Actualité
5 min de lecture
20 février 2025
Plusieurs arrêts rendus ces derniers mois apportent des précisions ou rappellent des règles relatives aux salariés protégés. Tableau récapitulatif de jurisprudence.

La protection des représentants du personnel donne lieu à de nombreuses décisions de jurisprudence. Certaines de ces solutions ne tranchent pas une incertitude ou n'élaborent une règle, mais rappellent le droit applicable, précisent certains cas particuliers ou encore fournissent des illustrations intéressantes. 

Nous vous présentons sous forme de tableau une sélection de ces arrêts des mois de septembre à décembre 2024.

Contexte

Solution

Licenciement après l'expiration de la protection

A l'issue du délai de protection, l'employeur retrouve la liberté de licencier l'intéressé selon les règles de droit commun sous réserve, toutefois, que le licenciement prononcé n'ait pas un caractère abusif ou discriminatoire.

Le salarié ne peut toutefois pas être licencié pour des faits commis pendant la période de protection, sans qu'une demande d'autorisation de licenciement ait été présentée à l'inspecteur du travail (jurisprudence).

Cependant, si l'autorisation de licenciement a été refusée pour des raisons procédurales (non-respect du délai minimum entre la présentation de lettre de convocation et l'entretien préalable dans cette affaire), l'employeur est fondé à invoquer les motifs économiques précédemment invoqués devant l'autorité administrative pour motiver une nouvelle procédure de licenciement engagée après l'expiration de la période de protection (Cass. soc., 14 nov. 2024, n° 23-15.188).

Force majeure

La force majeure qui permet à l'employeur de s'exonérer de tout ou partie des obligations nées de la rupture du contrat de travail, s'entend de la survenance d'un événement extérieur irrésistible ayant pour effet de rendre impossible la poursuite du contrat (jurisprudence).

Constitue un cas de force majeure le saccage et la destruction par incendie du centre commercial dans lequel se trouve le magasin suite aux émeutes à caractère insurrectionnel survenues en Nouvelle-Calédonie en 2024. 

Dans cette hypothèse, il appartient à l'autorité administrative de vérifier :

  • le respect des exigences procédurales légales et des garanties conventionnelles,

  • que la condition tenant à la cessation de l'entreprise à raison de la force majeure est remplie,

  • que l'employeur a procédé à une recherche sérieuse des possibilités de reclassement du salarié dans les entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent avec elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie de son personnel, et que la demande ne présente pas de caractère discriminatoire (TA Nouvelle-Calédonie, 30 déc. 2024, n° 2400455).

Mise à la retraite

Même si le salarié remplit les conditions statutaires d'âge et d'ancienneté de service pour être mis à la retraite, ladite mise à la retraite d'un représentant du personnel doit faire l'objet d'une autorisation de l'inspecteur du travail (jurisprudence).

L'autorisation administrative de licenciement est requise lorsque le salarié bénéficie de la protection à la date à laquelle l'employeur lui notifie son intention de le mettre à la retraite (Cass. soc., 11 sept. 2024, n° 23-11.323).

Lettre de convocation à l'entretien préalable

La lettre de convocation à l'entretien préalable au licenciement d'un salarié protégé doit toujours mentionner que le salarié peut se faire assister d'une personne appartenant au personnel de l'entreprise, même s'il n'y a pas d'institution représentative du personnel. Si l'employeur relève d'une UES dotée d'IRP qui lui sont propres, il doit être mentionné que le salarié peut se faire assister d'une personne appartenant au personnel d'une des entités la composant sous peine d'irrégularité. Toutefois, la procédure n'est pas entachée d'irrégularité s'il est établi que le salarié a été pleinement informé, en temps utile, des modalités d'assistance auxquelles il avait droit, en fonction de la situation de l'entreprise, pour son entretien préalable (jurisprudence).

La procédure de licenciement est irrégulière lorsque d'une part, la lettre de convocation à l'entretien préalable est incomplète et, d'autre part, dans la mesure où il ne ressort pas des pièces du dossier que le salarié protégé a été informé en temps utile, par tout autre moyen, de la possibilité de se faire assister par un salarié d'une autre entreprise de l'UES (CE, 29 oct. 2024, n° 472335).

