Fiche thématique
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25 avril 2023

En signant son contrat de travail, le salarié s’engage à être loyal envers son employeur. Il ne doit nuire ni à la réputation ni au bon fonctionnement de la société qui l’emploie, et ce, pendant toute la durée du contrat de travail, même si celui-ci est suspendu pour cause de maladie.

Comment s’assurer de la loyauté d’un salarié en congé maladie ? Que peut lui demander l’employeur ?

Sommaire

Demander la restitution du matériel et des documents utiles au fonctionnement de l’entreprise

L’employeur peut légitimement demander au salarié absent pour maladie de restituer les documents et matériel qu’il détient et sont nécessaires à la poursuite de l’activité de l’entreprise. Le salarié qui refuse d’obtempérer commet une faute susceptible de motiver son licenciement.

Remarque

Ainsi, l’employeur peut réclamer des fichiers clients à un VRP absent pour permettre la prospection de son secteur par son remplaçant. Si le salarié refuse de faire droit à cette demande, l’employeur peut le licencier pour faute ( Cass. soc., 6 févr. 2001, no 98-46.345 ).

Il peut également réclamer le mot de passe informatique d’un salarié absent pour accéder aux dossiers qu’il traite ( Cass. soc., 18 mars 2003, no 01-41.343 ). Le salarié qui ne transmet pas cette information alors qu’il sait pertinemment que son refus met en difficulté la personne qui le remplace dans l’entreprise, manque à son obligation de bonne foi et de loyauté ( CA Limoges, 28 nov. 2000, no 99/00699 ).

Mais attention : la restitution demandée ne doit, en aucun cas, conduire le salarié malade à fournir une prestation de travail. Avant de demander la restitution du matériel, l’employeur doit donc toujours se demander si cela n’implique pas l’accomplissement d’une prestation de travail pour le salarié.

Remarque

Il y a par exemple prestation de travail lorsqu’une société d’assurances demande à son salarié non seulement de restituer primes et contrats mais également d’établir la situation de son compte encaissement ( Cass. soc., 25 juin 2003, no 01-43.155 ), ou lorsque l’employeur convoque le salarié pour qu’il fournisse les informations nécessaires à la marche de l’entreprise ( Cass. soc., 24 janv. 1995, no 93-41.373 ).

S’assurer que le salarié n’exerce aucune activité préjudiciable à l’entreprise pendant son absence

Le salarié ne doit exercer aucune activité rémunérée concurrente

Lorsqu’un médecin prescrit un arrêt de travail à un patient, c’est dans le but de lui faire récupérer sa force de travail par du repos. L’exercice d’une activité professionnelle pendant ce repos prouve que l’indisponibilité du salarié n’est pas réelle. Le salarié en arrêt de travail ne peut donc exercer une activité professionnelle rémunérée, concurrente de celle de l’employeur ou simplement incompatible avec le motif de la suspension du contrat de travail, sans commettre un acte déloyal susceptible de motiver son licenciement pour cause réelle et sérieuse, voire pour faute grave.

Tel est le cas :

  • du salarié d’une société de travaux publics qui travaille habituellement, pendant son arrêt, sur le chantier d’une maison en construction avec trois ouvriers sous ses ordres ( Cass. soc., 21 juill. 1994, no 93-40.554 ) ;
  • d’un salarié qui répare son véhicule pour son compte et fait appel à un autre mécanicien de sa société ( Cass. soc., 21 oct. 2003, no 01-43.943 ) ;
  • d’un salarié qui démarche, pendant son arrêt de travail, des clients de son employeur (une société d’ambulances) pour la société de taxis de son conjoint ( Cass. soc., 23 nov. 2010, no 09-67.249 ) ;
  • d’un salarié qui a été vu, pendant son arrêt de travail, travaillant dans les locaux appartenant à son ancien employeur, avec lequel son nouvel employeur est en conflit sur les conditions de transfert du fonds de commerce ( Cass. soc., 21 nov. 2007, no 06-44.229 ) ;
  • ou même d’un salarié mineur de fond en arrêt de travail pour maladie qui occupe, pendant plusieurs mois, un emploi rémunéré de serveur de bar, activité pourtant non concurrente de celle de l’entreprise qui l’emploie ( Cass. soc., 12 janv. 2005, no 02-46.002 ).

