Le principe du compte personnel de formation (CPF) a été fixé dans l'article L. 6111-1 du code du travail modifié par la loi no 2013-504 du 14 juin 2013 sur la sécurisation de l'emploi. La loi no 2014-288 du 5 mars 2014 est venue ensuite parachever son régime juridique entraînant la suppression définitive du droit individuel à la formation (DIF). L'objet du CPF est l'accès à une formation à titre individuel.
Depuis le 1er janvier 2017, la loi no 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels dite loi Travail intègre le CPF – ainsi que le compte personnel de prévention et le compte d'engagement citoyen – dans le compte personnel d'activité (CPA) (C. trav., art. L. 5151-1s.).
Le régime juridique du CPF a été modifié par la loi "Avenir professionnel" du 5 septembre 2018.
Démarchage téléphonique et fraude au CPF. Suite à des escroqueries visant à vider les CPF de leur crédit, la loi du 19 décembre 2022 visant à lutter contre la fraude au CPF et à interdire le démarchage de ses titulaires a été publiée (L. no 2022-1587 du 19 déc. 2022, JO 20 déc.). Parmi les mesures figure l'interdiction du démarchage commercial des titulaires d'un CPF passible d'une amende administrative qui peut s'élever à 75 000 € pour une personne physique et à 375 000 € pour une personne morale (C. trav., art. L. 6323-8-1).
Les bénéficiaires du compte personnel de formation
Le CPF est ouvert et fermé dans les conditions définies par les dispositions relatives au CPA (C. trav., art. L. 5151-2 et L. 6323-1).
Un compte personnel de formation est ainsi ouvert pour toute personne âgée d'au moins seize ans se trouvant dans l'une des situations suivantes:
- personne occupant un emploi, y compris lorsqu'elle est titulaire d'un contrat de travail de droit français et qu'elle exerce son activité à l'étranger ;
- personne à la recherche d'un emploi ou accompagnée dans un projet d'orientation et d'insertion professionnelles ;
- personne accueillie dans un établissement et service d'aide par le travail ;
- personne ayant fait valoir l'ensemble de ses droits à la retraite ;
- personne détenue exerçant une activité de travail ou une activité bénévole ou de volontariat.
Par dérogation , un CPF est ouvert dès l'âge de quinze ans pour le jeune qui signe un contrat d'apprentissage.
Le compte est fermé à la date du décès de la personne.
L'alimentation du compte personnel de formation
Depuis le 1er janvier 2019, le CPF se comptabilise en euros (C. trav., art. L. 6323-2). Le compte est alimenté en € au titre de chaque année et, le cas échéant, par des abondements en droits complémentaires. Les heures acquises au titre du CPF et du DIF au 31 décembre 2018 sont converties en € à raison de 15 € par heure (Décr. no 2018-1153 du 14 déc. 2018). Le code du travail prévoit que l'alimentation du compte est effectuée en fonction de la durée de travail du salarié sur l'année dans la limite d'un plafond.
Salariés travaillant au moins à mi-temps toute l'année. Le compte personnel de formation du salarié ayant effectué une durée de travail supérieure ou égale à la moitié de la durée légale ou conventionnelle de travail sur l'ensemble de l'année est alimenté à hauteur de 500 € au titre de cette année, dans la limite d'un plafond total de 5 000 € (C. trav., art. R. 6323-1).
Les périodes d'absence du salarié (congé de maternité, de paternité...) sont intégralement prises en compte pour le calcul de la durée du travail effectuée (C. trav., art. L. 6323-12). Les modalités exactes de son alimentation selon les différents cas sont déterminées par voie réglementaire (C. trav., art. R. 6323-1 s.).
Le code du travail prévoit des droits supplémentaires pour certains salariés. Il s'agit des salariés qui n'ont pas atteint un niveau 3 de qualification (CAP, BEP) au sens du cadre national des certifications professionnelles. Ces salariés qui ont effectué une durée de travail supérieure ou égale à la moitié de la durée légale ou conventionnelle de travail sur l'ensemble de l'année voient leur CPF alimenté, au titre de cette année, à hauteur de 800 euros, dans la limite d'un plafond de 8 000 euros (C. trav., art. L. 6323-11-1 ; art. R. 6323-3-1).
Salariés travaillant moins d'un mi-temps toute l'année. Pour les salariés dont la durée de travail a été inférieure à la moitié de la durée légale ou conventionnelle de travail sur l'ensemble de l'année, la CPF est alimenté, au titre de cette année, d'une fraction du montant de 500 €, calculée à due proportion de la durée de travail qu'il a effectuée (C. trav., art. L. 6323-11 et R. 6323-1).
