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5 juin 2023
La création d’un «standard triple E» en matière environnementale a été annoncée dans le projet de loi Industrie verte dévoilé mi-mai. Thierry Geoffroy, responsable des Relations institutionnelles d’AFNOR, nous explique les tenants et les aboutissants de cette démarche qui permettra aux entreprises qui auront obtenu le standard triple E de bénéficier de certains avantages.

Le 16 mai, le gouvernement a annoncé la création du « triple E », un standard de référence en matière environnementale pour l’industrie. Toutes les sociétés seront-elles concernées ? Comment cette norme volontaire s’imbriquera-t-elle avec les autres dispositifs de reconnaissance prévues aux niveaux français et européen ? On fait le point avec Thierry Geoffroy, responsable des Relations institutionnelles d’AFNOR qui participe à l’élaboration de cette norme avec toutes les parties prenantes.

Quel sera le type de norme sur lequel vous allez travailler ?

On peut considérer qu’Il y a trois niveaux pour les normes volontaires : le niveau français, le niveau européen et le niveau international (normes ISO). Dans le cas du triple E, il s’agit d’une initiative française mais qui a vocation à devenir une norme européenne. Les travaux qui s’engagent concerneront le verdissement réel de l’industrie française et européenne.

Une norme française comme européenne se fait sur la base de consensus et se veut d’application volontaire. En Europe, dans le domaine de l’industrie verte comme dans tous les domaines, il peut y avoir des approches différentes. Tout l’enjeu des normes volontaires est de trouver une solution qui associe l’ensemble des acteurs concernés.

Nous allons répondre à la commande du gouvernement qui a associé de nombreux acteurs en proposant un standard, une norme, la plus adaptée qui soit compte tenu d’un agenda très serré.  Avantage : un temps de conception raccourci.

Avec qui allez-vous travailler ?

Avec tous les acteurs intéressés. La norme est basée sur le consensus de toutes les parties prenantes : les entreprises, les industriels, les pouvoirs publics, les ONG, le patronat, les agences de notation, les syndicats, les organismes certificateurs, les banques, les assurances, etc.

En somme, toutes les parties intéressées par l'industrie verte, présentes ou à venir. La normalisation volontaire, tout le monde peut y contribuer pour qu'elle soit la plus efficace et simple possible, la plus acceptée et le plus en prise avec la réalité du terrain. Ce n'est pas une norme au bénéfice d'un intérêt particulier : c'est une approche collective pour avoir un résultat positif et faire avancer le sujet. A ce jour, le tour de table est lancé mais il n'est pas bouclé.

Toutes les entreprises pourront-elles demander à se faire certifier sur la base de cette norme ?

Oui. La norme tiendra compte de la taille des entreprises et de leurs secteurs d’activité. On doit s’adapter. Les situations varient selon que l’on est un grand groupe ou une PME. Il est impératif de tenir compte de la réalité du terrain.

Quel sera l’intérêt pour les entreprises ?

L’intérêt du triple E est de faciliter la vie des entreprises pour leur décarbonation et de rendre cette approche plus simple et plus lisible. Il doit aussi y avoir des effets quant à leur financement et leur expansion et également trouver des échos positifs tant dans le cadre de la commande publique que privée.

Le triple E est un outil qui doit participer au développement des entreprises et faire connaître et reconnaître celles qui font des efforts réels et efficaces de décarbonation dans la durée, preuves à l’appui.

Les industriels qui font reconnaître leurs pratiques environnementales vertueuses doivent bénéficier d’un « retour sur investissement ».

Quels critères devront remplir les entreprises ?

La norme listera une vingtaine de critères qui seront déterminés d’un commun accord. Il sera tenu compte de normes reconnues comme par exemple l’ISO 14001. D’autres approches pourront être également reconnues. Nous voulons faire simple, efficace et pragmatique.

La communauté déterminera les critères importants. L’objectif est de ne pas ajouter de tâches supplémentaires aux entreprises. Il faut simplifier leur vie. La norme tiendra compte naturellement de leur environnement général, comme par exemple la directive CSRD. La philosophie est de créer une norme simple, lisible et cohérente. Nous devons déjà définir ce qu'est l'industrie verte. Il y a quelques points qui restent à préciser comme par exemple la sobriété hydrique.

C’est un travail de sélection et de croisement d’indicateurs existants - ou non -, qui nous attend. Vous avez déjà des certifications sur la base de normes qui traitent de ce sujet. Nous n'allons pas faire un millefeuille : nous prendrons en considération tous les engagements des entreprises et nous ferons en sorte de mettre en place un travail de conversion pour les entreprises déjà certifiées, déjà reconnues.

Comment cette nouvelle norme volontaire s’imbriquera-t-elle avec les obligations prévues par les réglementations existantes et à venir ?

Évidemment, le triple E ne sera pas déconnecté de l'environnement législatif et réglementaire existant et à venir. Il doit s’inscrire dans l’environnement des entreprises et donc tenir compte par exemple du Green Deal, de la directive CSRD, etc.

Le triple E devra être nécessairement connecté avec les avancées qui sont faites au niveau français et au niveau européen de façon à ne pas introduire de couches supplémentaires.

Notre travail consistera à prendre en considération ce qui est traité et ce qui ne l’est pas, ce qui est bien traité ou pas. Cela donnera lieu à des travaux importants de reconnaissance.

La norme pourra-t-elle être amenée à évoluer ?

Toutes les normes volontaires sont révisées régulièrement, généralement tous les 5 ans. S’il faut améliorer des choses, on doit impérativement corriger le tir et ce à tout moment. Il faut savoir que plusieurs centaines de normes sont systématiquement révisées annuellement, voir disparaissent chaque année si elles ne sont plus pertinentes. Le triple E, qui sera une norme, a vocation à être réévalué régulièrement afin d’analyser périodiquement son efficacité et sa pertinence

Pouvez-vous nous en dire plus sur le calendrier ?

Avant la fin de l’année 2023, nous devrions avoir un projet de norme française consolidée. Les travaux européens vont être menés en parallèle. Concernant la norme européenne, le timing sera un peu plus conséquent.

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Propos recueillis par Leslie Brassac