Les avis divergent sur le projet de loi Omnibus visant à modifier le Pacte vert. Si les défenseurs du texte parlent simplement d’un allègement des charges bureaucratiques pour les entreprises, d’autres évoquent au contraire une destruction massive des normes environnementales européennes. Pour Dominique Potier, député (parti socialiste, Meurthe-et-Moselle, 5e circonscription) et père de la loi de 2017 sur le devoir de vigilance, l’heure est à la résistance et à la mobilisation. Le 25 mars, le député a réuni à l’Assemblée nationale, des syndicats, ONG, partis politiques, enseignants et dirigeants d’entreprises pour défendre la réglementation européenne environnementale. Il appelle à « combattre ensemble » et « partager la vision d’une France et d’une Europe qui font du Pacte vert un bouclier économique et un enjeu majeur ».
La maîtrise du risque aux dirigeants
Les entreprises sont les premières concernées par le Pacte vert. Beaucoup d’entre elles se sont mises en ordre de marche pour se conformer à la réglementation. C’est notamment le cas des entreprises ayant adhéré à Impact France, un mouvement de dirigeantes et dirigeants français qui mettent l’impact écologique et social au cœur de leur entreprise. Pascal Demurger, directeur général de la Maïf et co-fondateur d’Impact France en est convaincu : la règlementation est fondamentale pour les entreprises. En interne, la CSRD permet par exemple « d’objectiver l’endroit dans lequel les autres entreprises et nous-mêmes, nous nous situons dans la transition », déclare le directeur général. « Je ne saurais pas le faire si je ne sais pas monitorer. Je ne sais pas transformer ma chaîne de valeur en fonction des objectifs qui ne sont pas fixés », poursuit-il. Qui dit déréguler dit ainsi laisser à chaque dirigeant d’entreprise la maîtrise du risque de sa transition.
Contrairement au reporting de durabilité, la directive sur le devoir de vigilance impose aux entreprises un comportement. Il s’agit d’un devoir « de transformation, d’action et de pouvoir au sein des entreprises », estime Marylise Léon, secrétaire générale de la CFDT, Pour assurer la transaction écologique, il est selon elle important de préserver l’ambition à l’échelle européenne de ce texte. « Le modèle européen ne peut pas renoncer à ce qu’il peut avoir de spécifique et singulier. S’il rentre dans une compétition sous le prisme économique, ce sera perdant pour l’Europe et pour les travailleurs et travailleuses que je représente », ajoute la syndicaliste.
Une compétition sur les normes
Parmi les arguments des opposants au Pacte vert figure bien souvent la question du coût. Selon Pascal Demurger, l’intégration de la CSRD et du devoir de vigilance dans l’entreprise est toutefois « très accessible ». Il estime le coût de mise en œuvre avec l’investissement de la première année à 7 ETP (emplois temps plein). « Par rapport à 10 000 salariés dans l’entreprise, ce n’est pas beaucoup et c’est inférieur au coût de la réédition des données financières », déclare le directeur général de la Maïf.
Même constat pour Marie Toussaint, députée européenne (parti Les Ecologistes). Elle prend pour preuve une étude menée auprès des entreprises cotées en bourse : « le coût administratif de la transparence et du suivi des indicateurs ne coûte que 0,13 % des montants déversés chaque année par les entreprises à leurs actionnaires ». Pour la députée, encadrer les dividendes des actionnaires permettrait de réaliser toutes les marges possibles pour financer le travail de la simplification.
Simplifier oui, détruire non. « La vérité est qu’il s’agit aujourd’hui d’une compétition sur les normes », explique Raphaël Glucksmann, député européen (parti place publique). « Si on ne participe pas à la guerre de la norme, nous achèterons tous du « Shein » demain », poursuit-il. Selon le député, le but des « adversaires européens » est d’empêcher l’UE d’être éditrice de normes. Pour contourner cela, il faut accepter la simplification : « nous devons jongler entre le nécessaire compromis et le refus du détricotage pur et simple »,