Toutefois, un accord collectif d'entreprise, de groupe ou, à défaut, un accord de branche peut prévoir des modalités d'alimentation du compte plus favorables dès lors qu'elles sont assorties d'un financement spécifique à cet effet (C. trav., art. L. 6323-11).
Abondement complémentaire. Le CPF peut recevoir des abondements en droits complémentaires lorsque le coût de la formation envisagée est supérieur au montant des droits inscrits sur le CPF. Ces abondements peuvent être financés par le titulaire lui-même, en versant les sommes correspondantes à la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC), l'employeur, les opérateurs de compétence, l'Unedic ou France Travail, les organismes chargés de la gestion de la branche accidents du travail et maladies professionnelles, l'organisme chargé de la gestion du compte professionnel de prévention. L'État, ou toutes les collectivités territoriales pourront également prendre en charge des abondements.
Abondement correctif. Les entreprises de 50 salariés et plus, doivent justifier de la tenue des entretiens professionnels pour chaque salarié. À défaut, le CPF du salarié est abondé lorsque le salarié n'a bénéficié d'aucun entretien professionnel et qu'aucune formation autre qu'une formation « obligatoire » ne lui ont été proposés. Le titulaire du compte bénéficie alors d'un abondement de son compte personnel de formation d'un montant de 3 000 € (C. trav., art. L. 6323-13 et R. 6323-3).
Par ailleurs, la loi no 2022-401 du 21 mars 2022 visant à améliorer la protection des lanceurs d'alerte enrichit les sanctions pouvant être prononcées au bénéfice des salariés lanceurs d'alerte, des personnes ayant aidé le lanceur d'alerte à effectuer un signalement ou une divulgation et les personnes ayant fait l'objet, dans le cadre de leur activité professionnelle, de mesures de sanction de la part de l'employeur à l'occasion de l'alerte. Ainsi, à l'occasion de tout litige, le conseil des prud'hommes peut obliger l'employeur, en plus de toute autre sanction, à abonder le compte personnel de formation de ces bénéficiaires jusqu'au plafond majoré applicable au salarié peu qualifié (soit jusqu'à 8 000 € au lieu de 5 000 € pour les autres salariés) (Loi no 2016-1691 du 9 déc. 2016, art. 12 mod. ; C. trav., art. D. 6323-3-4).
Abondement supplémentaire. Un accord collectif d'entreprise, de groupe ou, à défaut, un accord de branche peut prévoir des modalités d'alimentation du compte plus favorables dès lors qu'elles sont assorties d'un financement spécifique à cet effet (C. trav., art. L. 6323-11 et R. 6323-2).
Les modalités d'utilisation du CPF : les formations éligibles
Au titre de l'article L. 6323-6 du code du travail, le CPF ne peut être utilisé que pour suivre certains types de formations. La liste des formations éligibles au CPF a été étendue par la loi "Travail" et la loi "Avenir professionnel" du 5 septembre 2018. Sont désormais éligibles au compte personnel de formation :
- les actions de formation sanctionnées par les certifications professionnelles enregistrées au répertoire national des certifications professionnelles, celles sanctionnées par les attestations de validation de blocs de compétences au sens du même répertoire, et celles sanctionnées par les certifications et habilitations enregistrées dans un répertoire spécifique (C. trav., art. L. 6113-6) comprenant notamment la certification relative au socle de connaissances et de compétences professionnelles (C. trav., art. L. 6323-6);
- Les actions permettant de faire valider les acquis de l'expérience (v. la fiche "Validation des acquis de l'expérience (VAE)"), les bilans de compétences (v. la fiche "Bilan de compétences"), la préparation ux épreuves théoriques et pratiques de toutes les catégories de permis de conduire d'un véhicule terrestre à moteur, les actions de formation d'accompagnement et de conseil dispensées aux créateurs ou repreneurs d'entreprises, les actions de formation destinées à permettre aux bénévoles et aux volontaires en service civique d'acquérir les compétences nécessaires à l'exercice de leurs missions et les actions de formation financées par le fonds du droit individuel à la formation des élus locaux . Les modalités d'éligibilité de ces dernières formations au CPF sont fixées par voie réglementaire (C. trav., art. D. 6323-6 s.).
Par ailleurs, la loi prévoit que le compte peut être mobilisé par son titulaire pour la prise en charge d'une formation à l'étranger (C. trav., art. L. 6323-6-1).
www.moncompteformation.gouv.fr ou sur application mobile « Mon Compte Formation ». Une plateforme gérée par la Caisse des dépôts permet à chaque titulaire d'un CPF d'activer un compte sécurisé afin de visualiser ses droits acquis, de choisir ses formations, de monter un dossier en vue d'une formation (avec ou sans la participation de l'employeur), de payer la formation. L'accès aux droits à la formation est ainsi simplifié par un parcours disponible sur une application mobile et un site web qui référence l'ensemble de l'offre de formation sur le marché et éligible au CPF.
