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12 janvier 2023
Relèvement de l’âge légal de départ à 64 ans et accélération du calendrier Touraine qui accroit la durée de cotisation nécessaire pour toucher une pension complète, tels sont les principaux apports de la réforme des retraites. La création d’un index seniors, qui s’imposera aux entreprises, et d'un fonds visant à prévenir la pénibilité est aussi annoncée, de même que l’abandon du transfert du recouvrement des cotisations Agirc-Arrco.

Pour rappel, actuellement un salarié du privé souhaitant partir à la retraite avec une pension complète doit avoir atteint l'âge de départ légal requis (62 ans) et bénéficier d'une durée de cotisation suffisante, durée qui augmente régulièrement depuis la réforme Touraine de 2014 et devait atteindre 43 ans d’ici 2035 pour la génération 1973. La réforme des retraites, qui devrait entrer en vigueur dès le 1er septembre 2023, vient entre autres modifier ces paramètres. Elle prendra la forme d'un projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificatif qui sera présenté en conseil des ministres le 23 janvier, avant d’être examiné par l’Assemblée nationale et le Sénat à partir de début février.

Âge de départ, durée de cotisation et calendrier d’application

L'âge légal de départ est relevé de 62 à 64 ans, à raison de 3 mois de plus par année de naissance à compter du 1er septembre 2023. Il atteindra donc réellement 64 ans en 2030 .

Quant à la durée de cotisation, elle reste fixée pour un taux plein à 43 annuités. Mais le calendrier Touraine est accéléré : ces 43 annuités seront nécessaires dès 2027, soit 8 ans avant le calendrier prévu (ajout d’un trimestre par année et non plus d’un tous les trois ans). Cela provoque une augmentation de la durée d’assurance dès les générations nées à partir de septembre 1961 (v. tableau ci-après).

En revanche, l’âge d’annulation de la décote demeure inchangé. Comme aujourd’hui, les personnes partant à la retraite à 67 ans bénéficieront automatiquement d’une retraite à taux plein, même si elles n’ont pas travaillé 43 ans.

Année de naissance

Age légal (hors départs anticipés)

Durée d'assurance requise avant réforme

Durée d'assurance requise après réforme

Nombre de trimestres supplémentaires demandés

1960

62 ans

167 trimestres

167 trimestres

0

1er janvier - 31 août 1961

62 ans

168 trimestres

168 trimestres

0

1er septembre - 31 décembre 1961

62 ans et 3 mois

168 trimestres

169 trimestres

1

1962

62 ans et 6 mois

168 trimestres

169 trimestres

1

1963

62 ans et 9 mois

168 trimestres

170 trimestres

2

1964

63 ans

169 trimestres

171 trimestres

2

1965

63 ans et 3 mois

169 trimestres

172 trimestres

3

1966

63 ans et 6 mois

169 trimestres

172 trimestres

3

1967

63 ans et 9 mois

170 trimestres

172 trimestres

2

1968

64 ans

170 trimestres

172 trimestres

2

1969

64 ans

170 trimestres

172 trimestres

2

1970

64 ans

171 trimestres

172 trimestres

1

1971

64 ans

171 trimestres

172 trimestres

1

1972

64 ans

171 trimestres

172 trimestres

1

1973

64 ans

172 trimestres

172 trimestres

0

Remarque

plusieurs catégories de personnes continueront toutefois de bénéficier des dispositifs de départ anticipé. C’est le cas des travailleurs en situation de handicap qui pourront toujours partir dès 55 ans s’ils ont validé 132 trimestres. Il ne sera plus nécessaire qu’il y en ait 112 effectivement cotisés. De même, les personnes invalides ou en inaptitude pourront continuer de partir à 62 ans à taux plein, et toute personne ayant eu un accident du travail ou une maladie professionnelle entraînant une incapacité d’au moins 10 % pourra partir 2 ans avant l’âge légal, si cette incapacité est liée à une exposition à des facteurs de pénibilité. La condition de durée d’exposition sera réduite de 17 ans à 5 ans pour justifier de ce lien. Enfin, les travailleurs exposés à l’amiante pourront toujours partir dès 50 ans.

Revalorisation des petites pensions

Le minimum de pension augmentera de 100 € par mois pour les retraites liquidées à compter du 1er septembre 2023, la réforme portant à 85 % du Smic net, soit 1 200 € bruts, la pension minimale des personnes ayant fait une carrière complète au Smic. Cette mesure s’appliquera aux salariés, aux artisans-commerçants ainsi qu’aux agriculteurs, et concernera aussi les pensions minimales des personnes déjà à la retraite.

L’indexation sur le Smic sera inscrite dans la loi afin que le dispositif soit pérenne et, une fois liquidées, les pensions concernées resteront indexées sur l’inflation.

Dans ce même objectif d’augmenter les petites pensions, notamment des femmes ayant eu des carrières hachées, les périodes validées au titre de l’assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF) seront comptabilisées dans le calcul du minimum de pension majoré. Une validation de trimestres sera de même rendue possible pour tous les aidants familiaux contraints de réduire ou d’interrompre leur activité pour s’occuper d’un proche et pour les personnes ayant effectué des stages dits de « travaux d’utilité collective » (TUC).

