Fiche thématique
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15 mars 2024
Opération par laquelle une entreprise de travail temporaire, ayant exclusivement pour activité le prêt de main-d'œuvre à but lucratif, met temporairement à la disposition d'une entreprise utilisatrice un salarié spécialement embauché pour l'accomplissement d'une mission.

Sommaire

Les opérations de prêt de main-d'œuvre à but lucratif sont en principe illicites (C. trav., art. L. 8241-1) et elles font l'objet d'exceptions limitativement énumérées (C. trav., art. L. 1251-3). Le recours au travail temporaire est strictement défini, tout comme son régime juridique.

Comment fonctionne le recours au contrat de travail temporaire ?

Les cas de recours au travail temporaire

Ces cas sont identiques à ceux qui limitent les possibilités de conclure un contrat à durée déterminée.

Ainsi, il ne peut être recouru au travail temporaire pour pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice (C. trav., art. L. 1251-5). Il ne doit donc pas permettre de faire face à un besoin structurel de main-d'œuvre.

En revanche, il peut être fait appel à un salarié temporaire pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire (mission), en cas de :

- remplacement d'un salarié, notamment absent ou dont le contrat est suspendu ;

- d'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise ;

- d'emplois saisonniers ou pour lesquels il est d'usage de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée ;

- de remplacement d'un chef d'entreprise ou de remplacement du chef d'une exploitation agricole (C. trav., art. L. 1251-6).

Le recours au travail temporaire est encore autorisé notamment dans le cadre de politiques d'emploi ou d'une action de formation (C. trav., art. L. 1251-7). Ainsi, même s'il a pour objet de pourvoir un emploi lié à l'activité normale et permanente, une mise à disposition d'un salarié temporaire auprès d'une entreprise utilisatrice peut intervenir :

  • Lorsque la mission de travail temporaire vise, en application de dispositions légales ou d'un accord de branche étendu, à favoriser le recrutement de personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières ;
  • Lorsque l'entreprise de travail temporaire et l'entreprise utilisatrice s'engagent à assurer une formation professionnelle au salarié par la voie de l'apprentissage ;
  • Lorsque le salarié est bénéficiaire de l'obligation d'emploi de travailleur handicapé ;
  • Lorsque le contrat de mission, d'une durée minimale d'un mois, est conclu avec une entreprise de travail temporaire d'insertion.

Un certain nombre d'interdictions particulières sont prescrites par la loi, notamment pour éviter que les règles relatives aux licenciements pour motif économique ou celles régissant le droit de grève ne soient contournées (C. trav., art. L. 1251-9 et L. 1251-10).

Lorsque le recours au travail temporaire ne repose pas sur un motif légitime, le salarié intérimaire peut obtenir la requalification de son contrat de travail temporaire en contrat à durée indéterminée auprès de l'entreprise utilisatrice.

Mise en place d'une relation tripartite : ETT, entreprise utilisatrice et salarié intérimaire

L'opération de travail temporaire repose sur la conclusion de deux contrats successifs conclus par trois parties distinctes.

Le premier est le contrat de mise à disposition. Il est conclu, par écrit, entre l'entreprise de travail temporaire et l'entreprise utilisatrice, au plus tard dans les deux jours ouvrables suivant la mise à disposition (C. trav., art. L. 1251-42). Il comporte des mentions obligatoires, dont le motif de recours au travail temporaire, le terme de la mission et le montant et la composition de la rémunération (C. trav., art. L. 1251-43).

Le second est le contrat de mission. Il est conclu, par écrit, entre l'entreprise de travail temporaire et le salarié temporaire. Il reproduit l'ensemble des clauses et mentions du contrat de mise à disposition et comprend, en outre, la qualification professionnelle du salarié et les modalités de sa rémunération (C. trav., art. L. 1251-16).

La relation entre l'entreprise de travail temporaire et l'entreprise utilisatrice

Les dispositions du code du travail sur la question de la relation entreprise de travail temporaire/entreprise utilisatrice sont laconiques. Il faut renvoyer au contrat lui-même et au droit commun pour régler les problèmes de validité du contrat et de responsabilité civile qui se posent le plus souvent à l'occasion des manquements commis par l'entreprise de travail temporaire.

