La maladie ou l'accident non professionnel provoque la suspension du contrat de travail. L'incapacité de travail doit être réelle, temporaire et médicalement constatée. Lorsque ces conditions sont remplies, l'absence du salarié ne constitue pas une inexécution fautive des obligations découlant de son contrat de travail dont l'exécution est simplement suspendue. Il en résulte que salarié et employeur ne sont pas dégagés des autres droits et obligations qui ne sont pas directement liés à l'exécution du contrat de travail mais à son existence et, en particulier au respect d'une obligation de loyauté dans l'exécution du contrat de travail. Les juges sont venus encadrer et limiter la possibilité pour l'employeur de rompre le contrat pendant cette période. La suspension n'arrive à son terme que si certaines conditions sont remplies.
L'arrêt maladie suspend l'exécution du contrat de travail
Les conditions de la suspension du contrat de travail
Information de l'employeur. Le salarié dont l'état de santé ne lui permet pas d'assurer sa prestation de travail doit informer l'employeur de son indisponibilité dans les plus brefs délais. Il est préférable d'informer l'employeur immédiatement puis de justifier l'absence par l'envoi d'un certificat médical d'arrêt de travail.
Le délai pour justifier de l'absence est généralement fixé à 48 heures par les conventions collectives, les réglements intérieurs ou les usages.
Le défaut de justification de l'absence ne peut caractériser une volonté manifeste et non équivoque de démissionner. Mais le salarié s'expose à une sanction pour son absence injustifiée, pouvant aller jusqu'au licenciement, éventuellement pour faute grave.
Les effets de la suspension de l'exécution du contrat de travail
Dispense de travail. Pendant la suspension de son contrat de travail, le salarié est dispensé d'activité. Le salarié n'est pas tenu de poursuivre pendant cette période une collaboration ; un employeur ne peut sanctionner un salarié qui rend impossible tout contact avec ses collègues pendant son arrêt maladie (Soc. 15 juin 1999, no 96-44.772 P).
Maintien de l'obligation de loyauté. Pendant son arrêt de travail pour maladie, le salarié reste tenu à une obligation de loyauté envers son employeur. Celle-ci lui impose, par exemple, de restituer à l'employeur les éléments matériels nécessaires à l'activité de l'entreprise, comme les fichiers clients (Soc. 6 févr. 2001, no 00-40.894 P) ou de lui communiquer un mot de passe informatique lorsqu'il n'existe pas d'autre moyen pour le récupérer (Soc. 18 mars 2003, no 01-41.343 P).
La reconnaissance d'une déloyauté du salarié nécessite que l'acte litigieux porte préjudice à l'employeur. Ainsi, le manquement du salarié à ses obligations vis-à-vis de la sécurité sociale ne peut justifier un licenciement en ce qu'il ne constitue pas un acte de déloyauté à l'égard de l'employeur. Ainsi en est-il du fait de se trouver hors de son domicile en dehors des heures de sortie autorisées (Soc. 27 juin 2000, no 98-40.952 P). Effectuer un voyage d'agrément dans un pays lointain pendant une période d'arrêt de travail médicalement justifiée ne permettra pas davantage de fonder une cause réelle et sérieuse de licenciement (Soc. 16 juin 1998, no 96-41.558 P). De la même manière, le seul fait pour un salarié de tenir un stand sur un marché aux puces pendant un arrêt maladie n'a pas été considéré comme constitutif d'un manquement aux obligations contractuelles pouvant donner lieu à un licenciement disciplinaire (Soc. 21 mars 2000, no 97-44.370 P).
En revanche, des actes susceptibles d'être assimilés à un comportement concurrentiel seront considérés comme un manquement à l'obligation de loyauté. Tel est le cas lorsque le salarié exerce pour son compte pendant son arrêt maladie la même activité que celle de son employeur (Soc. 21 oct. 2003, no 01-43.943 P) ou encore lorsqu'il démarche des clients de l'entreprise pour une société appartenant à son conjoint (Soc. 23 nov. 2010, no 09-67.249 P).
La Cour qualifie de déloyaux d'autres comportements, comme le fait de tenir lors d'une visite dans l'entreprise, durant la suspension du contrat, des propos particulièrement insultants et injurieux, consistant notamment dans le dénigrement des services et des membres du personnel, et entendus en dehors du bureau où ils étaient tenus (Soc. 25 juin 2002, no 00-44.001 P).
