Historique
L'idée d'une juridiction propre aux commerçants est née au Moyen Âge, spécialement dans les villes de foire. Toutefois, la création du premier véritable tribunal de commerce a eu lieu à Paris, grâce à un édit pris par le roi Charles IX en 1563. Cet édit a établi dans la capitale une juridiction consulaire composée d'un juge et de plusieurs consuls, marchands élus par leurs pairs. Dans les années qui suivirent, des tribunaux de commerce furent créés dans la plupart des grandes villes marchandes. L'ordonnance de 1673 a repris le contenu de l'édit de 1563 et réglementé les juridictions consulaires dans leur ensemble. Puis le code de commerce de 1807 a consacré les tribunaux de commerce.
Le Rapport du comité des États généraux de la justice, présenté au printemps 2022, préconise la mise en place, à titre expérimental, d'un tribunal des affaires économiques aux compétences élargies dans le ressort de certains tribunaux. Si cette expérimentation se révèle concluante, l'ensemble des tribunaux de commerce pourraient être transformés en de tels tribunaux.
Fonctionnement
Selon l'article L. 721-1 du code de commerce, les tribunaux de commerce sont des juridictions du premier degré (ils statuent en dernier ressort sur les demandes jusqu'à la valeur de 5 000 €), composées de juges élus par leurs pairs (les commerçants eux-mêmes, dont ils tirent leur légitimité) et d'un greffier, qui assure la gestion du tribunal et s'occupe de tenir les différents registres (registre du commerce et des sociétés en particulier) et d'assister les juges à l'audience.
Il y a en principe un tribunal de commerce par département mais, dans ceux où il n'en est pas établi, le tribunal judiciaire, juge de droit commun ayant subsidiairement compétence pour trancher tout contentieux de droit privé, connaît des matières attribuées aux tribunaux de commerce.
Dans les départements d'Alsace et de Moselle, la justice commerciale est rendue par une chambre commerciale du tribunal de grande instance, composée d'un magistrat professionnel assisté d'assesseurs élus. C'est le système de l'échevinage.
Compétence
On distingue la compétence d'attribution et la compétence territoriale.
Compétence d'attribution
Les tribunaux de commerce connaissent :
des contestations relatives aux engagements entre commerçants, entre établissements de crédit ou entre eux (pour les commerçants personnes physiques, encore faut-il que le litige se rattache à leur activité commerciale) ;
de celles relatives aux sociétés commerciales : litige dans lequel une société commerciale, par exemple une société à responsabilité limitée (SARL), est partie, litiges avec ses associés, ses dirigeants ou entre associés, notamment à l'occasion d'une cession de droits sociaux (même lorsqu'elle n'emporte pas cession de contrôle), ainsi que des contestations relatives à la désignation par les salariés actionnaires d'un candidat à l'élection aux fonctions d'administrateur (Com. 18 mars 2020, no 17-24.039) ;
de celles relatives aux actes de commerce entre toutes personnes. Cela concerne l'hypothèse où, exceptionnellement, le litige se rattache à un acte de commerce auquel est partie une personne non commerçante, par exemple parce qu'elle a souscrit une lettre de change, acte de commerce par la forme.
Compétence territoriale
Le tribunal compétent est en principe celui du lieu du domicile du débiteur ou de son principal établissement (C. pr. civ., art. 42 et 43). C'est en principe le siège du défendeur qui détermine cette compétence. Toutefois, en vertu de la jurisprudence dite des gares principales , une société peut être assignée devant le tribunal dans le ressort duquel se trouve l'une de ses succursales et non exclusivement devant le tribunal du lieu de son siège social.
Les commerçants sont toutefois admis à déroger à ces règles de compétence territoriale, qui sont supplétives, par la stipulation d'une clause attributive de juridiction. Suivant l'article 48 du code de procédure civile, « toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu'elle n'ait été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu'elle n'ait été spécifiée de façon très apparente dans l'engagement de la partie à qui elle est opposée ». Une telle clause peut donc être stipulée entre commerçants, et seulement entre commerçants. Elle est soumise à un formalisme strict, qui contraint à la spécifier de manière apparente, afin que le consentement du commerçant à qui l'on oppose soit certain. Cela exclut, par exemple, qu'elle soit rédigée en petits caractères ou qu'elle figure au verso d'un document contractuel. Ces précautions se comprennent, car ces clauses sont dangereuses : elles privent, en effet, une partie de son juge naturel et l'exposent à se présenter devant un tribunal qui sera peut-être éloigné de son domicile.
Représentation obligatoire
Le décret no 2019-1333 du 11 décembre 2019 est venu poser le principe selon lequel les parties sont, sauf disposition contraire, tenues de constituer avocat devant le tribunal de commerce (C. pr. civ., 853). Ainsi la représentation par avocat est donc rendue obligatoire devant le tribunal de commerce au fond comme en référé mais aussi devant le juge des requêtes.
Toutefois, ce principe de représentation obligatoire par avocat connaît plusieurs exceptions énumérées à l'alinéa 3 de l'article 853 du code de procédure civile :
- lorsque la loi ou le règlement en dispose autrement. A titre d'exemple, la représentation par avocat n'est pas obligatoire en cas de requête en matière de gage des stocks et de gage sans dépossession devant le président du tribunal (C. pr. civ., art. 874) ;
- lorsque la demande porte sur un montant inférieur ou égal à 10 000 € ;
- dans le cadre des procédures collectives ;
- pour les litiges relatifs à la tenue du registre du commerce et des sociétés.