Licenciement pour motif économique

Si l'entreprise appartient à un groupe, la cause économique s'apprécie, sauf fraude, au niveau du secteur d'activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national (C. trav., art. L. 1233-3, al. 12).

A cet égard, pour l'appréciation du motif économique dans une entreprise appartenant à un groupe, la spécialisation de l'entreprise ne suffit pas à exclure son rattachement à un secteur d'activité plus étendu. 

En d'autres termes, lorsque l'entreprise appartient à un groupe, le contrôle du motif de licenciement par l'autorité administrative ne doit pas forcément se limiter au secteur d'activité dans lequel ladite entreprise est spécialisée : c'est la situation de l'ensemble des entreprises du groupe (en France) intervenant dans le même secteur d'activité se rapportant à un même marché qui doit être prise en compte (CE, 8 nov. 2024, n° 469696).

Le licenciement pour motif économique du salarié protégé ne peut être autorisé s'il s'avère qu'une possibilité de reclassement existe ou que l'employeur n'a pas cherché à reclasser le salarié dans un emploi équivalent lui permettant de continuer à assurer ses fonctions représentatives (jurisprudence).

Pour apprécier si l'employeur a satisfait à son obligation de reclassement, et a procédé à une recherche sérieuse, l'autorité administrative doit tenir compte de l'ensemble des circonstances de fait qui lui sont soumises, notamment de ce que les recherches de reclassement ont débouché sur des propositions précises de reclassement, de la nature et du nombre de ces propositions, ainsi que des motifs de refus avancés par le salarié.

A cet égard, une société qui propose à la salariée protégée un poste nécessitant un diplôme dont elle ne dispose pas, et aucun autre poste n'ayant été proposé, l'employeur n'a pas satisfait à son obligation de reclassement (CE, 21 nov. 2024, n° 472268).

Transfert partiel

Le contrôle de l'inspecteur du travail ne porte pas sur l'origine de l'opération de transfert. Il en résulte que le salarié protégé peut invoquer devant le juge judiciaire, eu égard aux circonstances dans lesquelles est intervenu le transfert, l'existence d'une fraude aux dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail (jurisprudence)

Cependant, il n'appartient pas à la juridiction de l'ordre judiciaire de statuer sur le transfert autorisé ni de rechercher si le salarié a donné son accord au changement d'employeur dans le cadre de ladite autorisation de transfert (Cass. soc., 11 sept. 2024, n° 22-15.024).

Responsabilité de l'État

L'illégalité de la décision autorisant le licenciement d'un salarié protégé, à supposer même qu'elle soit imputable à une simple erreur d'appréciation de l'autorité administrative, constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la puissance publique quelle que puisse être par ailleurs la responsabilité encourue par l'employeur. Ce dernier est donc en droit d'obtenir la condamnation de l'État à réparer le préjudice direct et certain résultant pour lui de cette décision illégale (jurisprudence).

A cet égard, la demande d'indemnisation de l'État est valablement rejetée lorsque l'indemnité perçue par le salarié protégé dans le cadre d'une transaction (issue d'une médiation judiciaire) couvre l'intégralité des préjudices matériels, financiers et moraux qu'il a subis au cours de la période comprise entre son licenciement et sa réintégration, et qu'il ne justifie d'aucun élément de nature à établir qu'il aurait subi un préjudice d'un montant supérieur à celui indemnisé par le protocole transactionnel (CE, 29 oct. 2024, n° 469375).

Changements importants sur l’acquisition des congés payés en cas de maladie ou d'accident

Une véritable révolution jurisprudentielle : tout arrêt de travail pour maladie ou accident ouvre droit à congés, la prescription ne court pas si l’employeur est défaillant et les congés non pris avant un congé parental sont conservés. Modification du régime des congés payés : découvrez gratuitement l’analyse de notre rédaction dans Navis Social.

Aller plus loin
Guide gestion et administration des ressources humaines
Gérer la durée du travail, les congés et les absences, assurer la discipline, gérer les relations avec les organismes extérieurs, s'acquitter des formalités administratives, se séparer d'un salarié... le Guide vous accompagne pour faire face à chaque situation.
à partir de 128.3€ HT/mois

Guide gestion et administration des ressources humaines