Dans cette affaire, la candidate, qui a postulé à la RATP par CV anonymisé, est présélectionnée pour un poste d'animateur agent mobile et convoquée à une journée de test. N'étant pas disponible le jour prévu, elle prend contact avec la RATP afin de convenir d'une nouvelle date. Dans des circonstances non détaillées dans l'arrêt, la RATP lui demande à cette occasion sa date de naissance mais, la salariée n'ayant pas voulu la lui communiquer, elle refuse de la convoquer une nouvelle fois.
L'âge, une donnée sensible ?
La candidate, soutenue par le Défenseur des droits, saisit la justice pour discrimination fondée sur l'âge et relève à ce sujet l'incohérence de la RATP, qui a instauré une Charte de la Diversité garantissant notamment l'anonymat de la phase de sélection des candidatures et affirme veiller « à une pratique professionnelle du recrutement respectueuse de l'égalité des chances de tous dans l'accès à tous ses emplois».
Sa demande est rejetée par les juges du fond qui estiment que la phase d'anonymat a pris fin dès la première convocation de la candidate à une journée de présélection et rappellent qu'il est « d'usage courant » que les entreprises ou les administrations utilisent la donnée de l'âge (dont la collecte n'est pas interdite par la CNIL) pour vérifier l'identité des personnes qui les sollicitent.
Remarque
l'âge n'est pas considéré comme une donnée sensible ne pouvant être collectée ou utilisée par une entreprise ou une organisation sans l'accord exprès des intéressés. Figurent en revanche au rang des données sensibles les opinions politiques, l'appartenance syndicale, les convictions religieuses ou philosophiques ...
Ils précisent par ailleurs que, ne connaissant pas l'âge de l'intéressée, la RATP ne pouvait la discriminer pour ce motif et qu'elle avait en tout état de cause un motif légitime pour demander leur date de naissance aux candidats « au regard des exigences d'âge requises pour l'accès éventuel au statut ». En gage de sa bonne foi, la régie avait d'ailleurs produit un listing des agents récemment embauchés par tranche d'âge, le plus âgé d'entre eux ayant 56 ans. Or, la demandeuse en avait elle-même 57...
Différences de traitement fondées sur l'âge : elles doivent être objectivement et raisonnablement justifiées par un but légitime
L'affaire remonte devant la Cour de cassation, qui rappelle tout d'abord que « des différences de traitement fondées sur l'âge ne constituent pas une discrimination, lorsqu'elles sont objectivement et raisonnablement justifiées par un but légitime, notamment par le souci de préserver la santé ou la sécurité des travailleurs, de favoriser leur insertion professionnelle, d'assurer leur emploi, leur reclassement ou leur indemnisation en cas de perte d'emploi, et lorsque les moyens de réaliser ce but sont nécessaires et appropriés » (C. trav., art. L. 1132-1 et L. 1133-2).
Or, elle constate que les juges du fond ont statué sans établir en quoi le fait que la RATP ait besoin de connaître la date de naissance de la candidate était « objectivement et raisonnablement justifié par un but légitime » et qu'ils n'ont pas non plus démontré que la décision de la RATP d'exclure la candidate du processus de sélection suite à son refus de communiquer cette fameuse date de naissance était « nécessaire et approprié ».
L'arrêt d'appel est cassé et l'affaire renvoyée devant la même Cour d'appel (Paris) autrement composée pour être rejugée sur le fond.