Modification du dispositif « carrières longues »

Les personnes qui remplissent les conditions actuelles des carrières longues  continueront de partir 2 ans avant l’âge légal, donc à 62 ans lorsque cet âge légal sera à 64 ans. En complément, un nouveau dispositif « carrières très longues » permettra de partir 4 ans avant l’âge légal, c’est-à-dire à partir de 60 ans, à la condition d’avoir validé 5 trimestres avant 18 ans et d’avoir cotisé 44 ans.

Quant au dispositif applicable aux personnes ayant commencé à travailler avant 16 ans, il sera assoupli : elles pourront continuer de partir à compter de 58 ans, sous réserve d’avoir cotisé la durée d’assurance requise majorée d’une année, et non plus de deux années comme aujourd’hui.

Autre nouveauté, notamment à la faveur des femmes : les périodes validées au titre de l’assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF) seront désormais prises en compte dans la durée travaillée pour partir au titre des carrières longues, dans la limite de 4 trimestres.

Prise en compte de la pénibilité et de l’usure professionnelle

Dans le volet « prévenir l’usure professionnelle », de nombreuses mesures ont été annoncées :

  • un accès élargi au compte professionnel de prévention (C2P). Les seuils des principaux facteurs d’exposition aux risques professionnels seront abaissés, comme celui sur le travail de nuit (100 nuits par an au lieu de 120) et celui du travail de nuit en équipes successives alternantes (30 nuits par an au lieu de 50), ce qui fera entrer davantage de salariés dans le dispositif. Les points seront acquis plus rapidement pour les salariés exposés à plusieurs risques et sans limite de nombre (plafond de 100 points actuellement) ; un point au C2P ouvrira un droit de 500 € de financement de formation, contre 375 € aujourd’hui.
  • la création d’un droit à la reconversion pour faciliter les changements de carrière des bénéficiaires du C2P. 60 points acquis sur le compte permettront ainsi de financer une formation longue et qualifiante de 30 000 €.
  • un nouveau fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle, doté d’un milliard d’euros sur la durée du quinquennat. Créé à destination de salariés exerçant les métiers les plus exposés aux facteurs de risques ergonomiques, il financera des actions de sensibilisation, de prévention et de reconversion. Ces salariés bénéficieront par ailleurs d’un suivi renforcé de la médecine du travail à compter de la visite médicale de mi-carrière qui intervient aux 45 ans, mais aussi de dispositifs d’adaptation du poste de travail et d’un accès renforcé à la reconversion professionnelle.
  • une visite médicale de fin de carrière pour les salariés les plus exposés aux risques d’usure professionnelle. Elle sera rendue obligatoire à 61 ans pour permettre un départ anticipé à tous ceux qui ne sont pas en mesure de continuer à travailler et sont ainsi reconnus inaptes au travail.

Mesures en faveur de l’emploi des seniors

Pour que la réforme produise les effets escomptés, le taux d’emploi des seniors (56,1 % des 55-64 ans actuellement) doit augmenter. Partant de ce constat, il est annoncé que les transitions entre l’activité et la retraite seront favorisées en facilitant l’accès à la retraite progressive et en l’ouvrant à la fonction publique ainsi qu’à l’ensemble des travailleurs indépendants. Notamment, la charge de la preuve sera inversée au bénéfice du salarié et une demande de passage à temps partiel pour accéder à la retraite progressive sera autorisée sauf réponse contraire de l’employeur justifiant de l’incompatibilité avec l’activité économique. Dans la même optique, le cumul emploi-retraites deviendra créateur de droits et ses conditions d’exercice seront déplafonnées.

Un index senior sera créé, avec une obligation de publication pour les entreprises de plus de 1 000 salariés dès 2023, et celles de plus de 300 salariés dès 2024. A défaut, elles se verront infliger des sanctions financières. L’emploi des seniors deviendra aussi un objet obligatoire de la négociation sur la gestion des emplois et des parcours professionnels (GEPP) en s’appuyant sur les indicateurs de l’index.

Une négociation sera par ailleurs ouverte dès 2023 avec les partenaires sociaux pour mettre en place le compte épargne-temps universel (CETU), avec pour but notamment de permettre à tous les actifs de mettre de côté leurs RTT ou jours de congés non pris dans l’année pour pouvoir choisir, plus tard, d’aménager leur temps de travail.

Fermeture des régimes spéciaux

La réforme acte la fermeture des régimes spéciaux de retraite de la RATP, de la branche des industries électriques et gazières (IEG), des clercs et employés de notaires, des personnels de la banque de France ainsi que des membres du Conseil économique social et environnemental (CESE). Néanmoins, seuls les nouveaux embauchés recrutés à compter du 1er septembre 2023 dans ces régimes, à l’image de ce qui avait été retenu pour la fermeture du régime spécial de la SNCF, seront affiliés au régime général.

Les régimes autonomes (professions libérales et avocats, marins, Opéra de Paris, Comédie Française) ne seront pas concernés par cette fermeture.

Le décalage progressif de deux ans de l’âge légal et l’accélération du passage à 43 annuités pour un départ à taux plein s’appliqueront aux salariés actuels en tenant compte de leurs spécificités. En conséquence, les dispositions à cette fin seront prises par décret au premier semestre 2023 après consultation des régimes concernés, pour une entrée en vigueur des nouvelles règles relatives à l’âge de départ en 2025.

Changements importants sur l’acquisition des congés payés en cas de maladie ou d'accident

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Elise DRUTINUS
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