Actualité
3 min de lecture
23 octobre 2023
Comment les entreprises doivent-elles s’emparer des sujets ESG ? Quelques pistes et illustrations concrètes ont été fournies lors du campus de l’AFJE qui s’est déroulé la semaine dernière.

« Les Français ont un temps d’avance sur la plupart de leurs concurrents européens », a déclaré Timothé Kieffer, directeur juridique et conformité de SNCF Réseau et administrateur de l'AFJE. Animateur de la formation « Créer sa feuille de route ESG : méthodologie » qui s’est tenue le 18 octobre, Timothé Kieffer a notamment interrogé Guy Gras sur son expérience en tant que directeur de la gouvernance et de la conformité au sein du groupe Yves Rocher.

« La RSE n’est pas une nouvelle matière du droit »

Réaliser un « pilotage efficace » apparaît nécessaire pour les deux directeurs conformité. Ainsi, chaque entreprise doit définir et encadrer les modalités d’intervention du juriste car celui-ci « a un rôle tout particulier en matière de reporting », précise Timothé Kieffer.

En termes d’organisation, cela se concrétise chez Yves Rocher par une direction RSE qui s’appuie sur trois autres services lesquels sont la direction des ressources humaines, la direction gouvernance et conformité ainsi que la direction finance. En plus d’un travail « en central », la direction RSE assure des liens avec des correspondants RSE implantés par marque, par pays et par métier. « La vision juridique n’intervient qu’en central », précise le directeur de la gouvernance et de la conformité, et « la politique RSE se déploie sur le terrain ».

Ainsi, pas de « juriste RSE » au sein du groupe car il ne s’agit pas « d’une nouvelle matière du droit », selon Guy Gras. « Faire de la RSE, c’est intégrer des contraintes RSE. C’est un prisme mais pas une matière ». Pour fonctionner efficacement, « les directions doivent travailler ensemble » et le juriste intervient pour « validation finale des livrables ».

« Le rapport de durabilité n’est pas un gadget »

Deuxième recommandation : définir un plan stratégique. « La déclaration de performance extra-financière doit être mise en perspective avec la directive CSRD », précise Guy Gras. « Elle oblige un reporting RSE basé sur 42 indicateurs ». Deux solutions en découlent : « soit on prend la liste et on répond à tout, soit on définit une stratégie RSE. »

Pour le groupe Yves Rocher, le travail a été fait sur une matrice de matérialité ayant eu pour objet d’identifier les sujets RSE entre l’entreprise et les parties prenantes. « Cela permet de déterminer les enjeux prioritaires et donc de définir les enjeux RSE », explique le directeur de la gouvernance et de la conformité. De là, un plan stratégique peut être construit.

« Il faut dire aux dirigeants que le rapport de durabilité n’est pas un gadget », alerte Timothé Kieffer. « Les financeurs, les ONG, les enquêteurs et autorités de contrôle vont éplucher ces rapports de durabilité », ajoute-t-il.

Aux juristes donc d’assurer leur rôle et, notamment, de relire tous les éléments pour éviter que l’entreprise soit incriminée.

Caractère vertueux

Malgré un dispositif complexe à mettre en place, établir un rapport de durabilité est non seulement « nécessaire pour le secteur financier » mais aussi « fondamentalement vertueux » pour les entreprises. A ce titre, Timothé Kieffer liste trois avantages :

  • mobiliser les collaborateurs sur des « sujets nobles » et attirer les nouveaux talents ;
  • atteindre des objectifs clairs au regard du business modèle ;
  • éviter les contentieux grâce à « un bon plan de vigilance qui est là pour détecter des risques ».

En tout état de cause, « le juriste doit avoir beaucoup d’humilité » sur les sujets ESG car « l’histoire ne s’arrête pas là et la réglementation est encore en cours de construction », déclarent les deux experts.

Joséphine BONNARDOT, ActuEL Direction Juridique