Lorsqu’une société établie en France ou dans l’Union européenne se transforme en société par actions simplifiée (SAS) et qu'il est envisagé d’octroyer des avantages particuliers à l’un des associés (par exemple, 50 % des droits de vote alors que l’intéressé ne détient que 20 % du capital), est-il nécessaire de faire intervenir un commissaire chargé d’établir un rapport sur ces avantages ?
Le comité juridique de l’Association nationale des sociétés par actions (Ansa) répond à cette question en distinguant selon que la société qui se transforme est étrangère ou française.
Transformation transfrontalière
Il y a transformation transfrontalière lorsqu’une société immatriculée dans un Etat membre de l’UE autre que la France se transforme, sans dissolution, en une société par actions (ou une SARL) immatriculée en France, et y transfère son siège social, tout en conservant sa personnalité juridique (C. com. art. L 236-50, al. 2).
L’Ansa relève que c’est exclusivement le droit de cet Etat membre qui régit les conditions dans lesquelles la décision de procéder à cette opération est prise, notamment l’approbation par les associés des nouveaux statuts (Dir. UE 2017/1132 du 14-6-2017 art. 86 quater) ; or, c’est dans le cadre de cette approbation qu’un rapport sur les avantage particuliers est nécessaire.
Pour l’Ansa, il en résulte que, si le droit de l’Etat membre d’origine n’impose pas qu’un rapport sur les avantages particuliers soit établi, il n’y a pas lieu de l’imposer par la suite au moment de l’immatriculation de la société en France.
Au demeurant, ajoute l’Ansa, la directive européenne 2017/1132 traite de la transformation transfrontalière comme d’une constitution de société, puisqu’elle prévoit que le projet de transformation transfrontalière inclut l’« acte constitutif » de la société dans l’Etat membre de destination (Dir. UE 2017/1132 art. 86 quinquies) et que l’autorité désignée par cet Etat membre veille à ce que la société transformée respecte les dispositions de son droit sur la « constitution » (art. 86 sexties). Or, en droit français, l’établissement d’un rapport sur les avantages particuliers n’est pas requis pour la constitution d’une SAS (cf. C. com. art. L 227-1 excluant l’art. L 225-14).
Certes, relève l'Ansa, l'article L 236-10, III du Code de commerce, qui impose l'établissement d'un rapport sur les avantages particuliers en cas de fusion, semble s'appliquer aux transformations transfrontalières par le jeu des renvois (C. com. art. L 236-10, sur renvois successifs des art. L 236-31 et L 236-50). Mais les règles des fusions transfrontalières ne sont applicables aux transformations transfrontalières que pour autant qu'elles ne sont pas contraires aux règles propres à ces dernières (C. com. art. L 236-50).
Transformation d'une société française en SAS
Pour l’Ansa, la situation est différente en cas de transformation de droit interne, c’est-à-dire lorsque la société qui se transforme en SAS est une société française d’une autre forme. Dans ce cas, la transformation n’est pas assimilée à une constitution et un rapport sur les avantages particuliers doit être établi par le commissaire à la transformation ou un commissaire aux avantages particuliers, en application des articles L 224-3 et L 225-147 du Code de commerce.
Le premier de ces textes prévoit en effet que, en cas de transformation en société par actions d’une société non pourvue d’un commissaire aux comptes, un ou plusieurs commissaires à la transformation doivent être désignés pour apprécier la valeur des biens composant l’actif social et les avantages particuliers, sauf accord unanime des associés. Le second texte prévoit qu’un ou plusieurs commissaires doivent être désignés en cas de stipulation d’avantages particuliers dans une société anonyme et cette disposition n’est écartée pour les SAS que lors de leur constitution (C. com. art. L 227-1, al. 3).
L’Ansa suggère une évolution législative en vue de supprimer l’exigence d’un rapport sur les avantages particuliers en cas de transformation d’une société française en SAS. Elle fait valoir que l’unanimité qui est requise dans ce cas (C. com. art. L 227-3) est une protection suffisante pour les actionnaires et associés.
Documents et liens associés :
Communication Ansa, comité juridique n° 25-046 du 2-7-2025




