Distinctions
Distinction entre forme sociale et caractère d'une société
La forme sociale fait référence à un type de société, nommé et normé, c'est-à-dire doté d'un corpus normatif propre. Le caractère d'une société fait référence à la nature civile ou commerciale de la société et englobe différentes formes sociales. La transformation n'est pas subordonnée à un changement de caractère. Elle peut opérer alors même que la société conserve le même caractère que celui qu'elle avait, dès lors qu'elle se place sous une nouvelle forme sociale dotée d'un régime juridique propre. Ainsi, lorsqu'une société par actions simplifiée (SAS) devient une société anonyme (SA), nous sommes bien dans l'hypothèse d'une transformation, bien que ces sociétés soient toutes deux commerciales par la forme.
Distinction entre forme sociale et nature du contrat
Le passage d'une société à une association – ou inversement – ne constitue pas une transformation sociale mais une modification du contrat originel. C'est la nature du contrat qui est modifiée.
Distinction entre forme sociale et modalités d'une forme sociale
Le changement de modalités particulières applicables à une société ne constitue pas une transformation sociale. Si bien que, à titre d'exemple, le passage d'une société anonyme moniste (C. com., art. L. 225-17 s.) à une société anonyme dualiste (C. com., art. L. 225-57 s.) ne constitue pas une transformation de la société mais un changement dans le mode de gestion. De même, lorsqu'une EURL (entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée) ou une SASU (société par actions simplifiée unipersonnelle) devient une SARL ou une SAS pluripersonnelle, ce passage ne s'analyse pas non plus en une transformation.
Cas de transformation
Transformation volontaire
Pour diverses raisons, les associés peuvent décider de placer la société sous une autre forme sociale et de la soumettre à un nouveau régime juridique. Dans ce cas, la transformation est volontaire.
Transformation forcée
Dans certaines hypothèses, la transformation a lieu par l'effet de la loi. Généralement, elle s'opère lorsque la société ne remplit plus les conditions de la forme à laquelle elle appartient. Tel est le cas, par exemple, des SARL au sein desquelles le nombre maximum d'associés aurait été dépassé. Une SARL avec plus de 100 associés dispose d'un an pour se conformer au maximum légal ou se transformer, sous peine de dissolution (C. com., art. L. 223-3).
Transformation interdite
La transformation peut être interdite par la loi. Une société anonyme ne peut, à titre d'exemple, se transformer en une autre forme sociale que si elle a au moins deux ans d'existence et si elle a établi et fait approuver par ses actionnaires le bilan de ses deux premiers exercices (C. com., art. L. 225-243).
Conditions
Conditions communes à toutes les sociétés
La forme sociale figure parmi les mentions obligatoires des statuts (C. civ., art. 1835). La transformation est donc effectuée en assemblée générale extraordinaire. La société doit disposer de la personnalité morale. La transformation d'une société sans personnalité juridique en société dotée d'une personnalité juridique n'est pas une transformation.
Enfin, la société transformée doit remplir les conditions de validité requises pour la nouvelle forme sociale (par ex., capital social de 37 000 € minimal si la transformation se fait en SA).
Conditions spécifiques à certaines sociétés
La décision peut être prise à la majorité ou à l'unanimité selon les dispositions légales applicables à la forme sociale d'origine et les stipulations statutaires, et, sous réserve qu'elle ne constitue pas une augmentation des engagements des associés (C. civ., art. 1836).
Par ailleurs, la transformation d'une SA en SAS requiert l'unanimité (C. com., art. L. 227-3). Il en est de même, pour la jurisprudence, en cas de fusion-absorption d'une société d'une autre forme par une société par actions simplifiée (Com. 19 déc. 2006, no 05-17.802, Manuel Cassado c/ SAS Cofradim Résidences ; Versailles, 27 janv. 2005, no 03/04697).
Accomplissement des formalités
Afin de la rendre opposable aux tiers, les formalités de publicité doivent être accomplies (Paris, 28 mars 1990). Le dépôt au greffe compétent des documents requis donne lieu à une inscription modificative au registre du commerce et des sociétés.
Effets de la transformation et sanctions de la transformation irrégulière
Effets sur la société, ses dirigeants, ses associés et sur les tiers
La société est soumise à un nouveau corps de règles et le cas échéant à un nouveau régime fiscal à compter de la décision de transformation, sans création d'une personne morale nouvelle (C. civ., art. 1844-3 et C. com., art. L. 210-6). Le droit des sociétés et le droit fiscal ne voient en la transformation qu'une modification statutaire (Com. 7 mars 1984, no 82-12.432, Sté civile Le Joncour), sous réserve que d'autres modifications importantes ne soient pas opérées (par ex. celle de l'objet de la société).
Les membres des organes sociaux perdent leurs fonctions par l'effet de la transformation pour laisser place aux nouveaux organes prévus par la nouvelle forme sociale, sans pouvoir invoquer une révocation (Com. 22 mai 1973, no 71-12.731). Les associés conservent leur qualité d'associé mais leur responsabilité peut être modifiée si la nouvelle forme sociale impose une obligation aux dettes sociales. Les tiers-créanciers, quant à eux, se voient appliquer un principe de continuité des contrats en cours (sous réserve des clauses contractuelles).
Sanctions de la transformation irrégulière
S'agissant d'un acte modificatif des statuts, la nullité de la transformation sociale pour une société commerciale ne peut résulter que de la violation d'une disposition expresse du Livre II du code de commerce (C. com., art. L. 235-1, v. par ex. C. com., art. L. 223-43). Pour une société civile, elle ne peut résulter que de la violation d'une disposition impérative du Titre IX du code civil (C. civ., art. 1844-10). Les causes de nullité des contrats en général peuvent être invoquées dans tous les cas. Par ailleurs, la transformation ne doit pas être abusive (Com. 6 juin 1972, no 70-11.987) ni frauduleuse. La transformation suivie d'une cession des titres sociaux, sans que la société ne revienne à sa forme d'origine, n'est pas constitutive d'un abus de droit (Com. 10 déc. 1996, no 94-20.070, Sté RMC France).
Régularisation
Une action en régularisation peut être intentée par tout intéressé ou par le ministère public, si les nouveaux statuts ne contiennent pas les énonciations exigées par la loi ou si une formalité prescrite par la loi a été omise ou irrégulièrement accomplie (C. civ., art. 1839, al.2 et C. com., art. L. 210-7, al. 3).