Fiche thématique
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13 juillet 2023
Le fonds de commerce désigne l'ensemble des éléments mobiliers corporels (matériel, outillage, marchandises) et incorporels (droit au bail, nom commercial, enseigne, droit de propriété industrielle, etc.) qu'un commerçant rassemble et organise en vue de la recherche et de l'exploitation d'une clientèle, et qui constitue une entité juridique distincte des éléments qui la composent.

Sommaire

Nature juridique

Le fonds de commerce a beau être l'élément essentiel de l'actif professionnel du commerçant, il ne fait pas l'objet d'une définition légale. L'article L. 141-5, alinéa 2, du code de commerce, qui définit l'assiette du privilège du vendeur d'un fonds de commerce, se borne à distinguer les divers éléments qui entrent dans sa composition.

Bien qu'elle ne fasse pas l'unanimité, la qualification d'universalité de fait est largement retenue pour le désigner. L'idée de base est toujours la même : le fonds de commerce est un bien distinct des éléments qui le composent. Le fonds subsiste malgré les modifications intervenues dans sa composition.

Le fonds de commerce peut faire l'objet de multiples opérations juridiques : vente, nantissement, apport en société, etc. (v. Fonds de commerce (Transmission) ; Nantissement de fonds de commerce). Il peut également être géré de multiples manières (v. Fonds de commerce (Gérance) ; Location-gérance de fonds de commerce).

Éléments du fonds de commerce

Éléments incorporels

Clientèle

La clientèle est l'élément essentiel du fonds de commerce, sans laquelle celui-ci ne saurait exister. Tous les autres servent à la réunir et à la retenir. Sa protection se confond avec celle du fonds de commerce.

On distingue généralement la clientèle, qui s'adresserait à un commerçant pour des raisons de confiance ou d'habitude, de l'achalandage, qui correspond à la clientèle passagère, précaire, liée uniquement à l'emplacement du fonds, à la situation du commerce.

Signes distinctifs

Ce sont les signes qu'utilise le commerçant pour se faire connaître et reconnaître par la clientèle, existante ou potentielle : nom commercial, enseigne, marque et, avec le développement du commerce électronique, nom de domaine.

Créations intellectuelles

Les droits reconnus aux inventeurs sur leurs œuvres (brevet d'invention, dessins et modèles, obtentions végétales, voire droits de propriété littéraire et artistique, en particulier le droit d'auteur) sont des éléments susceptibles de faire partie d'un fonds de commerce.

Droit au bail

Lorsque le commerçant est locataire des lieux où est exploité le fonds, les droits qu'il tient du statut des baux commerciaux sont compris dans son fonds de commerce.

Au droit au bail, il faut assimiler certains droits d'occupation : droit de concession immobilière, autorisation d'occupation privative dans un marché d'intérêt national.

Créances et dettes

En principe, les créances et les dettes de l'exploitant, les contrats qu'il conclut pour l'exploitation ne font pas partie du fonds de commerce et ne se transmettent pas avec celui-ci. Mais ce principe comporte des dérogations légales : contrat de bail, contrat de travail (C. trav., art. L. 1224-1 s.), contrat d'édition, dette d'impôt. Parfois, la réponse est plus nuancée. Ainsi, une clause de non-rétablissement du précédent commerçant peut faire partie du fonds et être cédée, à condition d'avoir été insérée dans l'acte de cession du fonds et expressément acceptée par le cessionnaire (Com. 1er avr. 1997, no 95-12.025).

Licences et autorisations administratives

Elles sont parfois des éléments du fonds de commerce et peuvent être comprises dans sa transmission. Mais leur régime est varié.

Les unes ont un caractère personnel (carte professionnelle) et ne se transmettent pas. D'autres ont un caractère réel et peuvent être incluses dans un fonds. Tel est le cas, par exemple, des licences des débits de boissons, qui, en cas de vente de fonds, se trouvent comprises dans les éléments cédés, sauf convention contraire.

Fonds de commerce sur le domaine public

La loi du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises vise à faciliter l'utilisation du domaine public dans le cadre de certaines activités commerciales. À cet égard, elle pose le principe qu'« un fonds de commerce peut être exploité sur le domaine public sous réserve de l'existence d'une clientèle propre » et institue une autorisation d'occupation temporaire du domaine public pour l'acquéreur ou l'héritier d'un tel fonds (L. no 2014-626 du 18 juin 2014, art. 72 ; CGPPP, art. L. 2124-32-1 à L. 2124-35 nouv.).

Éléments corporels

Matériel et marchandises

Le matériel est le mobilier commercial servant à l'exploitation du fonds de commerce, notamment à l'agencement d'un magasin. Les marchandises peuvent être définies comme tous les objets destinés à la vente, voire à la location. On distingue, en règle générale, les matières premières devant être transformées des produits finis directement destinés à la vente. Leur distinction, en général facile, présente de nombreux intérêts juridiques (vente, nantissement) et fiscaux.

Immeubles

Les immeubles affectés à l'exploitation et dont le commerçant est propriétaire ne font pas partie du fonds de commerce. La solution est générale et absolue (Com. 31 mars 2009, no 08-14.180). Il en est ainsi même si l'immeuble est l'élément principal attractif de la clientèle, comme c'est souvent le cas pour le fonds hôtelier.

