Fiche thématique
6 min de lecture
8 septembre 2025
En théorie, la rupture de la période d’essai n’obéit à aucun formalisme particulier, employeur et salarié pouvant y mettre fin sans avoir à se justifier. Mais si ce formalisme paraît simple, la prudence reste de mise  !

Sommaire

Respecter un délai de prévenance

L’employeur souhaitant rompre la période d’essai d’un salarié en CDI doit respecter un préavis et le prévenir :

  • 24 heures avant la prise d’effet de la rupture s’il a moins de 8 jours de présence ;
  • 48 heures s’il a entre 8 jours et 1 mois de présence ;
  • 2 semaines s’il a entre 1 et 3 mois de présence ;
  • 1 mois s’il a plus de 3 mois de présence.

Pour les CDD dont la période d’essai est d’au moins une semaine, il faut respecter un délai de prévenance de 24 heures en deçà de 8 jours de présence et de 48 heures au-delà.

Remarque

En effet, la durée maximale de la période d’essai pour un CDD étant d’un mois (CDD de plus de 6 mois), les délais de prévenance de 2 semaines et 1 mois ne s’appliquent pas.

Le délai de prévenance ne peut pas prolonger la période d’essai. Si l’employeur ne le respecte pas, le salarié a droit (sauf faute grave) à une indemnité compensatrice au moins égale aux salaires et avantages qu’il aurait perçus s’il avait travaillé jusqu’à la fin du délai de prévenance, indemnité de congés payés comprise. Si le délai de prévenance excède la période d’essai restant à courir, le contrat devient définitif dès la fin de l’essai et la seule solution est de licencier le salarié ( Cass. soc., 5 nov. 2014, no 13-18.114 ). Mais l’employeur peut aussi le dispenser du délai de prévenance restant à courir et lui payer les jours correspondants ( Cass. soc., 16 sept. 2015, no 14-16.713 ).

Remarque

Lorsque des dispositions conventionnelles prévoient des délais de prévenance différents, on applique les dispositions les plus favorables au salarié, donc le délai le plus long.

Si la rupture est à l’initiative du salarié, le délai est de :

  • 24 heures s’il est présent dans l’entreprise depuis moins de 8 jours ;
  • 48 heures dans les autres cas.

Remarque

Si des dispositions conventionnelles prévoient des délais de prévenance différents, on applique les dispositions les plus favorables au salarié, donc le délai le plus court s’il est à l’origine de la rupture.

Si le salarié rompt la période d’essai en imputant la cause à l’employeur (non-paiement du salaire, par exemple), il n’y a pas de prise d’acte mais rupture abusive de la période d’essai par l’employeur, qui n’a pas respecté ses obligations ( Cass. soc., 7 févr. 2012, no 10-27.525 ).

Procéder à quelques vérifications préalables

Vérifier que le salarié se trouve toujours en période d’essai

Avant de rompre une période d’essai, il faut s’assurer qu’elle n’est pas déjà terminée, le risque étant de la rompre alors qu’il fallait appliquer les règles du licenciement (risque de requalification en licenciement abusif).

Remarque

La période d’essai s’exprime en jours calendaires : tous les jours de la semaine comptent. Il est utile de créer un tableau de suivi indiquant les dates de fin de période d’essai (+ durée de la prolongation ou du renouvellement) des nouveaux embauchés et de les communiquer aux managers concernés.

S’assurer que le salarié ne bénéficie pas d’une protection particulière

Certains salariés ont un statut protecteur, y compris pendant la période d’essai :

  • salariés dont le contrat est suspendu pour maladie ou accident professionnels : dans ce cas, l’essai ne peut être rompu que pour des raisons disciplinaires ou pour faute grave ;

Remarque

Il est possible de rompre une période d’essai alors que le salarié est en arrêt pour maladie non professionnelle, à condition que cette rupture ne soit pas justifiée par la maladie, même si cela désorganise l’entreprise.

  • femmes enceintes : les règles protectrices contre le licenciement ne s’appliquent pas durant la période d’essai mais il n’est toutefois pas possible de la rompre en raison de l’état de grossesse ;

Remarque

Si le salarié parvient à prouver que la période d’essai a été rompue pour l’une de ces raisons, la rupture est considérée comme nulle et justifie l’attribution de dommages et intérêts.

  • salariés protégés : elle ne peut être rompue sans autorisation préalable de l’inspecteur du travail, que l’employeur doit saisir avant le terme de la période d’essai. Celui-ci est prorogé dans l’attente de la décision de l’inspecteur du travail, ou du ministre du travail en cas de recours ( CAA Paris, 12 mars 2025, no 21PA00844 ).

Informer le salarié de la rupture

La rupture n’est pas obligatoirement motivée

Si rien n’oblige en théorie l’employeur à justifier la rupture de la période d’essai ( Cass. soc., 15 janv. 2014, no 12-14.650 ), il doit en pratique pouvoir la justifier par un motif professionnel inhérent à la personne du salarié : défaut de compétences ou d’adaptation au poste, erreurs répétées, mauvaise gestion du temps. Ce motif doit être en lien direct avec l’objectif de l’essai : valider l’aptitude du salarié à tenir le poste.

