Une promesse synallagmatique de vente portant sur des parcelles et bâtiments agricoles est conclue sous la condition suspensive d'obtention d'un prêt bancaire par l'acheteur. La promesse prévoit deux clauses selon lesquelles :
- si la condition suspensive se réalise et si l'acheteur refuse de réitérer la vente, le vendeur peut faire constater la vente judiciairement dans le délai d’un mois à compter de la date prévue pour la réitération de l'acte et invoquer, le cas échéant, le bénéfice de la clause pénale prévue dans la promesse ;
- le vendeur peut toujours renoncer à la réitération de la vente et se trouver ainsi entièrement libre de tout engagement vis-à-vis de l'acheteur, après l'avoir mis en demeure de réitérer, ce dernier devant alors lui verser le montant de la clause pénale sur lequel s'imputera le dépôt de garantie immédiatement acquis au vendeur.
La vente n’ayant pas été réitérée par acte authentique, le vendeur poursuit l’acheteur en paiement de la clause pénale.
Une cour d’appel déclare cette demande irrecevable pour ne pas avoir été formée dans le délai d’un mois précité, au motif que ce délai visait toutes les actions en justice découlant de la défaillance de l'acheteur sans distinction.
La Cour de cassation censure l'arrêt de la cour d’appel, jugeant que cette dernière avait dénaturé les termes clairs et précis de la seconde clause, aucun délai pour agir n’étant visé dans ce cas par la promesse. En l’espèce, le vendeur, qui avait renoncé à agir en réitération forcée de la vente, pouvait agir en paiement de la clause pénale sans être contraint par le délai prévu dans la première clause.
A noter :
Dans une promesse de vente, une clause pénale peut être stipulée pour sanctionner le défaut de réitération par acte authentique (Cass. 3e civ. 24-6-2021 n° 20-17.529 FS-D : RJDA 10/21 n° 637 refusant l’application d’une telle clause à défaut de mise en demeure préalable de l’acheteur de réitérer la vente).
En l’espèce, une option était offerte au vendeur en cas de non-réitération du fait de l’acheteur : soit demander en justice la réalisation forcée de la vente, soit renoncer à celle-ci et seulement demander le paiement par l’acheteur de la clause pénale prévue dans la promesse. Le délai d’un mois n’étant prévu par les parties que pour l'action en réitération forcée de la vente et non pour celle en paiement de la clause pénale, la Cour de cassation a considéré que les juges ne pouvaient pas soumettre cette dernière à ce délai. On le sait, le juge ne peut pas interpréter une clause claire et précise, sous peine de dénaturer la volonté des parties (C. civ. art. 1192).
Documents et liens associés :
Cass. 3e civ. 15-2-2024 n° 22-16.554 F-D