Ainsi, l'exigence d'un contrat de mise à disposition écrit étant destinée à garantir qu'ont été observées les diverses conditions à défaut desquelles toute opération de prêt de main-d'œuvre est interdite, sa violation entraîne la nullité du contrat et, par voie de conséquence, des restitutions, lesquelles peuvent s'avérer impossibles, l'entreprise utilisatrice devant dès lors au moins rembourser à l'entreprise de travail temporaire les rémunérations versées au salarié mis à disposition.

De même, l'entreprise de travail temporaire n'étant tenue que de l'obligation de mettre à la disposition de l'entreprise utilisatrice un salarié qui a la qualification exigée, l'entreprise utilisatrice ne peut engager la responsabilité de l'entreprise de travail temporaire pour des manquements commis par le salarié dans l'accomplissement de son travail ; que si elle réussit à apporter la preuve que l'entreprise de travail temporaire a commis une faute dans le choix du salarié proposé.

Les relations entre le salarié et les deux entreprises

Il est procédé à une distribution des droits et obligations entre les parties en présence, selon que le salarié se trouve dans ses relations avec l'entreprise de travail temporaire ou dans celles qu'il entretient avec l'entreprise utilisatrice.

Il revient à l'entreprise de travail temporaire, en sa qualité d'employeur, de verser au salarié une rémunération identique à celle déterminée dans le contrat de mise à disposition ainsi qu'une indemnité compensatrice de congé payé (C. trav., art. L. 1251-18 et L. 1251-19). Cette entreprise a également la charge de verser à l'échéance du terme du contrat de mission une indemnité de précarité, sauf dans certaines hypothèses limitativement énumérées (C. trav., art. L. 1251-32 et L. 1251-33). À moins que la rupture anticipée du contrat de mission soit autorisée (C. trav., art. L. 1251-26, al. 1er, et L. 1251-28), les parties restent tenues d'exécuter le contrat de mission jusqu'à son terme. Cela signifie qu'en cas de rupture prématurée et injustifiée du contrat, l'entreprise de travail temporaire, si elle en est à l'initiative, est tenue de conclure avec le salarié un nouveau contrat de mission (C. trav., art. L. 1251-26) ou que le salarié qui en prend l'initiative est susceptible d'engager sa responsabilité (C. trav., art. L. 1251-28).

L'entreprise utilisatrice exerce, quant à elle, les prérogatives de l'employeur relatives à la direction du travail du salarié et au respect de la discipline dans l'entreprise. C'est pourquoi elle doit veiller au respect des conditions d'hygiène et de sécurité et, plus largement, des conditions de travail du salarié temporaire (C. trav., art. L. 1251-21). Seules les obligations relatives à la médecine du travail sont en principe à la charge de l'entreprise de travail temporaire (C. trav., art. L. 1251-22).

Les conséquences du non-respect des prescriptions qui tendent à limiter le recours au travail temporaire sont, en revanche, susceptibles de peser tant sur l'entreprise de travail temporaire que sur l'entreprise utilisatrice. Celles-ci encourent, en vertu de la loi (C. trav., art. L. 1251-39 et L. 1251-40) et de la jurisprudence, la requalification de leur relation avec le salarié temporaire en un contrat de travail à durée indéterminée. Le salarié peut alors prétendre au paiement d'une indemnité de requalification à la charge de l'entreprise utilisatrice (C. trav., art. L. 1251-41), voire de l'entreprise de travail temporaire, condamnée in solidum, si elles ont toutes deux agi de concert. La méconnaissance de l'obligation de transmission du contrat n'est pas de nature à entraîner seule la requalification du contrat mais ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire (C. trav., art. L. 1251-40).

Contrat de mission : durée du contrat et statut du salarié intérimaire

Durée de la mission d'intérim

Le contrat de mission est un contrat à durée déterminée, lequel doit alors comporter un terme, précis ou incertain selon le motif de recours au travail temporaire, et qui ne peut, en principe, porter la durée du contrat au-delà de dix-huit mois, compte tenu, le cas échéant, d'un ou de deux renouvellements (C. trav., art. L. 1251-11, L. 1251-12-1, L. 1251-29 s. et L. 1251-35-1). Cependant, pour les contrats conclus à compter du 23 septembre 2017, il est possible de déroger, si un accord de branche étendu a été conclu, aux dispositions légales fixant la durée maximale des CDD (C. trav., art. L. 1251-12). La conclusion de contrats de mission successifs est, enfin, strictement réglementée et exige, en principe, le respect d'un délai de carence dont les modalités de calcul et l'application peuvent être fixées par une convention ou un accord de branche étendu (C. trav., art. L. 1251-36 à L. 1251-37-1).

