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17 novembre 2022
Un décret publié au JO du 16 novembre, pris en application de la loi du 2 août 2021 relatif à la santé au travail, précise les règles d’élaboration, d’accessibilité et de conservation du dossier médical en santé au travail.

Le décret n° 2022-1434 (D. n° 2022-1434, 15 nov. 2022 : JO, 16 nov.) fixe les nouvelles règles concernant le dossier médical en santé au travail (DMST) : modalités de constitution du dossier médical, son contenu, les différents accès possibles au dossier en lecture et en alimentation par les professionnels des services de santé au travail, l’information du travailleur sur son droit d’opposition à l’accès à ses données ainsi que les modalités d’échanges d’informations entre professionnels de santé.

Remarque

le décret ajoute une nouvelle sous-section intitulée « Dossier médical en santé au travail » dans la section 2 relative au suivi individuel de l’état de santé du travailleur de la partie règlementaire du code du travail. Cette nouvelle partie précise les modalités de fonctionnement du DMST en application de la loi du 2 août 2021 relatif à la santé au travail (voir article).

Mise en place du DMST

Le DMST doit être constitué par le médecin du travail ou, le cas échéant, le collaborateur, l’interne en médecine du travail ou l’infirmier, et retrace dans le respect du secret médical les informations relatives à l’état de santé du travailleur, aux expositions auxquelles il a été soumis ainsi que les avis et propositions du médecin du travail.

Il est accessible au médecin praticien correspondant (voir article) et aux professionnels de santé chargés d’assurer, sous l’autorité du médecin du travail, le suivi de l’état de santé d’une personne, sauf opposition de l’intéressé (C. trav., art. L. 4624-8).

Le DMST doit être constitué sous format numérique sécurisé, pour chaque travailleur bénéficiant d’un suivi individuel de son état de santé dans un SPST. Le traitement de ces données est placé sous la responsabilité du SPST pour le respect des obligations légales auxquelles il est soumis, conformément au RGPD (C. trav., art. R. 4624-45-3 nouveau).

Contenu du DMST

Le DMST doit comprendre les éléments suivants (C. trav., art. R. 4624-45-4 nouveau) :

  1. les données d’identité, incluant l’identifiant national de santé (numéro de sécurité sociale), les données médico-administratives du travailleur nécessaires à la coordination de sa prise en charge en matière de santé et, le cas échéant, les données d’identité et de contact de son médecin traitant ;
  2. les informations permettant de connaître les risques actuels ou passés auxquels le travailleur est ou a été exposé, notamment les informations relatives aux caractéristiques du ou des postes de travail et au secteur d’activité dans lequel il exerce, les données d’exposition à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels ou toute autre donnée d’exposition à un risque professionnel de nature à affecter l’état de santé du travailleur, ainsi que les mesures de prévention mises en place ;
  3. les informations relatives à l’état de santé du travailleur recueillies lors des visites et examens nécessaires au suivi individuel de son état de santé ;
  4. les correspondances échangées entre professionnels de santé aux fins de la coordination et de la continuité de la prise en charge du travailleur ;
  5. les informations formalisées concernant les attestations, avis et propositions des professionnels de santé au travail, notamment celles formulées après une visite médicale, les informations délivrées au travailleur sur les expositions professionnelles, les risques identifiés, les moyens de protection, l’existence ou l’absence d’une pathologie en lien possible avec une exposition professionnelle, ainsi que les avis médicaux ;
  6. la mention de l’information du travailleur sur ses droits en matière d’accès aux données le concernant et sur les conditions d’accès à son dossier médical ;
  7. le cas échéant, le consentement ou l’opposition du travailleur notamment lorsqu’il relève de plusieurs SPST ou cesse de relever d’un de ces services.

Alimentation du DMST

L’alimentation et la consultation du DMST peuvent être réalisées par (C. trav., art. R. 4624-45-5 nouveau) :

  • le médecin du travail ;
  • le collaborateur médecin ;
  • l’interne en médecine du travail ;
  • l’infirmier ;
  • l’intervenant en prévention des risques professionnels et l’assistant de service de prévention et de santé au travail, sur délégation du médecin du travail et sous sa responsabilité.

L’alimentation et la consultation du DMST doivent respecter les règles de confidentialité précisées par le code de la santé publique.

Toutes les actions réalisées sur le dossier médical, quel qu’en soit l’auteur, doivent être tracées et conservées dans le dossier médical, notamment la date, l’heure, et l’identification du professionnel du service de santé au travail (C. trav., art. R. 4624-45-5 nouveau).

