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20 juin 2023
Le texte a failli être rejeté à seulement une voie près. Les débats risquent de se tendre dans le contexte des élections européennes de juin 2024.

Le projet de règlement européen sur la restauration de la nature a donné des sueurs froides à certains membres du Parlement européen.

Une motion de rejet repoussée à une voie près

Rappelons que le règlement proposé fixerait plusieurs objectifs et obligations contraignants en matière de restauration dans un large éventail d'écosystèmes, des forêts et terres agricoles aux zones urbaines, en passant par les rivières et les habitats marins, en complément d'autres instruments juridiques existants. Au total, ces mesures de restauration de la nature devraient couvrir au moins 20 % des zones terrestres et maritimes de l'UE d'ici à 2030, et tous les écosystèmes nécessitant une restauration d'ici à 2050. Autant d'obligations qui révulsent certains parlementaires.

Remarque

ce texte constitue une mesure de mise en oeuvre des stratégies européennes respectivement sur l'agriculture et sur la biodiversité elles-mêmes adoptées dans le cadre du Grean Deal.

Jeudi 15 juin 2023, la commission Environnement du Parlement a repoussé de justesse un amendement de rejet du projet de texte. Ainsi, 44 eurodéputés ont voté pour (les Verts, les sociaux-démocrates et une partie des libéraux de Renew), tandis que 44 autres ont voté contre (les conservateurs du Parti populaire européen (PPE), alliés à l’extrême droite). Comme la proposition de rejet du texte devait recueillir 45 voies, soit la majorité relative, il n'a, au final, manqué qu'une seule voie. Après le rejet de l'amendement, les parlementaires vont donc pouvoir poursuivre l’examen du texte, article par article. Les discussions continueront le 27 juin, puis, en plénière, en juillet.

Économie contre environnement

Les opposants au projet de règlement font principalement valoir que dans le contexte général d'inflation massive, d'insécurité alimentaire mondiale et de crise énergétique, cette proposition ne ferait qu'accentuer la dépendance du continent européen à l'égard des importations. Et tant pis si, le 9 juin 2021, ces mêmes opposants avaient voté comme un seul homme une résolution en faveur de la stratégie biodiversité à l'horizon 2030 et n'avaient pas non plus formellement protesté contre le projet de règlement présenté un an plus tard  par la Commission européenne.  Les députés soutenant le texte soulignent quant à eux que seulement 15 % des habitats d'intérêt européen du réseau Natura 2000 sont jugés en bon état de conservation - cette proportion étant à peine meilleure pour les espèces (25 %) - et qu'il est grand temps de renverser cette évolution négative. Les résultats de la consultation organisée de janvier à avril 2021 sur ce texte montrent en tout cas un nombre important de retours (7 125), dont près de 91 % proviennent de simples citoyens européens.

Pressions sur le Conseil européen

Des pressions se sont également fait jour au plus haut niveau de l'exécutif européen : la Suède, qui occupe la présidence tournante du Conseil européen jusqu'au 30 juin 2023, a même souhaité interrompre les discussions estimant qu'un accord n'était pas à porter de main, avant de se raviser... sous la pression d'une vingtaine d’États membres. Le président Emmanuel Macron, avait lui-même, demandé une « pause réglementaire » environnemental  après 2024, exaspérant ainsi une partie de ses soutiens, avant de préciser que cela ne concernait pas les projets de texte en cours. En tout cas, une bataille politico-législative se prépare autour de l'adoption de ce texte. Elle sera sans doute exacerbée par la perspective des futures élections européennes qui se tiendront en juin 2024.

Olivier CIZEL, Code permanent Environnement et nuisances