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20 novembre 2023
Rédaction du rapport de durabilité, publicité… Communiquer sur sa stratégie RSE est un exercice difficile et risqué. Retour sur quelques préconisations pratiques glanées lors du congrès «RSE/ESG dans tous ses états», organisé par l’Institut du Risk & Compliance le 25 octobre dernier.

Loi sur le devoir de vigilance, directive CSRD... Les entreprises se voient de plus en plus contraintes de publier des informations relatives à leurs pratiques en matière de respect des droits humains et du droit de l’environnement. Entre communication transparente et greenwashing, il n’y a pourtant qu’un pas. Comment ne pas le franchir ? Alicia Couderc, directrice générale associée chez Labrador Company RSE et Maria Knapp, partner au sein du cabinet Control Risks ont fourni quelques pistes aux professionnels de l’ESG et de la compliance à l’occasion d’un colloque organisé par l’Institut du Risk & Compliance le 25 octobre dernier.

« 8 clients sur 10 préfèrent acheter à une entreprise engagée dans le domaine de la RSE. En particulier, les plus jeunes générations qui sont très engagées », souligne Alicia Couderc. Attention, la démarche doit être « sincère ». Car les ONG et les Autorités veillent de plus en plus au respect de la réglementation en matière d’information des consommateurs et n’hésitent pas à épingler les entreprises qui se risqueraient à communiquer de manière très floue auprès du public (Charal ou encore EasyJet plus récemment).

Former les communicants

« On a tous envie de dire qu’on met fin à la faim dans le monde ! Mais fournir une information transparente ne signifie pas tout dire. Il faut donner une information accessible et claire avec des mots simples », prévient Alicia Couderc, qui recommande de « prendre le temps de former ses communicants », qui peuvent mettre en place des campagnes de communications douteuses « plus par méconnaissance ou ignorance que par volonté de tromper ».  

« L’entrée en application imminente de la directive CSRD, c’est le moment opportun pour réfléchir à une remontée d’informations plus qualitative » poursuit-elle. Et la compliance, qui « arrive parfois en bout de chaîne, a un rôle à jouer. C’est une fonction-clé : il faut s’emparer des sujets CSRD ! Le reporting ESG n’est pas qu’un exercice de compliance. Il y a une manière de présenter l’information qui est cadrée ».

Et comment communiquer en cas d’obstacles, « par exemple sur l’engagement des fournisseurs » ? Il peut être compliqué de faire état de ces difficultés dans le reporting et cela « peut traduire un échec » de la part de l’entreprise, estime Maria Knapp.  Au contraire, répond Alicia Couderc. « Nous poussons pour que ces écueils soient intégrés au rapport de durabilité afin de mettre en avant la sincérité de la démarche. L'entreprise construit une trajectoire et elle doit assumer lorsqu’il y a des choses qui ne fonctionnent pas. Par exemple, sur le devoir de vigilance, les ONG ne sont pas braquées et sont ouvertes au dialogue ».

Contrer la monotonie visuelle

Concrètement, sur la forme, le reporting extra-financier doit être lisible et accessible à tous. Pour ce faire, « il existe des petites techniques », explique Alicia Couderc. « On mesure la clarté du texte en prenant en compte un certain nombre de critères : la longueur des phrases (mieux vaut favoriser les phrases courtes), la mise en gras pour mettre en avant des informations importantes, l’ajout de puces pour contrer la monotonie visuelle d’un bloc de texte, ou encore supprimer les redondances, les négations et les formes passives ».

« Les textes hyper denses, c’est comme les CGV : on essaye de savoir ce que l’entreprise veut nous cacher. Privilégier plutôt les tableaux, les graphiques, préconise Alicia Couderc. Cela favorise l’accès au droit, c’est une démarche de mise à portée. Cela fait gagner de la place et du temps de lecture ».

« Une entreprise du secteur pétrolier qui construit des écoles, cela ne rime à rien »

Enfin, souligne Maria Knapp, le reporting extra-financier est l’occasion de réfléchir à la politique ESG à mettre en place. « Il est important de faire comprendre aux parties prenantes que l’entreprise a mûri sa réflexion sur son impact positif et sur son impact négatif ».  S’il y a quelques années, les entreprises communiquaient auprès du public sur le nombres d'arbres qu'elles avaient plantés, elles ont aujourd’hui compris qu’il fallait « centrer leur stratégie sur l’impact des activités qui sont au cœur de l’entreprise et comment elles prennent en compte et souhaitent mitiger leur impact négatif ».

A titre d’illustration, « construire des écoles dans des pays en développement alors que l’entreprise est dans le secteur pétrolier et qu’elle n’a aucune expertise en matière d’éducation, cela ne rime à rien », prévient Maria Knapp. Attention donc à bien « regarder l’analyse de matérialité, étudier les impacts négatifs et les impacts positifs dans le secteur dans lequel l’entreprise travaille ».