Information du droit d’opposition du salarié

Le travailleur doit être informé lors de la création de son dossier médical et lorsqu’il relève de plusieurs SPST ou cesse de relever de l’un de ces services, par tout moyen y compris dématérialisé (C. trav., art. R. 4624-45-6 nouveau) :

  1. de son droit de s’opposer à l’accès au DMST, du médecin praticien correspondant ou des professionnels chargés d’assurer, sous l’autorité du médecin du travail, le suivi de son état de santé ;
  2. de son droit de s’opposer à l’accès des professionnels chargés du suivi de son état de santé aux dossiers médicaux en santé au travail dont il est titulaire et qui sont détenus par d’autres services de prévention et de santé au travail.

La délivrance de ces informations et l’exercice de l’un de ces droits doivent être retracés dans le dossier médical (C. trav., art. R. 4624-45-6 nouveau).

Le droit d’opposition ne s’applique pas, en revanche, à la constitution et à l’alimentation du dossier médical en santé au travail (C. trav., art. R. 4624-45-8 nouveau).

Transmission du dossier médical

Lorsqu’un travailleur relève de plusieurs SPST ou cesse de relever d’un de ces services, le service compétent pour assurer la continuité du suivi du travailleur peut demander la transmission de son dossier médical, sauf dans le cas où le travailleur a déjà exprimé son opposition à une telle transmission (voir supra) (C. trav., art. R. 4624-45-7 nouveau).

Le service demandeur doit informer le travailleur et s’assurer qu’il ne s’oppose pas à une telle transmission. En l’absence d’opposition du travailleur, son dossier médical est transmis par messagerie sécurisée au service demandeur.

Dans ce cas, les informations concernant des tiers n’intervenant pas dans le suivi individuel de l’état de santé ne sont communicables que dans la mesure où elles sont strictement nécessaires à la continuité du suivi (C. trav., art. R. 4624-45-7 nouveau).

Communication du dossier médical au salarié

Le travailleur, ou en cas de décès de celui-ci toute personne qui y est autorisée par le code de la santé publique, peut demander la communication du DMST sous format papier ou dématérialisé.

Le travailleur peut également exercer auprès du SPST ses droits de rectification, d’effacement et de limitation prévus par le RGPD (C. trav., art. R. 4624-45-8 nouveau).

Conservation du dossier médical

Les informations concernant la santé des travailleurs sont soit conservées au sein des SPST qui les ont recueillies, soit déposées par ces établissements auprès d’un organisme hébergeur.

Le SPST doit veiller à ce que toutes les dispositions soient prises pour assurer la confidentialité des informations ainsi conservées ou hébergées.

Le DMST doit être conservé pendant une durée de 40 ans à compter de la date de la dernière visite ou examen du titulaire au sein du SPST concerné, dans la limite d’une durée de 10 ans à compter de la date du décès de la personne titulaire du dossier. Ces délais sont suspendus par l’introduction de tout recours gracieux ou contentieux tendant à mettre en cause la responsabilité médicale du service ou de professionnels de santé à raison de leurs interventions au sein du service.

Lorsque la durée de conservation d’un dossier médical doit s’achever avant d’autres durées plus longues mentionnées aux articles R. 4412-55 (50 ans après la fin de la période d’exposition à des agents chimiques dangereux), R. 4426-9 (10 ans ou 40 après la cessation de l’exposition à des agents biologiques) et R. 4451-83 du code du travail (jusqu’au moment où le travailleur exposé à des rayonnements ionisants a ou aurait atteint l’âge de 75 ans et, en tout état de cause, pendant une période d’au moins 50 ans à compter de la fin de l’activité professionnelle impliquant une exposition aux rayonnements ionisants), la conservation du dossier est prorogée jusqu’aux échéances prévues par ces articles (C. trav., art. R. 4624-45-9 nouveau).

Suppression du dossier médical spécial

Les travailleurs susceptibles d'être exposés à des agents biologiques pathogènes ne bénéficient plus désormais d’un dossier médical spécial mentionné dans le DMST.

Ces derniers bénéficient désormais uniquement du DMST (C. trav., art. R. 4426-8 et suivants modifiés).

Entrée en vigueur

Ce décret entre en vigueur le lendemain de sa publication, soit le 17 novembre 2022.

Les DMST créés à compter du 17 novembre 2022, ainsi que ceux, établis avant cette date, des travailleurs toujours suivis à cette même date par un SPST, doivent être conformes aux dispositions des articles R. 4624-45-3 relatifs à la mise en place et à la sécurisation des données et R. 4624-45-4 relatif au contenu du DMST dans leur rédaction issue du présent décret, au plus tard le 31 mars 2023.

Les DMST, établis avant le 17 novembre 2022, des travailleurs qui ne sont plus suivis à cette même date par un SPST restent régis par les dispositions du code du travail dans leur rédaction antérieure au présent décret, à l'exception des dispositions relatives à la communication, à l'hébergement et à la conservation des dossiers.

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