Conditions d'existence d'un fonds de commerce

Activité commerciale

Un fonds n'est commercial que s'il a pour objet l'accomplissement d'une activité commerciale, c'est-à-dire d'actes de commerce à titre de profession habituelle (achat pour revendre, etc. ; v. Acte de commerce). Ainsi, seul peut normalement être propriétaire d'un fonds de commerce un commerçant, personne physique, ou personne morale, plus particulièrement société commerciale immatriculée. Néanmoins, la propriété d'un fonds de commerce est refusée à la société commerciale par la forme, mais qui exerce une activité civile (Civ. 3e, 10 févr. 1999, no 97-14.669). Il en est de même pour l'association, même si elle exerce une activité commerciale (Com. 19 janv. 1988, no 85-18.443).

Clientèle

Controverse

Les éléments qui composent un fonds de commerce et qui en font la valeur sont variables d'un fonds à l'autre. Mais au-delà de cette diversité, on découvre un élément commun toujours nécessaire : la clientèle.

Pour être propriétaire d'un fonds de commerce, encore faut-il être personnellement titulaire de la clientèle que l'on exploite. C'est ce qui explique, par exemple, que le gérant d'un débit de tabac, considéré comme un préposé de l'Administration, ne puisse prétendre à la propriété d'un fonds de commerce, à moins qu'il exerce en même temps une autre activité indépendante, par exemple s'il exploite un débit de boissons.

Réseau de distribution

Une difficulté a surgi à propos du développement des réseaux de distribution. Le distributeur indépendant, par exemple le franchiseur ou le concessionnaire, membre d'un réseau intégré, peut-il se prévaloir de la propriété de sa clientèle ? La Cour de cassation, à propos du contrat de franchise, considère qu'il existe en réalité deux clientèles, que franchiseur et franchisé se partagent : une clientèle nationale, attachée à la notoriété de la marque du franchiseur, ainsi qu'une clientèle locale, créée par l'activité du franchisé, et par les moyens qu'il a personnellement mis en œuvre, parmi lesquels le matériel, le stock et le bail, c'est-à-dire les éléments du fonds de commerce. Le fait qu'il ne soit pas le propriétaire de la marque et de l'enseigne mises à sa disposition pendant l'exécution du contrat de franchise ne constitue pas un obstacle à sa reconnaissance d'un droit sur la clientèle, et par conséquent, d'un droit de propriété sur le fonds de commerce qu'il exploite (Civ. 3e, 27 mars 2002, no 00-20.732). Elle semble également reconnaître au profit du concessionnaire l'existence d'une clientèle propre (Com. 12 juin 2007, no 06-14.872).

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Questions fréquemment posées

Comment distinguer la clientèle de l’achalandage ?

Clientèle et achalandage sont parfois visés ensemble dans les textes. Ils se laissent malaisément distinguer. Selon certains auteurs, la clientèle se rapporterait plutôt aux personnes attirées par la personnalité du commerçant, l'achalandage, aux personnes attirées par l'emplacement du fonds. D'autres insistent sur la permanence ou la régularité des relations d'affaires : la clientèle serait composée par les clients d'habitude ; l'achalandage serait constitué par les clients occasionnels. En réalité, la distinction ne présente pas d'intérêt juridique. Peu importe les motivations des clients et chalands ; ils contribuent tous à la réussite du commerçant et à la prospérité de son entreprise.

Le droit au bail est-il un élément du fonds de commerce ?

Le droit au bail fait incontestablement partie du fonds de commerce. Dans certains types de commerce, il est même un élément prépondérant, car constituant le seul élément du fonds susceptible d’attirer la clientèle. Il en est ainsi en présence d’un fonds de commerce sédentaire qui porte sur la vente de biens ou de denrées de faible valeur (boulangerie, marchand de journaux…). Le lieu d’implantation du local loué a un caractère essentiel pour la clientèle. Dans ce cas de figure, la cession du fonds de commerce emporte nécessairement celle du bail.

Parfois, en revanche, le droit au bail, bien que faisant partie du fonds de commerce, revêt un caractère accessoire. Il existe même des fonds de commerce sans droit au bail cas en particulier du commerçant effectuant des ventes en tournée ou en ligne).

Comment un commerçant peut-il protéger juridiquement sa clientèle ?

Celui qui a acquis un fonds de commerce ou seulement une clientèle peut se protéger contre les agissants du cédant visant à récupérer la clientèle en ayant recours au droit de la vente qui met à la charge du cédant l’obligation de garantir l’acquéreur contre l’éviction. Cette obligation légale peut être précisée ou renforcée conventionnellement par le biais d’une clause de non-concurrence insérée dans le contrat de cession de fonds de commerce.

Lorsque le détournement de clientèle est le fait d’un concurrent, le commerçant peut agir contre lui en concurrence déloyale pour être indemnisé. En agissant en référé, il peut obtenir du juge qu’il ordonne la cessation des agissements illicites.

La clientèle peut également être pénalement protégée, par le biais du délit d’abus de confiance.

Les licences et cartes professionnelles font-elles parties du fonds de commerce de leur titulaire ?

La réponse est généralement positive, mais ce n’est pas systématique. Ainsi, la licence de débit de boissons fait incontestablement partie du fonds de commerce ; dès lors, en cas de vente de fonds, elle se trouve comprise dans les éléments cédés, à défaut de convention contraire. La licence de pharmacie est elle aussi obligatoirement rattachée au fonds de commerce. Elle ne peut d’ailleurs en aucun cas être cédée par son indépendamment du fonds de commerce auquel il se rapporte (CSP, art. L. 5125-21). Cette règle, d’ordre public, n’admet pas la convention contraire. En revanche, la carte professionnelle de l’agent immobilier ne fait pas partie de son fonds de commerce.

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