Actualité
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28 juillet 2023
Pour la première fois à notre connaissance, la chambre sociale de la Cour de cassation décide que, le délai minimal d’envoi de l’ordre du jour des réunions du CSE étant institué dans l’intérêt des membres de l’institution, l’employeur ne peut pas s’en prévaloir.
Réunions du CSE : l’employeur ne peut pas se prévaloir du délai minimal d’envoi de l’ordre du jour
©Gettyimages

L’ordre du jour des réunions du CSE est communiqué par le président aux membres du comité, à l’agent de contrôle de l’inspection du travail ainsi qu’à l’agent des services de prévention des organismes de sécurité sociale 3 jours au moins avant la réunion (C. trav. art. L 2315-30).

A noter :

L’inobservation de ce délai caractérise le délit d’entrave (Cass. crim. 25-10-1994 n° 93-85.802), sauf en cas d’urgence (Cass. crim. 11-6-1974 n° 73-93.299 P ; Cass. soc. 2-3-2004 no 02-16.554 FS-PBRI).

Pour sa part, le juge administratif considère que l'avis du comité est régulièrement émis si la méconnaissance de ce délai ne l'a pas empêché de se prononcer en connaissance de cause (CE 27-6-1986 n° 61506).

En l’espèce, un GIE envisageait de procéder à d’importantes modifications de son organisation. Son CSE avait été convoqué à une première réunion d’information sur le projet, les documents d’information afférents à celui-ci et à ses conséquences ayant été joints à la convocation et à l’ordre du jour. Une quinzaine de jours plus tard, le secrétaire du CSE avait sollicité, 4 jours avant la réunion, l’inscription à l’ordre du jour du vote d’une résolution sur un droit d’alerte économique. Arguant du non-respect du délai de 5 jours prévu par l’accord collectif d’entreprise relatif à la mise en œuvre du CSE pour l’inscription d’un point à l’ordre du jour, le président du comité avait refusé l’inscription d’un vote sur le droit d’alerte économique, ce qui n’avait pas empêché les élus de voter en sa faveur.

Le GIE avait saisi la formation des référés du tribunal judiciaire en contestation de la procédure d’alerte et en annulation de la délibération du comité. Débouté de ses demandes, il s’était pourvu en cassation.

Dans son pourvoi, l’employeur faisait notamment valoir :

- que, les conventions et accords de travail liant tous leurs signataires, ceux-ci peuvent tous se prévaloir de leurs clauses et qu’il en est ainsi de l’employeur s’agissant du délai minimal d’inscription d’une question à l’ordre du jour prévu par accord collectif ;

- qu’il ne résultait ni des articles L 2315-2 et L 2315-30 du Code du travail, ni de l’accord sur la mise en œuvre du CSE que le délai de communication de l’ordre du jour n’a été formulé que dans l’intérêt des membres du CSE, qui pourraient, dès lors, seuls s’en prévaloir.

Le pourvoi de l’employeur est rejeté.

Pour la Cour de cassation, il résulte en effet de l’article L 2315-30 du Code du travail, qui prévoit que l’ordre du jour des réunions du CSE est communiqué par le président aux membres du comité 3 jours au moins avant la réunion, que seuls les membres de la délégation du personnel au CSE peuvent se prévaloir de cette prescription, instaurée dans leur intérêt.

Dès lors que le secrétaire du comité avait demandé au président, en application de l’article L 2315-93, alinéas 1 et 2 du Code du travail, de lui fournir des explications sur la réorganisation affectant de manière préoccupante la situation économique de l’entreprise et d’inscrire le déclenchement de la procédure de droit d’alerte à l’ordre du jour de la prochaine réunion, c’était à tort que le président du comité avait refusé cette inscription, seuls les membres de la délégation du personnel pouvant se prévaloir du non-respect du délai conventionnel, de sorte que l’absence de mention à l’ordre du jour de la réunion du déclenchement de la procédure de droit d’alerte n’était pas un motif d’irrégularité de la délibération du comité.

A noter :

La solution a été rendue dans le cadre de la mise en œuvre du droit d’alerte économique prévu à l’article L 2315-63 du Code du travail, d’ailleurs rappelé par la Cour de cassation dans son dispositif, mais elle devrait revêtir, à notre sens, une portée générale et valoir dans tous les cas où la délégation du comité demande l’inscription d’un point à l’ordre du jour. De la même manière, elle est transposable à l’ordre du jour des réunions du CSE central d’entreprise, qui doit, aux termes de l’article L 2316-17, alinéa 3 du Code du travail, être communiqué 8 jours au moins avant la séance.

En l’espèce, le délai minimal de communication de l’ordre du jour était un délai conventionnel, prévu par accord d’entreprise. Après avoir posé le principe selon lequel il résulte de l’article L 2315-30 du Code du travail que seuls les membres de la délégation du personnel peuvent se prévaloir du délai minimal de communication de l’ordre du jour, principe qui revêt une portée générale, la chambre sociale cite la clause de l’accord d’entreprise, dont la rédaction était « calquée » sur l’article L 2315-30, sauf pour la durée du délai, de 5 jours ouvrables au lieu de 3 jours. Faut-il en conclure que, si cet accord avait stipulé que les deux parties, employeur et salariés, pouvaient se prévaloir du délai minimal de communication de l’ordre du jour, la solution aurait été différente ?

La chambre sociale de la Cour de cassation prend une position identique à celle de la chambre criminelle, qui a jugé – à propos du comité central d’entreprise, mais la décision est transposable au CSE central d’entreprise, au CSE d’établissement et au CSE « tout court » – que le délai de communication de l’ordre du jour est édicté dans l’intérêt des membres du comité, afin de leur permettre d’examiner les questions qui y figurent et d’y réfléchir (Cass. crim. 13-9-2022 n° 21-83.914 F-B : voir notre actualité du 15-3-2023).

Documents et liens associés

Cass. soc. 28-6-2023 n° 22-10.586 F-B, GIE Klesia Adp c/ CSE de l’association de moyens Klesia|

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