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22 janvier 2024
Comment réaliser un rapport de durabilité ? La semaine dernière, plusieurs experts se sont rencontrés autour d’une table ronde relative aux enjeux ESG/RSE en entreprise. Voici leurs conseils.

« La CSRD est une révolution juridique et historique », a déclaré Timothé Kieffer, directeur juridique adjoint et directeur de la conformité chez SNCF Réseau, au cours du colloque « Enjeux RSE-ESG pour les entreprises » organisé par l’AFJE, le Cercle Montesquieu et l’ACE le 18 janvier dernier. Ainsi, les entreprises doivent « choisir ce qui est stratégique et ce qui ne l’est pas » et « prouver » que leur conduite est durable.

« Embarquer les dirigeants »

Premier conseil pour les juristes : impliquer tous les acteurs concernés. « L’erreur à ne pas commettre est de confier ce sujet à une seule direction », estime Timothé Kieffer. « Ce sujet est transversal et nécessite le concours de plusieurs équipes » et notamment les RH, les achats, la communication, les relations investisseurs, la durabilité, la conformité, la direction juridique, etc.

Même constat pour Olivier Catherine, secrétaire général et membre du comité exécutif de Sonepar. Selon lui, la transposition de la directive est un défi qui « transforme radicalement l’entreprise et la fonction de son siège tant les sujets sont pluridisciplinaires ».

Ainsi, « il faut embarquer les dirigeants sur ce sujet ». Pour Timothé Kieffer, c’est même un préalable avant de maîtriser ce qui doit être inscrit dans le rapport de durabilité.

Méthodologie

Deuxième conseil : privilégier la qualité. Le reporting doit s’appuyer sur des éléments factuels et objectifs ainsi que sur des indicateurs fiables. Chez Sonepar par exemple, presque 2000 KPIs ont été parcourus pour déterminer ce qui était le plus significatif.

Pour mener à bien cette mission, la cartographie prescrite par la loi sur le devoir de vigilance doit être un soutien. « Nous avons prévu de fusionner nos cartographies des risques pour qu’elles se parlent entre elles car elles sont liées entre le reporting financier et extrafinancier », déclare Olivier Catherine.

Pour Charlotte Michon, avocate spécialisée sur le devoir de vigilance, la décision du 5 décembre 2023 rendue par le tribunal judiciaire de Paris rappelle également aux entreprises qu’elles ont besoin de convaincre. Cela signifie notamment qu’elles ne doivent pas « donner les informations les plus chiffrées mais expliquer les choix qui ont été faits ». Selon elle, « le juge attend plus de choses sur la méthodologie et sur le rapport risque brut/risque net ».  

« La RSE ne se fond pas dans la compliance »

Troisième conseil : ne pas se limiter à l’approche compliance. Pour Timothé Kiefer, « le dispositif anticorruption est une colonne vertébrale » dont la méthode peut être suivie avec la directive CSRD. Toutefois, « la RSE ne va pas se fondre dans la compliance car elle est bien plus large ». Même approche pour Todd Ptak, head of sustainability chez Airbus, qui considère que la durabilité nécessite de focaliser sur les risques générés par l’entreprise et non pas simplement sur les risques pour l’entreprise.

Quel rôle alors pour le juriste ? Avant tout, il doit être « gestionnaire de risque du projet », considère Todd Ptak. De plus, « les textes étant de plus en plus nombreux et ardus », il doit les conjuguer entre eux. Pour les entreprises, cela suppose de recruter « de bons juristes ingénieux », conclut Timothé Kieffer.

Joséphine BONNARDOT, ActuEL Direction Juridique