Remarque

Attention : l’employeur qui se prévaut d’un acte déloyal doit en rapporter la preuve ; il doit prouver non seulement les faits (en l’occurrence travailler pour autrui de manière non bénévole) via la contre-visite médicale patronale par exemple, mais également le caractère déloyal du comportement.

Mais il peut exercer une activité bénévole et non concurrente

En revanche, dès que l’activité pendant l’arrêt est temporaire, bénévole, compatible avec le motif de l’arrêt et ne porte pas tort à l’employeur, son exercice ne constitue pas un manquement à l’obligation de loyauté susceptible de conduire au licenciement du salarié.

Le salarié peut donc se livrer à des activités bénévoles, occasionnelles ou non lucratives, telles que :

Dès lors que son contrat de travail ne contient aucune clause d’exclusivité, le salarié en arrêt peut mener, développer et encourager indirectement par l’intermédiaire d’entreprises tierces dirigées par des membres de sa famille, des activités non concurrentes de celles de son employeur ( Cass. soc., 21 sept. 2006, no 05-41.477 ).

Et si l’activité, lucrative et régulière, ne concurrence pas l’entreprise ?

Si l’activité exercée pendant l’arrêt n’est pas préjudiciable à l’entreprise, il semble que le licenciement du salarié pour acte déloyal est infondé, peu important que cette activité soit lucrative et régulière ( Cass. soc., 12 oct. 2011, no 10-16.649 ).

La Cour de cassation assouplit-elle sa position en abandonnant le critère du bénévolat occasionnel ? Un salarié arrêté pour maladie peut-il exercer une activité lucrative et régulière en toute impunité, du moment que cette activité ne cause pas préjudice à son employeur ? Cet arrêt mériterait confirmation.

Sanctionner les propos ou comportements répréhensibles, même pendant l’arrêt

Il peut arriver que, durant l’arrêt de travail, le salarié, par les propos qu’il tient ou son comportement, crée un trouble pour l’entreprise qui l’emploie. Il peut s’agir, par exemple, de propos injurieux tenus par un salarié en arrêt maladie à l’encontre de sa hiérarchie devant trois adultes qu’il était chargé d’encadrer ( Cass. soc., 10 déc. 2008, no 07-41.820 ). Un tel comportement peut constituer un motif de licenciement.

Et la violation des obligations de sécurité sociale ?

Les obligations du salarié envers la Sécurité sociale sont indépendantes de celles qu’il a envers son employeur. Même s’il ne commet pas d’actes déloyaux vis-à-vis de lui, le salarié doit notamment s’abstenir d’exercer toute activité non-autorisée, sous peine de devoir rembourser les IJSS depuis la date du manquement. Ainsi, un salarié en arrêt maladie depuis plusieurs mois et surpris à 3 reprises par les agents de contrôle en situation de travail chez son employeur a été condamné à rembourser à la CPAM les IJSS perçues depuis la date du manquement ( Cass. 2e civ., 28 mai 2020, no 19-12.962 ). L’assuré est également passible d’une pénalité financière prononcée par la CPAM : citons l’exemple d’une salariée ayant continué à travailler pour l’un de ses deux employeurs alors qu’elle se trouvait en arrêt-maladie. La Cour de cassation a validé cette sanction, même si l’intention frauduleuse de la salariée n’était pas démontrée ( Cass. 2e civ., 28 mai 2020, no 19-14.010 ). L’assuré qui quitte la circonscription de la caisse pendant un arrêt de travail pour maladie sans avoir obtenu l’autorisation préalable de celle-ci peut se voir notifier la suspension de ses indemnités journalières de maladie pour la période litigieuse ( Cass. 2e civ., 7 avr. 2022, no 20-22.874 ).

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Questions fréquemment posées

Le salarié peut il travailler chez un autre employeur pendant son arrêt de travail ?

Oui, sauf si cette activité est préjudiciable pour l’employeur, par exemple s’il s’agit d’une activité concurrente. Toutefois, à l’égard de la sécurité sociale, le fait d’exercer une activité non autorisée par le médecin peut conduire à la suppression des indemnités journalières et à la restitution des indemnités déjà versées.

Le salarié peut il utiliser sa voiture de fonction pendant son arrêt de travail ?

Si la voiture de fonction est à titre exclusif un outil de travail, l’employeur peut exiger que le salarié la rende à l’entreprise jusqu’à son retour. Si la voiture de fonction est aussi utilisée pour un usage privé, il s’agit d’ un avantage en nature. Le salarié peut continuer à utiliser ce véhicule pendant son arrêt de travail.

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