Cette plateforme est sécurisée par le service FranceConnect+ depuis octobre 2023.
Organismes de formation. La loi no 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel prévoit dans son article 6 une obligation de certification, par un organisme tiers, des organismes réalisant des actions concourant au développement des compétences sur la base d’un référentiel national unique, s’ils veulent bénéficier de fonds publics ou mutualisés (financement par un opérateur de compétences, par la commission mentionnée à l’article L. 6323-17-6, par l’État, par les régions, par la Caisse des dépôts et consignations, par France Travail ou par l’Agefiph). Ainsi depuis le 1er janvier 2022, les organismes de formation proposés par la plateforme « moncompteformation » doit détenir la certification qualité. La marque Qualiopi concerne donc tous les prestataires, y compris les formateurs indépendants, dispensant des actions de formation, de bilans de compétences ; permettant de faire valider les acquis de l’expérience ; de formation par apprentissage.
La mise en œuvre du compte personnel de formation
Le CPF ne peut être mobilisé qu'avec l'accord exprès de son titulaire. Le refus du titulaire du compte de le mobiliser ne constitue pas une faute (C. trav., art. L. 6323-2).
Lorsque le salarié souhaite mobiliser son CPF, le code du travail lui donne la possibilité d'effectuer sa formation soit hors de son temps de travail soit en tout ou partie sur son temps de travail. Lorsque le salarié utilise ses heures de formation hors temps de travail, il n'a dans ce cas aucune autorisation à obtenir de son employeur. Dans le cas inverse, en revanche, il devra demander l'autorisation à son employeur - dans un délai qui varie en fonction de la durée de la formation - lequel disposera d'un délai de réponse de trente jours calendaires. Son absence de réponse dans le délai accordé vaut acceptation de la demande du salarié (C. trav., art. D. 6323-4).
Les heures consacrées à la formation pendant le temps de travail constituent un temps de travail effectif et donnent lieu au maintien par l'employeur de la rémunération du salarié (C. trav., art. L. 6323-18).
La prise en charge des frais de formation
En application des articles L. 6323-20 et D. 6323-5 du code du travail, les frais pédagogiques et les frais liés à la validation des compétences et des connaissances afférents à la formation sont pris en charge par la Caisse des dépôts et des consignations.
Par dérogation, ces frais sont pris en charge par la commission paritaire interprofessionnelle régionale lorsque la formation est suivie dans le cadre d'un projet de transition professionnelle. Le projet de transition professionnelle permet au salarié, par le biais d'une action de formation certifiante, de changer de métier ou de profession (C. trav., art. L. 6323-17-1 s.)
De même, à compter du 1er septembre 2023, le projet de transition professionnelle d'un salarié concerné par les facteurs de risques professionnels, en vue de lui permettre d'accéder à un emploi non exposé aux facteurs de risques professionnels, pourra être financé par une dotation versée par France compétences aux associations Transitions Pro (ATPro). Ce financement est toute fois conditionné à un cofinancement de l'employeur (C. trav., art. L. 6323-17-1, al. 3)
Reste à charge. La loi de finances pour 2023 (L. no 2022-1726 du 30 déc. 2022) a instauré un mécanisme de "reste à charge" pour les salariés utilisant leur compte personnel de formation. Cette participation peut être proportionnelle au coût de la formation, dans la limite d'un plafond, ou fixée à une somme forfaitaire (C. trav., art. L. 6323-7 s.).
Le décret fixant cette participation n'a pas encore été publié. À la suite d'une réunion interministérielle qui s'est tenue le 22 février, il était évoqué une participation forfaitaire de 100 € sur chaque achat de formation avec une entrée en vigueur de la mesure prévue le 1er mai 2024.
Cette participation au financement de la formation ne sera toutefois pas due par les demandeurs d'emploi et les titulaires de compte lorsque la formation fait l'objet d'un abondement par l'employeur (C. trav., art. L. 6323-7).
Les effets de l'action en formation
L'employeur devra à l'issue de la formation suivie par le salarié prendre en compte celle-ci eu égard à la convention collective applicable afin de réviser son coefficient hiérarchique. En dehors de cette prise en compte, il pèse également sur l'employeur une obligation d'adaptation. En effet, comme l'a déjà jugé la Cour de cassation au sujet du DIF, « l'employeur ne peut s'en remettre au salarié pour accomplir son devoir d'adaptation à son poste de travail. Il ne peut attendre que le salarié se manifeste par une demande de CIF ou de DIF » (Soc. 5 juin 2013, no 11-21.255).