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6 décembre 2024
Le dirigeant d'une société qui signe le billet à ordre émis par celle-ci dans la partie concernant le souscripteur et dans la partie réservée à l'avaliste, la signature étant à chaque fois apposée sur le cachet de la société, n'est pas personnellement engagé comme avaliste.
Etendue de l'engagement du dirigeant qui avalise le billet à ordre souscrit par la société
©Getty Images

L'aval résulte de la seule signature du donneur d'aval apposée au recto du billet à ordre, sauf quand il s'agit de la signature du souscripteur de ce billet (cf. C. com. art. L 511-21, al. 5 et L 512-4). Ne s’engage pas personnellement le dirigeant d’une société qui appose deux fois sa signature sur un billet à ordre, une fois sur le cachet de la société souscriptrice du billet à ordre dans la partie « souscripteur » et une fois, également sur le cachet de cette société, dans la partie concernant l’aval, juge la Cour de cassation.

Par suite, doit être rejetée l’action en paiement de la banque bénéficiaire du billet à ordre contre le dirigeant, poursuivi en qualité d’avaliste.

A noter :

1° Il est fréquent qu’un dirigeant de société avalise un effet de commerce souscrit par cette société. Dans ce cas, le dirigeant signe deux fois : une fois en qualité de représentant de la société souscriptrice et une fois en qualité d’avaliste. Il faut alors concilier les deux règles suivantes :

  • la règle selon laquelle la même personne, en la même qualité, ne peut pas être à la fois souscripteur d’un billet à ordre (ou d’une lettre de change) et donneur d’aval (Cass. com. 23-3-1999 n° 654 D : RJDA 6/99 n° 718) ;
  • le principe du formalisme du droit cambiaire, en vertu duquel un effet de commerce doit se suffire à lui-même et les obligations qu’il crée résulter des mentions qui y sont portées.

Cette situation a donné lieu à une abondante jurisprudence. La Cour de cassation a ainsi admis qu’en présence d’une mention expresse de sa qualité de dirigeant d’entreprise, le signataire d’un aval s’engage au nom de la société souscriptrice, et non à titre personnel (Cass. com. 17-2-2021 n° 19-15.246 F-D : RJDA 7/21 n° 509, où le dirigeant avait signé après sa mention « bon pour aval, le PDG »). Au contraire, le dirigeant qui signe un billet à ordre en tant qu’avaliste sans aucune précision quant à son engagement comme mandataire est engagé personnellement (Cass. com. 15-2-2023 n° 21-22.990 F-D : RJDA 5/23 n° 273, où le dirigeant avait signé après une mention indiquant simplement « bon pour aval »).

Qu'en est-il en cas de simple apposition du cachet de la société à l’emplacement de l’aval, sans aucune précision sur la qualité du signataire ? L’arrêt commenté retient qu'en pareille situation l’avaliste ne s’engage pas à titre personnel. La Cour de cassation fait ainsi prévaloir le formalisme du droit cambiaire, dans la lignée d’une décision récente en matière de billet à ordre avalisé portant une double date (Cass. com. 23-5-2024 n° 22-12.736 FS-B : RJDA 8-9/24 n° 485). Est donc remise en cause une décision isolée qui avait jugé, dans un cas où le billet à ordre comportait la double signature du dirigeant de la société qui l’avait émis ainsi que l’apposition du tampon de la société sous chaque signature, que le dirigeant avait souscrit le billet en qualité de représentant légal de la société mais l’avait avalisé en son nom personnel (Cass. com. 22-3-2016 n° 14-13.244 F-D).

La Haute Juridiction fait ainsi preuve de fermeté concernant l’attention que les banques doivent porter aux mentions contenues dans les billets à ordre qu’elles veulent faire avaliser par les dirigeants des sociétés débitrices. Elles doivent exiger que ces mentions permettent sans ambiguïté de s’assurer que l’avaliste avait conscience qu’il garantissait le paiement en son nom personnel, et non en sa qualité de mandataire de la société souscriptrice.

2° La Cour de cassation applique strictement le formalisme cambiaire car l'avaliste d'un effet de commerce est peu protégé. Il ne peut pas demander l’annulation de l’aval ou rechercher la responsabilité de la banque pour manquement au devoir précontractuel d’information prévu par l’article 1112-1 du Code civil (Cass. com. 2-5-2024 n° 22-19.408 F-D : RJDA 7/24 n° 415). Il ne peut pas non plus invoquer un manquement de la banque à une obligation d’information concernant les conséquences de l’aval (Cass. com. 20-4-2017 n° 15-14.812 F-PB : RJDA 7/17 n° 494), ni se prévaloir d’un manquement à l'obligation de mise en garde ou de la disproportion manifeste de son engagement à ses biens et revenus prévue en matière de cautionnement (Cass. com. 30-10-2012 n° 11-23.519 F-PB : RJDA 2/13 n° 156).

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