L’associé unique d’une société par actions simplifiée unipersonnelle et le président de celle-ci signent un formulaire Cerfa déclarant à l'administration fiscale la cession, par l’associé au président, de la totalité des actions composant le capital de la société. Cette cession est alors inscrite sur le registre des mouvements de titres de la société et sur le compte-titres individuel du président ; mais quelques mois plus tard, l’ex-associé conteste la réalité de la cession en faisant valoir que cette inscription n’était pas valable faute d’être intervenue au vu d’un ordre de mouvement régulier.
Cet argument a été écarté et la cession validée : le formulaire Cerfa, qui avait été signé par l’ex-associé et comportait toutes les informations nécessaires pour inscrire la cession litigieuse sur le registre des mouvements et le compte d'associé, valait ordre de mouvement, de sorte que cette inscription était régulière, que le transfert de propriété des actions était bien intervenu et que le président avait la qualité d'associé unique de la société.
En l’espèce, les statuts de la société prévoyaient que le transfert des actions devait s’opérer par un ordre de mouvement signé du cédant ou de son mandataire et mentionné sur le registre des mouvements de titres de la société ; mais aucun texte législatif ou réglementaire ne régit la forme et le contenu de ce document, qui pouvait donc résulter du formulaire litigieux car celui-ci était suffisant pour pouvoir inscrire la cession en compte.
A noter :
La cession des actions (comme celle des autres titres financiers) est réalisée, on le rappelle, par virement des titres du compte du cédant à celui de l'acquéreur ou, pour les actions non admises aux opérations d'un dépositaire central, par modification de leur inscription dans un dispositif d'enregistrement électronique partagé, telle une blockchain (C. mon. fin. art. L 211-15).
Hors le cas où les actions sont négociées sur un marché financier (actions admises aux opérations d'un dépositaire central ou livrées dans un système de règlement et de livraison), le virement des actions inscrites en compte dans les livres de la société s'effectue au moyen d'un document appelé « ordre de mouvement », dont la signature incombe au seul cédant (Cass. com. 24-5-2011 n° 10-12.163 P : RJDA 10/11 n° 813). Ce document est important puisque c’est par cette signature que le cédant donne pour instruction à la société de transcrire la cession sur le registre des mouvements et de créditer le compte de l'acquéreur du nombre de titres cédés, ces inscriptions conditionnant le transfert de propriété des titres (sur ce point, voir Cass. com. 18-9-2024 n° 23-10.455 F-B : BRDA 20/24 inf. 1).
Comme le précise l’arrêt commenté, aucune forme particulière n'est requise pour l'établissement de l'ordre de mouvement. Il peut ainsi être donné par simple lettre adressée à la société pourvu qu'il comporte des instructions claires et précises de la part du cédant.
Par une précision inédite apportée par l’arrêt ci-dessus, la Cour de cassation énonce que le formulaire Cerfa utilisé pour déclarer à l’administration fiscale les cessions de droits sociaux non constatées par un acte (formulaire n° 2759 disponible sur le site impots.gouv.fr) peut valoir ordre de mouvement. En effet, une fois rempli, ce formulaire comporte toutes les informations nécessaires à la société pour qu’elle transcrive la cession (identité du cédant et de l’acquéreur, dénomination et forme de la société, nature et nombre des actions cédées, etc.). Il peut donc faire office d’ordre de mouvement en l’absence de précision sur ce document dans les statuts de la société. Cette solution rejoint celle récemment exprimée par l’Association nationale des sociétés par actions (Communication Ansa, comité juridique n° 24-017 du 6-3-2024).
Pour éviter toute contestation sur la forme et le contenu de l'ordre, les statuts peuvent indiquer que les virements se font uniquement sur présentation d'un ordre de mouvement normalisé fourni par la société. Est parfois utilisé le modèle d'ordre annexé à la norme Afnor NF K 12-500 applicable depuis le 17 octobre 2008 (Décision Afnor 20080917 du 17-9-2008 : JO du 7-10-2008 p. 15421).
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