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23 mai 2024
En mars 2024, l’AFA a publié un guide pratique visant à aider les entreprises à sécuriser leurs opérations de parrainage et de mécénat. Dans ce premier volet, Jean-Yves Trochon et Hugues Boissel Dombreval, associés chez Rödl & Partner Avocats, reviennent sur les bénéfices et les risques liés à ces opérations.

Les opérations de parrainage et de mécénat des entreprises revêtent une forte utilité économique et sociale. Leur montant est évalué à environ 2,3 milliards d’euros en France selon le dernier baromètre IFOP/Admical publié en 2022, sous forme de contributions financières au bénéfice de causes philanthropiques, éducatives, caritatives, scientifiques, sociales, humanitaires, sportives, familiales, culturelles, artistiques ou encore environnementales.

A noter que les montants versés par les entreprises au titre de ces opérations sont très variables, s’étageant entre quelques milliers et plusieurs dizaines de millions d’euros.

Bénéfices liés aux opérations de mécénat et de parrainage

Le postulat est que ces contributions sont bénéfiques à la société dans son ensemble et sont indispensables pour financer l’économie sociale et solidaire. En outre, elles permettent aux entreprises de jouer un rôle citoyen, notamment dans les territoires où les financements publics sont en recul de plus en plus marqué.

Le bénéfice en termes d’image pour les entreprises est en effet significatif. Même si le « retour sur investissement » n’est pas toujours quantifiable (notamment sur le chiffre d’affaires), ces opérations ont souvent un fort impact positif sur l’attractivité et la réputation en matière de RSE des entreprises mécènes ou « marraines ». La fondation Louis Vuitton, la Bourse de commerce (collection Pinault) ou l’engouement pour le sponsoring des clubs sportifs ou des Jeux olympiques témoignent du vif intérêt des entreprises pour ces opérations de visibilité.

Ces opérations ne sont pas définies par un texte de loi, mais par les textes et la doctrine fiscale.

Le « parrainage » (ou « sponsoring ») revêt une dimension commerciale pour le parrain, qui recherche un avantage sous forme d’effet publicitaire proportionné à son investissement, notamment sous forme d’espace publicitaire ou de reproduction de la marque du parrain.

Quant au mécénat, il consiste à soutenir, sans « contrepartie équivalente », une œuvre ou une personne morale pour l’exercice d’activités présentant un intérêt général. L’instruction fiscale BOI-BIC-RICI-20-30-10-20, § 120 précise ainsi que « le bénéfice du dispositif en faveur du mécénat ne sera remis en cause que s’il n’existe pas une disproportion marquée entre les sommes données et la valorisation de la prestation rendue par l’organisme bénéficiaire des dons ».

Le guide pédagogique de l’AFA illustre les risques d’atteinte à la probité et permet ainsi aux entreprises de « border » les processus de prise de décision et la mise en œuvre de telles opérations.

Les risques liés aux opérations de parrainage et mécénat

Les opérations de parrainage et mécénat des entreprises, si elles ne sont pas bien encadrées, peuvent exposer les entreprises à des risques pénaux et réputationnels, comme le démontrent régulièrement l’actualité.

En effet, elles peuvent soit dissimuler une atteinte à la probité, soit conduire à un détournement de la contrepartie accordée par le bénéficiaire ou du soutien accordé par l’entreprise.

Atteintes à la probité

Pour mémoire, les risques d’atteinte à la probité concernent les infractions de corruption, de trafic d’influence, de détournement de fonds publics, de prise illégale d’intérêts, de concussion, de favoritisme, ainsi que le recel, la complicité ou le blanchiment de ces infractions.

Le guide présente, sous forme d’exemples concrets, des situations tirées de la jurisprudence à l’occasion desquelles des risques d’atteinte à la probité peuvent survenir :

  • une entreprise de construction qui parraine un club de sport dont l’un des membres est par ailleurs responsable commercial d’un fournisseur de matières premières obtenues à des prix avantageux en contrepartie (corruption active et passive) ;
  • une entreprise de restauration qui parraine une association d’utilité publique dont une administratrice, également membre d’un conseil municipal, divulgue en contrepartie à l’entreprise de restauration le cahier des charges d’un appel d’offres avant publication de l’appel à candidature (favoritisme et recel ou complicité de favoritisme) ;
  • un président d’un fonds de dotation qui use de son influence auprès du président d’un conseil régional afin qu’il attribue un marché public à une entreprise, en contrepartie de la « sécurisation » d’un mécénat de l’entreprise en faveur du fonds de dotation (trafic d’influence) ;
  • une entreprise de services qui parraine une fédération sportive en considération de liens familiaux entre les dirigeants des deux entités (prise illégale d’intérêts et recel de prise illégale d’intérêts).

Usage détourné de la contrepartie

Par exemple, un dirigeant ou un collaborateur de l’entreprise marraine ou mécène utilise des billets attribués par le bénéficiaire du parrainage ou du mécénat (telle une fédération sportive ou une association gérant un festival de musique) à des fins de corruption de clients de cette entreprise.

Détournement de soutien  

Le bénéficiaire de la contrepartie utilise ces sommes soit à des fins personnelles (dans le cas d’une personne physique dirigeante, salariée ou membre de l’organisme bénéficiaire), soit pour commettre une infraction relevant de l’atteinte à la probité. En fonction de son degré de connaissance de ces détournements et de sa participation éventuelle, l’entreprise pourrait aussi voir sa responsabilité engagée sur le terrain civil ou pénal.

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Jean-Yves Trochon, senior counsel chez Rödl & Partner, administrateur d’honneur de l’AFJE Hugues Boissel Dombreval, associate partner au sein du même cabinet
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