Tableau de synthèse des durées légales

Cas de recours

Durée maximale

 

Terme précis

Terme imprécis

Remplacement d'un salarié absent ou dont le contrat de travail est suspendu

18 mois

Fin de l'absence

Remplacement d'un salarié dont le départ définitif précède la suppression de poste

24 mois

NON

Attente de l'entrée en service effectif d'un salarié en CDI

9 mois

Arrivée du salarié sous CDI dans limite des 9 mois

Accroissement d'activité de l'entreprise :

1. Commande exceptionnelle à l'exportation

24 mois

NON

2. Tâche occasionnelle définie et non durable

18 mois

NON

3. Travaux urgents de sécurité

9 mois

NON

4. Variations cycliques d'activité

18 mois

NON

Emplois à caractère saisonnier

Fin de la saison

Emplois pour lesquels il est d'usage de ne pas recourir à un CDI

18 mois

Réalisation de l'objet du contrat

Mission effectuée à l'étranger

24 mois

Réalisation de l'objet du contrat

Statut des travailleurs temporaires

Période d'essai des travailleurs intérimaires. Le contrat de mission du travailleur temporaire peut comporter une période d'essai dont la durée est fixée par accord collectif. À défaut, sa durée ne doit pas excéder :

  • 2 jours calendaires pour un contrat inférieur ou égal à un mois ;
  • 3 jours calendaires pour un contrat conclu pour une durée comprise entre un et 2 mois ;
  • 5 jours calendaires au-delà de 2 mois (C. trav., art. L. 1251-14).

Rémunération des travailleurs intérimaires. La rémunération du travailleur temporaire - dont le montant doit être indiqué dans le contrat de mise à disposition et dans le contrat de mission - ne peut pas être inférieure à celle que percevrait dans l'entreprise utilisatrice, après période d'essai, un salarié de qualification équivalente occupant le même poste (C. trav., art. L. 1251-18).

Indemnité de fin de mission. Lorsqu'à l'issue d'une mission, le salarié temporaire ne bénéficie pas d'un CDI avec l'entreprise utilisatrice, il a droit à titre de complément de salaire, à une indemnité destinée à compenser la précarité de sa situation. Cette indemnité est versée par l'entreprise de travail temporaire à l'issue de chaque mission effectivement accomplie et doit figurer sur le bulletin de salaire. Son montant est fixé à 10 % de la rémunération totale brute due au salarié pendant la durée de la mission, sauf disposition conventionnelle plus favorable.

Congés payés et jours fériés des travailleurs intérimaires. Le travailleur temporaire a droit à une indemnité de congés payés pour chaque mission effectuée. L'indemnité est versée à la fin de chaque mission et est égale au 10e de la totalité des sommes dues au salarié à l'occasion de celle-ci (C. trav., art. L. 1251-19). Le paiement des jours fériés est également dû aux intérimaires indépendamment de leur ancienneté, dès lors que les salariés de l'entreprise utilisatrice en bénéficient (C. trav., art. L. 1251-18).

Droits collectifs du travailleur intérimaire. Les travailleurs intérimaires sont pris en compte dans l'effectif de l'entreprise de travail temporaire pour la mise en place du comité social et économique (CSE) et pour la détermination du nombre d'élus. L'effectif de l'ETT est calculé en ajoutant aux salariés permanents les salariés temporaires qui ont été liés à l'entreprise de travail temporaire par des contrats de mission pendant une durée totale d'au moins 3 mois au cours de la dernière année civile (C. trav., art. L. 1251-54).

Les travailleurs temporaires sont pris en compte dans l'effectif de l'entreprise utilisatrice pour la mise en place des représentants du personnel, au prorata de leur temps de présence au cours des 12 mois précédents (sauf lorsqu'ils remplacent un salarié absent où dont le contrat est suspendu) (C. trav., art. L. 1111-2).

Les salariés intérimaires peuvent participer aux élections professionnelles dans l'entreprise de travail temporaire sous condition d'ancienneté. Par ailleurs, le travailleur temporaire peut être désigné en qualité de délégué syndical ou de représentant de la section syndicale dans l'entreprise de travail temporaire, sous condition d'ancienneté de 6 mois.

