Un barème obligatoire applicable à toutes les entreprises
Pour les licenciements notifiés depuis le 24 septembre 2017 et dépourvus de cause réelle et sérieuse, le juge doit, pour fixer le montant de l’indemnité, se référer au barème fixé à l’article L. 1235-3 du code du travail, qui prévoit des planchers et des plafonds d’indemnisation. Sa marge de manœuvre est donc réduite.
Remarque
Plusieurs conseils de prud’hommes et cours d’appel ont refusé d’appliquer ce barème, estimant qu’il ne permettait pas de réparer de manière adéquate le préjudice subi par le salarié. Pour la Cour de cassation, il est conforme à la Convention no 158 de l’OIT. Elle écarte toute possibilité pour les juges de procéder à un contrôle in concerto en dehors des montants minimaux et maximaux déterminés par ledit barème ( Cass. avis, 17 juill. 2019, no 19-70.010 ; Cass. avis, 17 juill. 2019, no 19-70.011 ; Cass. soc., 11 mai 2022, no 21-14.490, no 654 FP-B + R ; Cass. soc., 11 mai 2022, no 21-15.247, no 655 FP-B + R ; Cass. soc., 1er févr. 2023, no 21-21.011 ; Cass. soc., 6 sept. 2023, no 22-10.973 ; Cass. soc., 20 sept. 2023, no 22-12.751 ; Cass. soc., 11 oct. 2023, no 21-24.857 ; Cass. soc., 6 déc. 2023, no 21-24.075 ).
La fin des « 6 mois de salaire minimum »
Les salariés ayant au moins 2 ans d’ancienneté et travaillant dans une entreprise d’au moins 11 salariés ne peuvent plus, en cas de licenciement abusif, tabler sur un minimum de 6 mois de salaire. Ce minimum est réduit à 3 mois, quelle que soit leur ancienneté (ce plancher s’applique à tous les salariés ayant au moins 2 ans d’ancienneté). Les salariés peuvent se prévaloir du barème pour obtenir le minimum prévu et contester une décision de justice qui leur accorderait une indemnité moindre ( Cass. soc., 3 avr. 2024, no 23-13.452 ).
Remarque
Le montant de la rémunération mensuelle prise en compte pour calculer l’indemnité des traders et de leurs responsables directs est limité à un PASS depuis le 15 juin 2024 (C. mon. fin., art. L. 511-84-1 ).
Montants minimaux et maximaux de l’indemnité pour licenciement abusif
Ancienneté du salarié (en années complètes) |
Indemnité minimale (en mois de salaire brut) |
Indemnité maximale (en mois de salaire brut) |
|
---|---|---|---|
Entreprises de 11 salariés et plus |
Entreprises de moins de 11 salariés |
||
0 |
Sans objet |
Sans objet |
1 |
1 |
1 |
0,5 |
2 |
2 |
3 |
0,5 |
3, 5 |
3 |
3 |
1 |
4 |
4 |
3 |
1 |
5 |
5 |
3 |
1,5 |
6 |
6 |
3 |
1,5 |
7 |
7 |
3 |
2 |
8 |
8 |
3 |
2 |
8 |
9 |
3 |
2,5 |
9 |
10 |
3 |
2,5 |
10 |
11 |
3 |
3 |
10,5 |
12 |
3 |
3 |
11 |
13 |
3 |
3 |
11,5 |
14 |
3 |
3 |
12 |
15 |
3 |
3 |
13 |
16 |
3 |
3 |
13,5 |
17 |
3 |
3 |
14 |
18 |
3 |
3 |
14,5 |
19 |
3 |
3 |
15 |
20 |
3 |
3 |
15,5 |
21 |
3 |
3 |
16 |
22 |
3 |
3 |
16,5 |
23 |
3 |
3 |
17 |
24 |
3 |
3 |
17,5 |
25 |
3 |
3 |
18 |
26 |
3 |
3 |
18,5 |
27 |
3 |
3 |
19 |
28 |
3 |
3 |
19,5 |
29 |
3 |
3 |
20 |
30 et au-delà |
3 |
3 |
20 |
Le barème obligatoire a été adapté à la situation des très petites entreprises (TPE). Ainsi, les planchers d’indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse d’un salarié travaillant dans une entreprise de moins de 11 salariés et bénéficiant d’une ancienneté comprise entre 1 et 10 ans sont moins élevés.
Les salariés ayant moins d’un an d’ancienneté peuvent aussi prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, dont le montant est déterminé par le juge dans la limite d’un mois de salaire ( Cass. soc., 12 juin 2024, no 23-11.825, no 575 F-B ).
Cumul de l’indemnité pour licenciement abusif avec les indemnités de rupture
L’indemnité se cumule (en principe) avec les indemnités de rupture
L’indemnité attribuée dans le cadre du barème s’ajoute aux indemnités légales, conventionnelles ou contractuelles par ailleurs dues au salarié (indemnité de licenciement, de préavis, de non-concurrence…). Le juge peut en minorer le montant en tenant compte des indemnités de licenciement versées à l’occasion de la rupture, hormis l’indemnité légale : il peut donc déduire de la somme allouée en application du barème tout ou partie de l’indemnité de licenciement supra-légale éventuellement versée au salarié (C. trav., art. L. 1235-3 ).
Elle se cumule avec certaines indemnités spécifiques au licenciement économique
L’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse se cumule avec les trois indemnités suivantes, mais dans la limite des montants maximaux prévus par le barème :
- l’indemnité prévue en cas de non-respect par l’employeur des procédures de consultation des représentants du personnel ou d’information de l’autorité administrative (calculée en fonction du préjudice subi) ;
- l’indemnité prévue en cas de non-respect de la priorité de réembauche ;
Remarque
Cette indemnité ne peut être inférieure à un mois de salaire.
- l’indemnité prévue en cas d’irrégularité de la procédure de licenciement économique dans une entreprise où le CSE n’a pas été mis en place alors que l’entreprise est assujettie à cette obligation et qu’aucun PV de carence n’a été établi. Elle représente au moins un mois de salaire.
Application du barème à la résiliation judiciaire et à la prise d’acte
En cas de résiliation judiciaire du contrat aux torts de l’employeur, ou en cas de prise d’acte justifiée, le salarié bénéficie, entre autres, de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Cette indemnité doit alors être déterminée en fonction du barème obligatoire (C. trav., art. L. 1235-3-2 ), sauf si ces ruptures produisent les effets d’un licenciement nul. Dans ce cas, le juge doit accorder au salarié une indemnité au moins égale aux salaires des 6 derniers mois.