Les travailleurs handicapés bénéficient de mesures spécifiques de protection : une obligation d'emploi de travailleurs handicapés pèse sur les employeurs et les handicapés bénéficient de droits particuliers au sein des entreprises. Des mesures plus générales, pilotées par des institutions à caractère public, viennent également soutenir l'emploi des travailleurs handicapés.
Les dispositions relatives aux travailleurs handicapés ont été impactées par la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel (L. no 2018-771 du 5 sept. 2018, JO 6 sept.). La plupart des mesures issues de la loi précitée sont entrées en vigueur le 1er janvier 2020.
Par ailleurs, la loi Plein emploi du 18 décembre 2023 comporte un volet pour favoriser l'emploi des personnes handicapées. Ainsi, le texte étend les droits liés à la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé aux bénéficiaires de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés, assure la pérennisation des expérimentations du CDD Tremplin et des entreprises de travail temporaire adaptées et met en place de la portabilité des équipements liés à l’aménagement du poste de travail lorsque les travailleurs handicapés changent d’employeur (loi no 2023-1196 du 18 décembre 2023, JO 19 déc.).
Obligation d'emploi des travailleurs handicapés (OETH)
Champ d'application
L'obligation d'emploi pèse sur tout employeur, occupant au moins vingt salariés, y compris les établissements publics industriels et commerciaux. Dans les entreprises à établissements multiples, l'OETH s'applique au niveau de l'entreprise (C. trav., art. L. 5212-3).
Depuis le 1er janvier 2020, tous les employeurs doivent déclarer via la déclaration sociale nominative (DSN) l'effectif total des bénéficiaires de l'obligation d'emploi employés. L'effectif salarié et le franchissement de seuil sont déterminés selon les modalités prévues à l'article L. 130-1 du code de la sécurité sociale (C. trav., art. L. 5212-1). Toutefois, le code du travail précise que dans les entreprises de travail temporaire, les entreprises de portage salarial et les groupements d'employeurs, l'effectif salarié ne prend pas en compte les salariés mis à disposition ou portés.
Une liste précise et limitative de bénéficiaires visées par l'obligation d'emploi est établie par la loi (C. trav., art. L. 5212-13).
Contenu
L'employeur est tenu d'employer, dans l'entreprise (et non plus l'établissement), des travailleurs handicapés dans la proportion de 6 % de l'effectif total de ses salariés et ce taux est révisé tous les cinq ans (C. trav., art. L. 5212-2 s.).
Pour calculer le nombre de bénéficiaires de l'OETH à employer, on multiplie l'effectif d'assujettissement de l'entreprise par 6 % que l'on arrondit à l'entier inférieur.
Pour se mettre en conformité avec l'obligation d'emploi, l'employeur dispose au moment de la création de son entreprise d'un délai de cinq ans (C. trav., art. L. 5212-4). Depuis le 1er janvier 2020, il doit également déclarer sa situation au regard de l'obligation d'emploi à laquelle il est soumis au moyen de la DSN (C. trav., art. L. 5212-5 ; CSS, art. L. 133-5-3).
Mise en œuvre
Les bénéficiaires de l'obligation d'emploi sont expréssement visés par le code du travail (C. trav., art. L. 5212-13). L'employeur peut mettre en œuvre l'obligation d'emploi des personnes handicapées (OETH) par :
- l'emploi de travailleurs handicapés (C. trav., art. L. 5212-6 s.). Outre l'emploi direct - et ce, quelles que soient la durée et la nature de leur contrat - des travailleurs reconnus handicapés, l'employeur peut accueillir des personnes handicapées en stage ou pour des périodes de mise en situation en milieu professionnel, ou encore employer des travailleurs handicapés mis à disposition par les entreprises de travail temporaire et par les groupements d'employeurs. (C. trav., art. L. 5212-7) ;
- l'application d'un accord collectif agréé prévoyant la mise en œuvre d'un programme annuel ou pluriannuel en faveur des travailleurs handicapés. Depuis le 1er janv. 2020, ce programme pluriannuel ne peut être mis en place que pour une durée maximale de trois ans, renouvelable une fois (C. trav., art. L. 5212-8). Pour que l'accord soit agréé, le programme pluriannuel doit comporter un plan d'embauche et un plan de maintien dans l'emploi (C. trav., art. R. 5212-12) ;
- le versement d'une contribution annuelle - recouvrée par l'urssaf - (v. son nouveau mode de calcul et la période transitoire aménagée jusqu'en 2024 ci-dessous) pour chacun des bénéficiaires de l'obligation qu'il aurait dû employer (C. trav., art. L. 5212-9 s.). À noter que peuvent être déduites du montant de cette contribution annuelle les dépenses supportées directement par l'entreprise, afférentes à des contrats de fourniture, de sous-traitance ou de prestations de services qu'elle passe avec des entreprises adaptées, des établissements ou services d'accompagnement par le travail, des travailleurs indépendants handicapés ou encore des entreprises de portage salarial (C. trav., art. L. 5212-10-1).
