquis, peut demander à en bénéficier. Les modalités pratiques de ce congé doivent être fixées par accord entre employeur et salarié, à moins qu’elles ne soient prévues par la convention ou l’accord collectif applicable. Pendant la durée du congé sans solde, le contrat de travail est suspendu et le salarié ne perçoit aucune rémunération.
Remarque
La prise d’un congé sans solde au cours de la période d’essai suspend celle-ci et la prolonge de la durée correspondante ( Cass. soc., 23 mai 2007, no 06-41.338 ).
Accepter l’anticipation des congés payés acquis
Les congés peuvent être pris dès l’embauche
Les congés peuvent être pris dès l’embauche. Cela permet aux nouveaux embauchés de prendre des congés payés sans attendre le début de la période de prise (donc la fin de la période d’acquisition).
Remarque
Ainsi, un salarié embauché le 1er juillet N peut prendre des congés avant le 1er mai N + 1.
Précisons toutefois que cette possibilité s’exerce sans préjudice des règles de détermination de la période de prise des congés et de l’ordre des départs et des règles de fractionnement des congés. Dans tous les cas, il faut également se référer à la convention collective applicable, qui peut contenir des dispositions en matière de prise de congés payés anticipés.
Attention : la prise de congés acquis par anticipation est une possibilité et non un droit. Le salarié ne peut exiger de son employeur qu’il les lui accorde et l’employeur ne peut davantage exiger de lui qu’il en prenne ( Cass. soc., 10 févr. 1998, no 95-40.905 ).
En outre, l’employeur affirmant que le salarié a pris des congés par anticipation doit en rapporter la preuve ( Cass. soc., 13 déc. 1989, no 86-45.622 ). Il est donc conseillé de demander l’accord du salarié par écrit et de conserver ce document.
Remarque
L’employeur ne peut pas se contenter d’invoquer l’existence d’un usage dans l’entreprise supposant l’accord préalable des salariés en cas de prise anticipée des congés ( Cass. soc., 7 févr. 2006, no 04-41.558 ).
Que faire en cas de départ définitif du salarié ?
Si l’employeur peut imposer au salarié sur le point de quitter l’entreprise de solder les congés payés qui lui restent à prendre sur la période de référence, il ne peut lui imposer de prendre ses congés payés par anticipation pour, par exemple, éviter d’avoir à lui verser une indemnité compensatrice en fin de contrat.
Remarque
Un salarié a été averti par lettre du 12 mars 1991 de sa mise à la retraite le 21 août 1991. Il n’a pas pris ses congés payés et son employeur a refusé de les lui payer, faisant valoir que l’intéressé avait été prévenu assez tôt, et qu’il avait donc eu le temps de prendre les congés payés acquis avant d’être mis à la retraite. Les juges ont donné raison à l’employeur pour ce qui concerne les congés payés acquis au titre de la période 1990-1991, le salarié ne justifiant pas de l’impossibilité de prendre ces congés du fait de l’employeur. En revanche, l’employeur a été condamné à indemniser le salarié pour les congés acquis à compter du 1er juin 1991, puisqu’il ne pouvait imposer au salarié la prise par anticipation des congés payés acquis au titre de la période 1991-1992 ( Cass. soc., 30 avr. 2003, no 01-40.853 ).
Rappelons par ailleurs que les périodes de préavis et de congés payés ne se confondent pas. La période de préavis est suspendue entre le départ et le retour de congés payés, sauf accord différent entre les parties au contrat de travail.
Remarque
En cas de rupture du contrat de travail, les congés pris par anticipation, c’est-à-dire acquis et pris dès l’ouverture du droit, ne posent pas de problème : l’indemnité compensatrice de congés payés sera réduite à due proportion.
Anticipation, report et fractionnement
Les congés anticipés ou reportés entraînent le plus souvent, en pratique, un fractionnement du congé principal de 4 semaines. Or, à moins qu’une disposition conventionnelle n’en dispose autrement, la loi accorde des jours de congé supplémentaires au salarié lorsque ce congé principal (hors cinquième semaine) est fractionné et qu’une partie de celui-ci est prise en dehors de la période légale des congés, qui s’étend du 1er mai au 31 octobre. Les congés anticipés ouvrent droit aux jours de congés supplémentaires pour fractionnement ( Cass. soc., 7 mars 1990, no 87-40.629 ). Il en va de même des congés reportés pour maladie ou maternité ( Rép. min. no 74829 : JOAN Q, 19 oct. 2010, p. 11475 ). Il est néanmoins possible de demander au salarié intéressé de renoncer à ces jours de congé supplémentaires.