Remarque

Pas question, donc, de prétendre que le poste va être supprimé, que le salarié a refusé une modification de ses conditions ou de son contrat de travail, ou que son état de santé pose problème. Rompre la période d’essai pour un motif non inhérent à la personne du salarié, par exemple pour absences répétées désorganisant l’entreprise, peut donner droit à dommages et intérêts, cette rupture pouvant être jugée discriminatoire et abusive ( Cass. soc., 10 avr. 2013, no 11-24.794 ). Lorsque la rupture de la période d’essai est jugée nulle car prononcée pour un motif discriminatoire, le salarié peut obtenir des dommages et intérêts. En revanche, il ne peut prétendre ni à l’indemnité de préavis ( Cass. soc., 12 sept. 2018, no 16-26.333 ), ni à l’indemnité pour licenciement nul ( Cass. soc., 25 juin 2025, no 23-17.999, no 689 FS-B ) : cette rupture fait l’objet d’un régime particulier, distinct du licenciement.

Attention à laisser au salarié un temps suffisant pour faire ses preuves. Les juges peuvent apprécier s’il a eu le temps nécessaire pour être évalué sur ses compétences. A défaut, ils pourront juger que la rupture est abusive ( Cass. soc., 11 janv. 2012, no 10-14.868 ). A noter que l’employeur justifiant la rupture de la période d’essai par une faute du salarié doit respecter la procédure disciplinaire : convocation à entretien préalable, entretien avec le salarié (qui peut se faire assister) et délai de 2 jours ouvrables après l’entretien pour notifier la rupture.

Aucun formalisme n’est imposé mais un écrit est recommandé

Si la période d’essai peut être rompue sans forme, mieux vaut toutefois la notifier par écrit au salarié (courrier remis en main propre et/ou LR/AR). Pour des raisons de preuve, la rupture de l’essai doit être explicite.

Remarque

Par exemple, il a été jugé que même si une salariée ne s’était plus présentée au travail dès la date présumée de la rupture de la période d’essai (sans nier avoir cessé de venir travailler), et même si l’employeur pouvait produire des attestations de son absence à compter de cette date, la rupture n’avait pas été réalisée de manière assez explicite pour être valable. En l’espèce, les documents de fin de contrat étaient datés postérieurement à la date présumée de rupture de la période d’essai, et l’employeur n’était pas en mesure de justifier sa décision de rupture, ni sa date (Cass. soc., 24 juin 2020, no 18-28.067).

De plus, cela fixe une date certaine au départ du préavis.

Remarque

La période d’essai ne peut être rallongée du fait de la durée du préavis. Si l’employeur doit respecter un délai de prévenance de 2 semaines et rompt le préavis 1 semaine avant la fin de celui-ci, il risque de devoir verser une indemnité compensatrice de préavis pour la semaine excédant la durée du préavis.

Accomplir les formalités postérieures à la rupture de la période d’essai

Lors de la rupture de la période d’essai, l’employeur devra remettre au salarié :

  • un certificat de travail et une attestation d’assurance chômage ;
  • le salaire correspondant à la période travaillée (y compris RTT ou heures supplémentaires) ;

Remarque

Le cas échéant, si une part variable était prévue au contrat, elle peut lui être intégralement due s’il s’avère que l’employeur n’en avait pas bien précisé les critères d’attribution, tels que les objectifs à atteindre ou les conditions de calcul ( Cass. soc., 10 juill. 2013, no 12-17.921 ).

  • une indemnité de congés payés calculée en fonction du temps de travail effectif accompli jusqu’à la date de rupture du contrat ;
  • un reçu pour solde de tout compte.

Sort de la clause de non-concurrence en cas de rupture de la période d’essai

Le contrat de travail peut prévoir une clause de non-concurrence et préciser qu’elle ne sera pas applicable en cas de rupture de la période d’essai ; c’est le cas le plus simple. Il peut aussi prévoir que la clause de non-concurrence sera applicable si le salarié est à l’initiative de la rupture de la période d’essai. A défaut de précision, le juge recherchera la commune intention des parties lors de la conclusion du contrat : il pourra estimer que les fonctions ont été exercées trop brièvement par le salarié pour qu’il ait eu le temps d’obtenir des informations utilisables par un concurrent.

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Questions fréquemment posées

Quand la rupture de la période d’essai par l’employeur peut-elle être considérée comme abusive ?

La période d'essai étant destinée à apprécier la valeur professionnelle du salarié, sa rupture par l'employeur pour un motif non inhérent à la personne du salarié est abusive. Tel est le cas par exemple lorsqu’elle intervient en raison de la suppression du poste occupé par le salarié ou du fait de l'inexécution par l'employeur de ses obligations.

Le salarié peut-il prétendre à des allocations de chômage s’il rompt sa période d’essai ?

La rupture de la période d’essai par le salarié postérieurement à un licenciement, une rupture conventionnelle ou à une fin de contrat de travail à durée déterminée n'ayant pas donné lieu à une inscription comme demandeur d'emploi peut être considérée comme légitime et ouvrir droit aux allocations de chômage si le salarié met fin à son activité au cours ou au terme d'une période n'excédant pas 65 jours travaillés.

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