Contribution Agefiph
Calcul. La contribution Agefiph est égale au nombre de travailleurs handicapés manquants multiplié par :
- 400 x le Smic horaire brut pour les entreprises de 20 à 249 salariés ;
- 500 x le Smic horaire brut pour les entreprises de 250 à 749 salariés ;
- 600 x le Smic horaire brut pour les entreprises de plus de 750 salariés.
Période transitoire (2020-2024). Pour atténuer l'impact du calcul de l'effectif au niveau de l'entreprise (et non plus de l'établissement), une période transitoire est mise en place jusqu'en 2024 par le Décr. no 2019-523 du 27 mai 2019, art. 2.
À titre transitoire, pour les années 2020 à 2024, le montant de la contribution annuelle due au titre de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés fait l'objet d'une modulation selon les modalités suivantes :
En 2020, la hausse de la contribution par rapport à l'année précédente est réduite de :
- 30 % jusqu'à 10 000 € ;
- 50 % au-delà de 10 000 € et jusqu'à 100 000 € ;
- 70 % au-delà de 100 000 €.
De 2021 à 2024, la hausse de la contribution par rapport à l'année précédente est réduite de :
- 80 % en 2021 ;
- 75 % en 2022 ;
- 66 % en 2023 ;
- 50 % en 2024 .
Les trois modalités de mise en œuvre de l'OETH peuvent être associées.
V. www.agefiph.fr//employeur/simulateur_doeth
Sanction
L'employeur déclare sa situation au regard de l'obligation d'emploi à laquelle il est soumis (C. trav., art. L. 5212-2) au moyen de la déclaration sociale nominative (CSS, art. L. 133-5-3). À défaut de toute déclaration, l'employeur est considéré comme ne satisfaisant pas à l'obligation d'emploi (C. trav., art. L. 5212-5).
Aux fins de sécurisation, une procédure de rescrit « handicap » a été mise en place.
Condition d'emploi du travailleur handicapé
Reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH)
Il revient, de manière exclusive, à la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées de reconnaître la qualité de travailleur handicapé (C. trav., art. L. 5213-2) telle que définie à l'article L. 5213-1 du code du travail, cette reconnaissance étant seule à même d'ouvrir l'accès à certains droits.
Depuis la loi du 21 février 2022 (loi 3DS) et la loi Plein emploi du 18 décembre 2023, l'attribution à une personne âgée de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé ou de la prestation de compensation du handicap ainsi que le bénéfice d'un projet personnalisé de scolarisation valent reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (C. trav., art. L. 5213-2).
Emploi de travailleurs handicapés en milieu ordinaire
Le milieu ordinaire de travail est différent du milieu protégé que sont les entreprises adaptées dont font partie, par exemple, les établissements et services d'aide par le travail (v. ci-dessous).
En vue de favoriser l'insertion ou le maintien dans l'emploi du travailleur handicapé en milieu ordinaire, un certain nombre de mesures peut être mis en place.
Dispositif d'emploi accompagné. Les travailleurs handicapés et les bénéficiaires de l'OETH peuvent bénéficier d'un dispositif d'emploi accompagné. Ce dispositif peut consister en :
- une aide à la réalisation de votre projet professionnel ;
- une assistance dans la recherche d'emploi ;
- un accompagnement dans l'emploi pour sécuriser le parcours professionnel.
Le dispositif d'emploi accompagné nécessite au préalable la signature d'une convention individuelle d'accompagnement qui précise la nature de l'intervention. Cette convention est conclue entre la personne morale gestionnaire du dispositif d'emploi accompagné, la personne accompagnée ou son représentant légal et son employeur (C. trav., art. L. 5213-2-1).
À compter du 1er janvier 2025, ce dispositif sera piloté par l'État sous la forme de plateformes départementales de services intégrées (v. C. trav., art. L. 5213-2-1 nouv.).