Les droits du salarié en arrêt de travail pour maladie ou accident non professionnel
Maintien du salaire du salarié en arrêt maladie
Le salarié en arrêt maladie bénéficie pendant la durée de suspension de son contrat de travail d'indemnités journalières de sécurité sociale et d'un complément de salaire versé soit par l'employeur lorsque le salarié justifie d'une certaine ancienneté, en application, soit de l'article L. 1226-1 du code du travail, soit, si elle est plus favorable, de la convention collective applicable dans l'entreprise, les deux régimes (légal et conventionnel) ne se cumulant pas. Ce complément de salaire peut également être versé par un régime de prévoyance lorsque l'entreprise adhère à un tel régime.
Ces indemnisations se complètent et permettent de garantir au salarié un maintien total ou partiel de sa rémunération.
Le bénéfice d'une indemnisation complémentaire à l'allocation journalière est subordonné aux conditions suivantes :
- le salarié doit justifier d'une année d'ancienneté dans l'entreprise ;
- être pris en charge par la Sécurité sociale ;
- justifier par certificat médical et le cas échéant par contre-visite médicale de l'incapacité de travail provoquant l'absence au travail ;
- être soigné sur le territoire français ou dans l'un des États de l'Union européenne ou l'un des États parties à l'accord sur l'Espace économique européen.
Le salarié est indemnisé à compter de son 8e jour d'absence en cas de maladie, d'accident non professionnel ou d'accident de trajet (C. trav., art. D. 1226-3). Elle est calculée selon les modalités suivantes :
- 1° Pendant les trente premiers jours, 90 % de la rémunération brute que le salarié aurait perçue s'il avait continué à travailler ;
- 2° Pendant les trente jours suivants, deux tiers de cette même rémunération (C. trav., art. D. 1226-1).
La durée d'indemnisation augmente en fonction de l'ancienneté ; de 10 jours par période entière de 5 ans d'ancienneté en plus de la durée minimale d'un an, sans que chacun d'eux puisse dépasser 90 jours. La durée maximale d'indemnisation est de 90 jours à 90 % puis 90 jours à 66,66 %, soit un total de 180 jours (C. trav., art. D. 1226-2). .
Rendez-vous de liaison pour les arrêts maladie de longue durée
Lorsque la durée de l'absence au travail du salarié justifiée par l'incapacité résultant de maladie ou d'accident, constaté[e] par certificat médical et contre-visite s'il y a lieu, est supérieure à 30 jours (C. trav., art. D. 1226-8-1), un rendez-vous de liaison peut être organisé entre le salarié et l'employeur, associant le service de prévention et de santé au travail. Ce rendez-vous a pour objet d'informer le salarié qu'il peut bénéficier d'actions de prévention de la désinsertion professionnelle, de l'examen de préreprise et des mesures d'aménagement du poste et du temps de travail. Il est organisé à l'initiative de l'employeur ou du salarié. L'employeur informe celui-ci qu'il peut solliciter l'organisation de ce rendez-vous. Aucune conséquence ne peut être tirée du refus par le salarié de se rendre à ce rendez-vous (C. trav., art. L. 1226-1-3).
Maintien à l'effectif et ancienneté
Pendant la suspension du contrat pour maladie, le salarié continue de faire partie de l'effectif de l'entreprise pour la détermination des seuils d'effectif.
En revanche, s'agissant du calcul de l'ancienneté – sauf dispositions conventionnelles plus favorables – les périodes d'absences liées à une maladie ou un accident d'origine non professionnelle, ne sont pas prises en compte pour le décompte de l'ancienneté.
Arrêt maladie et droits à congés payés
Si le salarié tombe malade juste avant son départ en congés, l'employeur ne peut pas lui imposer de poser ses congés pendant l'arrêt maladie. Les journées de congés sont reportées à l'issue de la date de reprise initialement prévue, dans certaines conditions.
Arrêt maladie pendant les congés payés. Lorsqu'un salarié tombe malade pendant ses congés, aucun report de ceux-ci n'est prévu. Des dispositions plus favorables peuvent toutefois être prévues par convention collective. Cette position sera peut être amenée à évoluer. En effet, en juin 2025, la Commission européenne a décidé d’ouvrir une procédure d’infraction en envoyant une lettre de mise en demeure à la France pour manquement aux règles de l’Union européenne sur le temps de travail (Directive 2003/88/CE). La Commission estime que la législation française ne garantit pas que les travailleurs qui tombent malades pendant leur congé annuel puissent récupérer ultérieurement les jours de congé annuel qui ont coïncidé avec leur maladie. Elle considère que la législation française n’est donc pas conforme à la directive sur le temps de travail et ne garantit pas la santé et la sécurité des travailleurs.
