La dégradation de la nature aura un impact négatif sur l'économie. C'est ce qui ressort de deux notes récentes de la Banque centrale européenne.
« Sur les 4,2 millions de sociétés non financières (SNF) de la zone euro, 72 % dépendent de manière critique des services écosystémiques et seraient confrontées à des problèmes économiques importants en raison de la dégradation des écosystèmes », prévient la Banque centrale européenne dans une note publiée le 24 septembre 2024. Avant de poursuivre : « environ 75 % de tous les prêts aux entreprises de la zone euro sont accordés à des SNF qui dépendent de manière critique d'au moins un service écosystémique. Les portefeuilles de prêts pourraient être considérablement affectés si la dégradation de l'environnement continue de suivre les tendances actuelles, les vulnérabilités les plus fortes étant concentrées dans certaines régions et certains secteurs économiques », prévient la Banque centrale européenne.
Les services écosystémiques « se définissent comme un bénéfice que la nature procure à l’être humain », décrit la Banque européenne d'investissement. « Ces apports comprennent des fonctions cruciales telles que la pollinisation, la filtration de l’air et de l’eau, la capture du carbone et la fourniture de récoltes, de bois et d’autres ressources », détaille la Banque centrale européenne. Autant de services auxquels il n'est pas accordé de valeur économique à ce jour.
Dépendance des systèmes financiers
Autre point d'inquiétude : il y aurait une forte concentration d’activités de financement à impact négatif sur la biodiversité. « Les dix banques ayant le plus grand impact sur la nature sont responsables du financement d’environ 40 % de la perte de biodiversité mondiale estimée causée par les SNF de la zone euro », analyse la note de la Banque centrale européenne.
La BCE reprend également les conclusions de deux études, l'une de la Banque centrale des Pays-Bas et la seconde de la Banque centrale de France qui alertent sur la dépendance critique de leur système financier national vis-à-vis des services écosystémiques.
Redonner de la valeur à la nature
Des initiatives portées par la Commission européenne (projet Integrated Natural Capital Accounting (INCA)) et l'OCDE sont en cours pour comptabiliser les services offerts par la nature dans la mesure de l'activité économique mondiale, notamment la croissance du PIB. Par exemple, « en 2019, la valeur estimée des services écosystémiques dans l’UE s’élevait à plus de 234 milliards d’euros, soit à peu près l’équivalent de la valeur ajoutée brute combinée des secteurs agricole et forestier », mentionne la Banque centrale européenne dans une seconde note publiée le 24 septembre. Ce type de mesure ajuste à la hausse le PIB de certains pays de l'UE et des États-Unis et à la baisse celui de la Chine ou encore de l'Inde...
En conclusion : « la surexploitation des ressources naturelles peut accroître la production à court terme, mais elle peut s’avérer insoutenable à plus long terme, car la dégradation de la nature réduit à terme le flux des services écosystémiques et donc l’activité économique », prévient la Banque centrale européenne.
1 Dans sa note, la Banque reprend des conclusions d'une étude récente Boldrini, S., Ceglar, A., Lelli, C., Parisi, L. and Heemskerk, I., “Living in a world of disappearing nature: physical risk and the implications for financial stability”, Occasional Paper Series, No 333, ECB, 2023.