Le décret 2025-660 du 18 juillet 2025 réforme l’instruction conventionnelle et recodifie en les complétant les mesures prévues par le Code de procédure civile (CPC) relatives aux modes amiables de règlement des différends (Mard).
Il modifie certaines dispositions du livre Ier du CPC (dispositions applicables à toutes les juridictions), du livre II (dispositions particulières à chaque juridiction) et du livre III (dispositions particulières à certaines matières) ; surtout, il refond le livre V en regroupant l’ensemble des règles relatives aux Mard, conventionnels et judiciaires. Il a été commenté par le ministère de la justice (Circ. JUSC2520914C du 19-7-2025 : BOMJ du 28-7).
Les dispositions du décret du 18 juillet 2025 entrent en vigueur le 1erseptembre 2025 et sont applicables aux instances en cours à cette date, sauf celles issues de l’article 3 sur les conventions relatives à la mise en état (nos 4 s.), qui ne sont applicables qu’aux instances introduites après cette date (Décret art. 25).
Décision de résoudre le litige à l’amiable
Le décret complète l’article 21 du CPC, qui prévoit qu’il entre dans la mission du juge de concilier les parties, en ajoutant à cette mission celle de déterminer avec elles la voie la plus adaptée à l’affaire, amiable ou judiciaire ; cet article précise en outre expressément que les parties peuvent à tout moment convenir de résoudre amiablement leur litige (Décret art. 2, 2°).
L’instruction conventionnelle devient la règle
L’article 3 du décret donne une place centrale à l’instruction conventionnelle (ou mise en état conventionnelle), désormais érigée en règle, l’instruction judiciaire devenant l’exception (CPC art. 127 modifié). Jusqu’alors, les parties avaient déjà la possibilité de mettre en état leur affaire de façon conventionnelle en concluant une convention de procédure participative aux fins de mise en état, mais l’instruction restait essentiellement judiciaire.
Ainsi, les parties sont incitées à convenir librement des modalités d’instruction de l’affaire sous le contrôle du juge, ce dernier n’intervenant qu’en cas d’échec ou d’absence de coopération entre les parties. Instruire leur affaire conventionnellement présente l’avantage pour les parties de mieux gérer les délais de cette étape du procès, tant en première instance qu’en appel. En outre, les affaires instruites conventionnellement font l’objet d’un audiencement prioritaire (même art.).
Deux voies permettent d’assurer l’instruction conventionnelle d’un litige :
- la convention de procédure participative (CPC art. 130 s.), qui existait déjà ;
- une nouvelle voie créée par le décret, l’instruction conventionnelle simplifiée (CPC art. 129-1 s.), à laquelle les avocats des parties peuvent recourir sans avoir à recueillir la signature des parties.
Désignation à l’amiable d’un technicien
Parmi les différents points sur lesquels les parties peuvent s’accorder dans le cadre d’une instruction conventionnelle figure le recours à un technicien (CPC art. 131 s.).
Il n’est plus nécessaire que l’expert soit désigné par acte contresigné par avocat. En outre, l’interdiction faite au technicien de concilier les parties est supprimée (abrogation de l’art. 240 du CPC).
Regroupement des dispositions relatives aux Mard
L’article 17 du décret réécrit le livre V du CPC relatif à la résolution amiable des différends, en y regroupant toutes les dispositions relatives aux Mard, qu’ils soient judiciaires ou conventionnels (art. 1528 s.).
Figurent désormais dans ce livre toutes les dispositions concernant la conciliation et la médiation, l’audience de règlement amiable (ARA), la procédure participative et l’homologation des accords.
Confidentialité des Mard
Complétant les dispositions de l’article 21-3 de la loi 95-125 du 8 février 1995, prévoyant que, sauf accord contraire des parties, la médiation est soumise au principe de confidentialité, le nouvel article 1528-3 du CPC précise le champ d’application de ce principe :
- il n’est applicable ni à la convention de procédure participative aux fins de règlement amiable, la confidentialité relevant des règles déontologiques de l’avocat, ni à la conciliation menée par le juge (sauf dans le cadre de l’ARA), puisque le juge doit pouvoir trancher le litige en cas d’échec de la conciliation ;
- afin de ne pas porter une atteinte disproportionnée au droit à la preuve, les pièces produites au cours du processus amiable ne sont pas couvertes par la confidentialité ; seules le sont celles issues du processus amiable.
Sanction du non-respect de l’injonction de rencontrer un médiateur
On sait que, en tout état de la procédure, y compris en référé, lorsqu'il estime qu'une résolution amiable du litige est possible, le juge peut, s'il n'a pas recueilli l'accord des parties, leur enjoindre de rencontrer un médiateur pour qu’il les informe sur le déroulement et l’objet d’une procédure de médiation (Loi 95-125 du 8-2-1995 art. 22-1).
Afin de renforcer l’efficacité de cette injonction, le décret prévoit que le conciliateur ou le médiateur doit informer le juge de l’absence d’une partie à la réunion et que la partie qui, sans motif légitime, ne défère pas à l'injonction peut être condamnée au paiement d'une amende civile de 10 000 € au plus (CPC art. 1533-3 nouveau).
Extension du périmètre de l’ARA
Applicable jusqu’alors à certaines procédures devant le tribunal judiciaire ou le tribunal de commerce, le décret étend l’ARA à toutes les juridictions, quels que soient la nature du contentieux ou le degré de juridiction, sauf pour les procédures engagées devant le conseil de prud’hommes (CPC art. 1532 nouveau).
Accord issu des Mard
L’article 17 du décret complète les dispositions du CPC relatives à l’homologation de l’accord auquel sont parvenues les parties à l’issue d’un Mard (ex-art. 1565 s.). Dans un titre désormais intitulé « l’accord des parties » (art. 1541 s. nouveaux), il précise que l’accord destiné à la résolution amiable du différend est négocié et conclu conformément au droit commun des contrats et qu’il peut lui être donné force exécutoire s’il est constaté par écrit (art. 1541).
Toute partie souhaitant conférer force exécutoire à une transaction ou à un accord, même non transactionnel (c’est-à-dire ne comportant pas de concessions réciproques), issu d'une conciliation menée par un conciliateur de justice, d'une médiation ou d'une convention de procédure participative peut demander son homologation (CPC art. 1543 nouveau ; art. 1565 et 1567 anciens).
Le décret précise les modalités formelles et matérielles de l’homologation. Notamment, le juge n'homologue l'accord des parties que si son objet est licite et s'il ne contrevient pas à l'ordre public et il lui est interdit de modifier les termes de l’accord (art. 1544 nouveau). La demande d’homologation est faite par requête de l’ensemble des parties ou de la plus diligente ; elle peut être portée devant le juge déjà saisi du litige ou devant le juge qui aurait été compétent pour en connaître (art. 1545 nouveau).