Formation professionnelle des intérimaires. En plus des solutions proposées pour tous les salariés (CPF, VAE...), des dispositifs spécifiques ont été conçus pour favoriser la formation des salariés intérimaires. V. https://www.interimairesinfo.org/

Droit à l'assurance chômage des intérimaires. À l'issue de leur contrat de mission, les salariés intérimaires bénéficient de l'assurance chômage dans les conditions de droit commun. Toutefois, la loi Marché du travail du 21 décembre 2022 instaure une réserve et prévoit la privation du bénéfice de l'allocation d'assurance chômage, lorsque le demandeur d'emploi a refusé à deux reprises une proposition de contrat de travail à durée indéterminée émise à l'issue d'un contrat de mission. Pour ce faire, depuis le 1er janvier 2024, lorsque l'entreprise utilisatrice propose un CDI à un salarié en fin de mission, elle doit – en cas de refus du salarié – en informer France Travail dans un délai de un mois en justifiant du caractère similaire de l'emploi proposé (C. trav., art. L. 1251-33-1 et R. 1243-2).

Qu'est-ce que le CDI intérimaire ?

Le dispositif du CDI intérimaire a d'abord été mis en place par un accord conclu au sein de la branche de travail temporaire en 2013. Il a été repris à titre expérimental par la loi « Rebsamen » du 17 août 2015. La loi du 5 septembre 2018 a pérennisé cette expérimentation, et le dispositif du CDI intérimaire est désormais inscrit dans le Code du travail aux articles L. 1251-58-1 à L. 1251-58-8 et sont en vigueur depuis le 7 septembre 2018.

Un contrat à durée indéterminée intérimaire peut être conclu entre l'entreprise de travail temporaire et un salarié pour la réalisation de missions successives auprès de différentes entreprises utilisatrices. Chacune de ces missions doit donner lieu à la conclusion d'un contrat de mise à disposition entre l'ETT et l'entreprise utilisatrice et à l'établissement, par l'entreprise temporaire d'une lettre de mission.

Ce contrat est en principe soumis aux mêmes règles qu'un contrat à durée indéterminée à l'exception de certaines spécificités. Notamment, il peut prévoir des périodes sans exécution de missions (appelées périodes d'intermission) ; celles-ci sont alors assimilées à du temps de travail effectif pour la détermination des droits à congés et pour l'ancienneté.

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Questions fréquemment posées

Quelle est la durée du contrat de travail temporaire ? 

La durée totale du contrat de mission peut être fixée par une convention ou un accord de branche étendu applicable dans l'entreprise utilisatrice. Cette durée totale ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise.

A défaut de disposition conventionnelle, la durée maximale est, en principe, limitée à 18 mois, renouvellement inclus.

Elle est réduite à 9 mois en cas de :

- contrat conclu dans l’attente de l'entrée en service effective d'un salarié recruté en CDI ;

- travaux urgents nécessités par des mesures de sécurité.

Elle est portée à 24 mois en cas de :

- remplacement d’un salarié dont le départ définitif précède la suppression de son poste ;

- mission effectuée à l’étranger ;

- commande exceptionnelle à l’exportation.

Elle est portée à 36 mois en cas de :

- contrat conclu dans le cadre de l’apprentissage.

 Quelle est la durée de la période d’essai d’un contrat de travail temporaire ? 

Le contrat de mission peut comporter une période d'essai dont la durée est fixée par convention ou accord de branche étendu ou par convention ou accord d'entreprise ou d'établissement.

À défaut de disposition conventionnelle, cette durée ne peut excéder :

- 2 jours si le contrat est conclu pour une durée inférieure ou égale à 1 mois ;

- 3 jours si le contrat est conclu pour une durée supérieure à 1 mois et inférieure ou égale à 2 mois ;

- 5 jours si le contrat est conclu pour une durée supérieure à 2 mois.

 Comment rompre un contrat de travail temporaire ?

Le contrat de mission peut être rompu de manière anticipée par l’entreprise de travail temporaire ou par le salarié pendant la période d’essai.

L’entreprise de travail temporaire peut aussi rompre le contrat en cas de faute grave du salarié ou en cas de force majeure. Si la rupture anticipée du contrat intervient en dehors de ces deux cas, l’entreprise de travail temporaire doit proposer au salarié un nouveau contrat de mission selon certaines modalités prévues par le Code du travail.

Le salarié peut, quant à lui, rompre le contrat en cas d’embauche en CDI.

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