D’origine anglo-saxonne, le concept de gouvernement d’entreprise correspond à l’ensemble des mesures mises en place au sein d’une entreprise et permettant notamment : de délimiter les pouvoirs des dirigeants et d’organiser leurs relations avec les autres organes de la structure et les actionnaires ; d’orienter et de contrôler les objectifs poursuivis par la direction de l’entreprise. Le cadre du gouvernement d’entreprise résulte d’une combinaison de dispositions législatives, mais également de mesures non contraignantes prévues par des codes de gouvernement d’entreprise dont fait partie le code AFEP-MEDEF. S’agissant de la responsabilité sociale et environnementale (RSE), ce concept, né dans les années 70 aux États-Unis, part du postulat que les entreprises doivent prendre en considération les conséquences que leurs activités sont susceptibles de générer en matière sociale et environnementale afin de limiter leur impact négatif dans ces domaines.
Positionner les sujets RSE au centre des préoccupations des organes de gouvernance
Dans le cadre de la précédente version du code AFEP-MEDEF, de janvier 2020, certaines recommandations portant sur la RSE étaient déjà présentes. D’une part, au sein des développements dédiés aux missions du conseil d’administration, le code précisait que cet organe :
- s’attache à promouvoir la création de valeur par l’entreprise à long terme en considérant les enjeux sociaux et environnementaux de ses activités. Il propose, le cas échéant, toute évolution statutaire qu’il estime opportune ;
- est informé de l’évolution des marchés, de l’environnement concurrentiel et des principaux enjeux auxquels l’entreprise est confrontée y compris dans le domaine de la responsabilité sociale et environnementale ;
- examine régulièrement, en lien avec la stratégie qu’il a définie, les opportunités et les risques tels que les risques financiers, juridiques, opérationnels, sociaux et environnementaux ainsi que les mesures prises en conséquence. À cette fin, le conseil d’administration reçoit toutes les informations nécessaires à l’accomplissement de sa mission notamment par les dirigeants mandataires sociaux exécutifs.
D’autre part, dans la partie consacrée au conseil et à la communication avec les actionnaires et les marchés, il était déjà précisé que « Le conseil veille à ce que les actionnaires et les investisseurs reçoivent une information pertinente, équilibrée et pédagogique sur la stratégie, le modèle de développement, la prise en compte des enjeux extra-financiers significatifs pour la société ainsi que sur ces perspectives à long terme ».
Enfin, s’agissant des préconisations afférentes aux comités d’audit et plus particulièrement à leurs attributions, il était prévu que « L’examen des comptes doit être accompagné d’une présentation par la direction décrivant l’exposition aux risques, y compris ceux de nature sociale et environnementale et les engagements hors bilan significatifs de la société ainsi que les options comptables retenues ».
Aujourd’hui, avec la nouvelle version du code publiée le 20 décembre 2022, l’appréhension et l’intégration des enjeux RSE par les organes de gouvernance d’entreprise, et notamment le conseil d’administration, passent à la vitesse supérieure. En effet, comme le souligne le communiqué de presse de l’AFEP-MEDEF du même jour : « Les entreprises accordent aux enjeux de RSE une place centrale dans leurs décisions et leur stratégie. Il s’agit d’accélérer la dynamique en faveur d’une prise en compte de ces sujets par les conseils d’administration et de surveillance. C’est pourquoi, prenant en considération les réflexions et propositions des acteurs de la place de Paris, la nouvelle version du code publiée ce jour par l’Afep et le Medef place délibérément la stratégie RSE au cœur des missions du conseil, particulièrement en matière climatique ».
Recommandations concrètes inscrites dans la nouvelle version du code
En conservant les recommandations RSE précédentes, l’AFEP-MEDEF vient, dans cette nouvelle version, les consolider et les développer de façon très significative autour de deux principaux axes.
La mission du conseil d’administration en matière de RSE
Dans un paragraphe 5 intitulé « Le conseil d’administration et la responsabilité sociale et environnementale », le conseil d’administration est, d’abord, élevé au rang de véritable garant de la stratégie RSE de l’entreprise. « Sur proposition de la direction générale, le conseil d’administration détermine des orientations stratégiques pluriannuelles en matière de responsabilité sociale et environnementale » (§ 5.1). Ensuite est prévu un passage de relais à la direction générale. Celle-ci sera chargée de présenter « au conseil d’administration les modalités de mise en œuvre de cette stratégie en lien avec un plan d’action et les horizons de temps dans lesquels ces actions seront menées. » (§ 5.2). En outre, la direction générale devra informer « annuellement le conseil des résultats obtenus ».
Si le conseil d’administration devient garant de la stratégie RSE, c’est particulièrement le cas en matière de climat. « En matière climatique, cette stratégie est assortie d’objectifs précis définis pour différents horizons de temps. Le conseil examine annuellement les résultats obtenus et l’opportunité, le cas échéant, d’adopter le plan d’action ou de modifier les objectifs au vu notamment de l’évolution de la stratégie de l’entreprise, des technologies, des attentes des actionnaires et de la capacité économique à les mettre en œuvre » (§ 5.3). Il est souligné que cette « stratégie climatique mentionnée au § 5.3 ainsi que les principales actions engagées à cet effet sont présentées à l’assemblée générale ordinaire au moins tous les trois ans ou en cas de modification significative de la stratégie » (§ 5.4).
Le paragraphe 16 du code, intitulé, « Les comités du conseil : principes généraux », recommande également que l’ensemble des sujets RSE susmentionnés « fassent l’objet d’un travail préparatoire réalisé par un comité spécialisé du conseil d’administration ».
La rémunération des dirigeants en lien avec la RSE
Autre innovation et non des moindres, destinée à booster la prise en compte des enjeux RSE par les organes de gouvernance et, plus particulièrement, les dirigeants : le paragraphe 26 prévoit l’influence de critères RSE sur leur rémunération. « La rémunération de ces dirigeants doit être compétitive, adaptée à la stratégie et au contexte de l’entreprise et doit avoir notamment pour objectif de promouvoir la performance et la compétitivité de celle-ci sur le moyen terme, en intégrant plusieurs critères liés à la responsabilité sociale et environnementale, dont au moins un critère en lien avec les objectifs climatiques de l’entreprise. Ces critères, définis de manière précise, doivent refléter les enjeux sociaux et environnementaux les plus importants pour l’entreprise. Les critères quantifiables doivent être privilégiés ».
Ces recommandations sont applicables immédiatement ou, au plus tard, pour les assemblées générales statuant sur les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2023.