Adaptation des locaux ou du poste. Le travailleur handicapé bénéficie de mesures destinées à lui permettre d'accéder ou de conserver un emploi correspondant à sa qualification, de l'exercer ou d'y progresser ou pour qu'une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée (C. trav., art. L. 5213-6).A ce titre, l'employeur ou le travailleur peut solliciter des aides financières auprès de l'agefiph (v. www.agefiph.fr).
En cas de changement d'employeur, le travailleur handicapé peut conserver les équipements nécessaires à l'adaptation de son poste (C. trav., art. L. 5213-2-2).
Les employeurs peuvent bénéficier d'aides financières afin de faciliter la mise ou la remise au travail en milieu ordinaire de production des personnes handicapées, d'assurer leur niveau de rémunération ou de compenser les charges supplémentaires d'encadrement (C. trav., art. L. 5213-10 s.).
Référent handicap. Dans toute entreprise employant au moins 250 salariés, un référent chargé d'orienter, d'informer et d'accompagner les personnes en situation de handicap doit être désigné. Si le travailleur le demande, ce dernier peut participer au rendez-vous de liaison prévu à l'article L. 1226-1-3 du code du travail; Ce référent est tenu à une obligation de discrétion à l'égard des informations à caractère personnel qu'il est amené à connaître ((C. trav., art. L. 5213-6-1).
Droits et garanties du travailleur handicapé. Le salaire des bénéficiaires de l'obligation d'emploi ne peut être inférieur à celui qui résulte de l'application des dispositions légales ou des stipulations conventionnelles (C. trav., art. L. 5213-7).
Si le travailleur handicapé est licencié, la durée légale du préavis est doublée, sans pouvoir excéder trois mois (C. trav., art. L. 5213-9).
Entreprises adaptées
Les entreprises adaptées promeuvent un environnement économique inclusif favorable aux femmes et aux hommes en situation de handicap. Ces entreprises, constituées par des collectivités territoriales ou des organismes publics ou privés, permettent à des travailleurs handicapés d'exercer une activité professionnelle salariée dans des conditions adaptées à leurs possibilités et favorisant la réalisation de leur projet professionnel, la valorisation de leurs compétences et leur mobilité preofessionnelle.
Pour obtenir ce titre, les entreprises doivent répondre à un certain nombre de critères et être agréées par l'Etat. La conclusion de l'Etat avec elles d'un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens vaut agrément (C. trav., art. L. 5213-13 s., R. 5213-62 s.).
Depuis le 1er janvier 2024, les CDD Tremplin et les entreprises adaptées de travail temporaire (EATT) ont été pérennisés et sont inscrits dans le code du travail.
CDD Tremplin. Le CDD Tremplin est un contrat conclu entre une entreprise adaptée et un travailleur handicapé offrant un accompagnement individualisé au travailleur, qui pourra acquérir une expérience professionnelle et bénéficier d’une formation. Il a également pour but de faciliter sa transition professionnelle vers d'autres entreprises (C. trav., art. L. 5213-13-2, art. R. 5213-79 s.).
Entreprises adaptées de travail temporaire (EATT).Les entreprises adaptées de travail temporaire peuvent conclure des contrats de mission pour faciliter l'accès à l'emploi durable des travailleurs handicapés, dont la durée totale peut être portée à 24 mois, renouvellement compris. La durée hebdomadaire de travail peut être inférieure à la durée minimale légale, lorsque la situation du salarié le justifie. Elles peuvent également conclure des contrats de travail à durée indéterminée intérimaires. Ces entreprises doivent mettre en œuvre pour ces salariés un accompagnement renforcé destiné à favoriser la réalisation de leur projet professionnel, la valorisation des compétences acquises durant leur formation et leur transition professionnelle vers d'autres entreprises (C. trav., art. L. 5313-13-3).
Politiques en faveur de l'emploi des travailleurs handicapés
Elles ont pour objectif d'assurer le reclassement des travailleurs handicapés. Elles sont notamment définies et pilotées par l'État. Un fonds de développement pour l'insertion professionnelle des handicapés a pour objet d'accroître les moyens consacrés à l'insertion des handicapés en milieu ordinaire, tandis que des organismes de placement spécialisés, chargés de la préparation, de l'accompagnement et du suivi durable dans l'emploi des personnes handicapées, participent au dispositif d'insertion professionnelle et d'accompagnement prévu pour les travailleurs handicapés (C. trav., art. L. 5211-1 s. et L. 5214-1 A s.).