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26 juillet 2022
Dès lors que le salarié a été admis à l’Acaata et qu’il a démissionné, l’employeur est tenu de lui verser une indemnité de cessation d’activité. Son montant doit être calculé en tenant compte des dispositions les plus favorables par rapport aux départs à la retraite « classiques ».
Préretraite amiante : quelle indemnité de rupture à la charge de l’employeur ?
©Gettyimages

Le bénéfice de l’Acaata ouvre droit à l’indemnité de départ

Le salarié qui remplit les conditions d’attribution de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l’amiante (Acaata) et qui souhaite partir en préretraite doit présenter sa démission à son employeur. Cette rupture du contrat de travail à son initiative lui ouvre droit au versement par l’employeur d’une indemnité de cessation d’activité (Loi 98-1194 du 23-12-1998 art. 41, V, al. 1).

Dans l’affaire examinée par la chambre sociale de la Cour de cassation, des salariés avaient été admis au bénéfice de l’Acaata par une caisse régionale d’assurance maladie et avaient présenté leur démission à leur employeur mais ce dernier avait refusé de leur verser une indemnité de cessation d’activité.

Condamné en première instance puis en appel, l’employeur, soutenait, à l’appui de son pourvoi, qu’il appartient au juge prud’homal, devant lequel est revendiqué le bénéfice de cette indemnité de cessation d’activité, de vérifier que le salarié remplissait les conditions prévues par l’article 41 de la loi 98-1194 du 23 décembre 1998, sans être lié par la décision de la caisse régionale d’assurance maladie d’attribuer au salarié l’allocation de cessation anticipée d’activité. Ainsi, selon lui, les juges du fond auraient dû vérifier, en l’espèce, si le salarié avait bien travaillé dans un établissement de fabrication de matériaux contenant de l’amiante ou un établissement de flocage et de calorifugeage à l’amiante figurant sur une liste établie par arrêté ministériel.

Les juges du fond auraient par ailleurs, selon l’employeur, inversé la charge de la preuve : ce serait au salarié qu’il incombe d’établir qu’il remplit ces conditions. Or, d’après l’employeur, les salariés avaient travaillé dans un établissement juridiquement distinct de celui inscrit par arrêté ministériel sur la liste de ceux ouvrant droit au bénéfice de l’Acaata et il n’était pas démontré que ces établissements constituaient en réalité un seul et même établissement.

La Cour de cassation rejette toute cette analyse : dès lors que les salariés ont été admis au bénéfice de l’allocation de cessation anticipée d’activité par la caisse régionale d’assurance maladie et ont présenté leur démission, la rupture de leur contrat de travail leur ouvre droit au versement d’une indemnité de cessation d’activité.

Il n’y a donc pas de preuve à rapporter, le bénéfice de l’Acaata emportant automatiquement droit à l’indemnité de cessation anticipée d’activité.

A notre avis :

Les arguments de l’employeur avaient peu de chance de prospérer dans la mesure où il n’a pas de droit de regard sur la décision d’attribution de la préretraite.

Cette indemnité doit au moins être égale à l’indemnité de départ en retraite

L’indemnité de cessation anticipée d’activité des bénéficiaires de la préretraite amiante doit être d’un montant égal à celui de l’indemnité de départ en retraite prévue à l’article L 1237-9 du Code du travail sur la base de l’ancienneté acquise au moment de la rupture du contrat de travail. Si des dispositions plus favorables sont prévues par une convention ou un accord collectif de travail ou par le contrat de travail, elles doivent être appliquées (Loi 98-1194 du 23-12-1998 art. 41, V, al. 1).

Mais que se passe-t-il lorsqu’il existe différents accords collectifs, l’un propre aux indemnités de départs en préretraite amiante et un autre applicable à tous les départs à la retraite à l’initiative du salarié ?

En se fondant sur le principe « specialia generalibus derogant » (la règle spéciale déroge à la règle générale), l’employeur soutenait que l’éventuelle indemnité devait être calculée en tenant compte des seules dispositions prévues par l’accord de groupe relatif à l’indemnité de départ en préretraite amiante, sans qu’on puisse lui imposer de respecter, celles, plus générales de l’accord de groupe de gestion prévisionnelle des emplois et des âges (GPEA) applicables à tous les départs à la retraite à l’initiative du salarié.

Là encore, la Haute Juridiction écarte l’argument : dès lors que les dispositions de l’accord de groupe applicable à tous les départs à la retraite étaient plus favorables aux salariés que celles prévues par l’accord de groupe spécifique à l’indemnité de préretraite amiante, leur application devait prévaloir.

A noter :

En l’espèce, deux accords de groupe coexistaient mais la solution nous paraît transposable aux cas de coexistence d’autres sources conventionnelles, par exemple, une convention de branche et un accord d’entreprise.

Notons que, dans la même veine, la Cour de cassation avait déjà eu l’occasion de préciser que les dispositions conventionnelles plus favorables auxquelles renvoie l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, pour le calcul de l'indemnité de cessation d'activité versée au salarié bénéficiant d'une préretraite amiante, sont celles qui déterminent le montant de cette indemnité et non celles qui définissent les conditions de son attribution L'employeur est donc tenu d’appliquer les modalités de calcul plus favorables  prévues par un accord collectif pour le bénéfice de l'indemnité de départ à la retraite, même si le salarié ne remplit pas la condition d’âge prévue par l’accord. Peu importe qu’il existe un autre accord collectif, spécifique aux préretraite amiante, dès lors qu’il lui est moins favorable (Cass. soc. 13-1-2009 n° 07-42.346 FS-PB: RJS 3/09 n° 271).

Ces solutions ne sont guère surprenantes, l’idée étant de ne pas défavoriser les travailleurs de l'amiante et de leur accorder, en cas de préretraite, une indemnité au moins égale à celle qu’ils auraient perçue, dans le cadre d’un départ à la retraite, s’ils avaient poursuivi leur activité.

Documents et liens associés

Cass. soc. 22-6-2022 no 21-11.325 FS-B, Sté Alstom transport c/ Y.

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