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5 décembre 2023
Le salarié licencié par une société qui, dans une transaction, renonce à agir au titre de la rupture du contrat de travail ne peut plus invoquer ensuite la qualité d’associé de fait de son ancien employeur ; le gérant de la société, tiers à la transaction, peut lui opposer cette renonciation.
Un tiers à une transaction peut invoquer la renonciation qu'elle contient
©Gettyimages

Une société, dont l’associé unique est également gérant, conclut une transaction avec l'un de ses salariés à la suite du licenciement de ce dernier. La transaction comporte une clause de non-recours, par laquelle le salarié renonce expressément, sans réserve et en toute connaissance de cause, à toute action relative à l’exécution ou à la rupture du contrat de travail à l’encontre de la société et de son gérant. Quelques temps plus tard, le salarié prétend qu'il a la qualité d’associé de fait de la société et il poursuit en partage de l’actif net la société, ainsi que son gérant qui lui oppose la clause précitée. Le salarié soutient que celui-ci ne peut pas se prévaloir de cette renonciation, n’étant pas partie à la transaction.

La demande du salarié licencié est rejetée (Cass. 1e civ. 18-10-2023 n° 22-21.358 F-B) : si l’effet relatif des contrats interdit aux tiers de se prévaloir de l’autorité d’une transaction à laquelle ils ne sont pas intervenus, ces mêmes tiers peuvent néanmoins invoquer la renonciation à un droit que renferme cette transaction.

En l’espèce, l’ensemble des conséquences pécuniaires de la rupture du contrat de travail avaient été définitivement réglées par la transaction et la clause de non-recours qu’elle contenait avait pour effet d’interdire au salarié de remettre en cause la chose transigée, au titre de la même activité exercée au sein de la société, en contestant l’existence d’un contrat de travail requalifié en société créée de fait. Le salarié ayant renoncé à son droit d‘invoquer la qualité d’associé de fait, il était irrecevable à agir contre la société, mais aussi contre l’associé unique, qui était fondé à invoquer la transaction.

A noter :

1° La transaction faite par l'un des intéressés ne lie point les autres intéressés et ne peut pas être opposée par eux (C. civ. art. 2051). 

Ces dispositions ne s'appliquent pas lorsque cet « intéressé » renonce expressément à un droit dans l'acte. Les autres intéressés doivent pouvoir s'en prévaloir, la transaction étant pour eux un fait juridique. Ainsi, la Cour de cassation a déjà admis qu'un tiers peut se prévaloir, à son profit, de la renonciation à un droit contenue dans une transaction à laquelle il n'est pas intervenu (Cass. 1e civ. 25-2-2003 n° 01-00.890 FS-P : RJDA 11/03 n° 1143 ; Cass. soc. 14-5-2008 n° 07-40.946 FS-PB : RJDA 12/08 n° 1331). Par exemple, elle a considéré qu’un débiteur pouvait invoquer la transaction conclue par son créancier avec une autre partie dans laquelle le créancier renonce à tout recours contre lui (Cass. 1e civ. 25-2-2003 n° 01-00.890 précité). La décision commentée s’inscrit dans la ligne de cette jurisprudence. En l’espèce, le gérant et associé unique de la société était bien un tiers à la transaction puisque celle-ci avait été conclue par la société.

2° La transaction fait obstacle à l'introduction ou à la poursuite entre les parties d'une action en justice ayant le même objet (C. civ. art. 2052). Les juges ont ici considéré que l’action du salarié revendiquant la qualité d'associé de fait avait un objet identique à celui de la transaction réglant les effets de la rupture du contrat de travail. La renonciation du salarié a pour effet de lui interdire de remettre en cause définitivement cette qualité de salarié au sein de la société. Cette solution illustre l’étendue de l'effet de la renonciation dans une transaction.

Documents et liens associés : 

Cass. 1e civ. 18-10-2023 n° 22-21.358 F-B

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