Arrêt maladie et report des congés.
Une période de report de 15 mois. Le salarié qui est dans l'impossibilité, pour cause de maladie ou d'accident (d'origine professionnelle ou non), de prendre au cours de la période de prise de congés tout ou partie des congés qu'il a acquis, bénéficie d'une période de report de 15 mois pour les utiliser (C. trav., art. L. 3141-19-1).
Au-delà de cette période, les congés sont perdus si le salarié ne les prend pas dès lors que l'employeur l'a informé, dans le mois suivant la reprise du travail du nombre de jours de congé dont il dispose et de la date jusqu'à laquelle les jours de congés peuvent être pris (C. trav., art. L. 3141-19-3).
Un accord d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche pourrait fixer une durée de report supérieure.
Point de départ de la période de report de 15 mois. La loi fixe le point de départ de cette période de report à la date à laquelle le salarié reçoit de l'employeur, postérieurement à sa reprise du travail, les informations sur ses droits à congés payés (C. trav., art. L. 3141-19-1 et L. 3141-19-3).
Mais si le salarié est en arrêt maladie depuis plus d'un an et que son contrat continue d'être suspendu, le point de départ est la date de la fin de la période d'acquisition des congés payés. Dans cette situation, c'est la date de fin de la période d'acquisition au titre de laquelle les congés ont été acquis qui constitue le point de départ de la période de report (C. trav., art. L. 3141-19-2)
Arrêt maladie et acquisition de droits à congé payé. Depuis la loi no 2024-364 du 22 avril 2024 (dite loi DDADUE 2), l'article L. 3141-5 considère que la période de suspension pour maladie non professionnelle constitue une période de travail effectif ouvrant droit à congés payés. Cette modification législative fait suite aux arrêts du 13 septembre 2023 (no 22-17.340 et no 22-17.638), dans lesquels la chambre sociale décidait de laisser inappliquées les règles contraires au droit européen et jugeait que, le salarié peut acquérir des droits à congés payés pendant les périodes de suspension de son contrat de travail pour cause de maladie non professionnelle ou pour cause de maladie professionnelle ou accident du travail au-delà d'une durée ininterrompue d'un an. Ainsi depuis le 24 avril 2024 - et de manière rétroactive à compter du 1er décembre 2009 - les salariés en arrêt de travail continuent d'acquérir des congés payés, quelle que soit l'origine de la maladie ou de l'accident. Par ailleurs, la limite d'une durée ininterrompue d'un an de l'arrêt de travail pour accident du travail ou maladie professionnelle au-delà de laquelle l'absence n'ouvre plus droit à congé est supprimée. Ainsi, sont désormais considérées comme période de travail effectif pour la détermination des droits à congés payés, les périodes de suspension pour cause d'accident du travail ou maladie professionnelle, quelle que soit leur durée, y compris celles qui excédent un an
Le licenciement pendant l'arrêt maladie
Nullité de la rupture en raison de l'état de santé
Le licenciement expressément motivé par l'état de santé du salarié est discriminatoire (C. trav., art. L. 1132-1). Il est de ce fait nul de plein droit (C. trav., art. L. 1132-4).
Les licenciements autorisés
Si l'article L. 1132-1 du code du travail fait interdiction de licencier un salarié, notamment en raison de son état de santé ou de son handicap, ce texte ne s'oppose pas au licenciement motivé, non par l'état de santé du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées du salarié. Celui-ci ne peut toutefois être licencié que si ces perturbations entraînent la nécessité pour l'employeur de procéder à son remplacement définitif, lequel s'entend de l'engagement d'un autre salarié.
Le licenciement du salarié dont le contrat est suspendu en raison d'une maladie ou d'un accident non professionnel repose également sur une cause réelle et sérieuse en cas de manquement à son obligation de loyauté.
Fin de l'arrêt maladie : la reprise du travail
La suspension prend fin au terme de la période indiquée par le certificat médical lequel détermine la durée des effets de la maladie ou des séquelles de l'accident. Cependant, après une absence d'au moins soixante jours, le salarié doit bénéficier d'un examen de reprise de travail par le médecin du travail (C. trav., art. R. 4624-31 ; la durée de l'absence nécessitant une visite de reprise était de 30 jours pour les arrêts de travail débutant avant le 31 mars 2022). L'initiative de la visite de reprise appartient à l'employeur qui doit saisir le service de prévention et de santé au travail dès qu'il a connaissance de la date de la fin de l'arrêt de travail.
À moins d'être déclaré inapte, le salarié retrouve alors son emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération équivalente.


