Un salarié, engagé en en 2012 en qualité de "Global key account manager" (responsable monde grands comptes), est licencié en 2015. L’intéressé saisit les prud’hommes, devant qui il fait notamment valoir un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité en raison de sa charge de travail excessive et réclame à ce titre le paiement de dommages et intérêts.
Sous prétexte que l’intéressé ne démontrait pas un "rythme de travail important" et que sa responsable lui avait à deux reprises expressément proposé de l’aide pour son activité au cas où il ne serait pas en mesure d'assurer certaines tâches, la cour d’appel rejette la demande.
D’après les juges, si la responsable lui avait effectivement adressé de nombreux mails pour lui demander d'accomplir des tâches, les délais impartis lors des demandes initiales étaient raisonnables. Et "si les messages étaient adressés à des horaires tardifs ou lors des fins de semaine, ils correspondaient au rythme de travail de sa supérieure hiérarchique et n'appelaient pas de réponse immédiate". De plus, l’employeur qui a assuré le suivi médical du salarié, n'avait pas été destinataire d'une information particulière de la médecine du travail.
D’où, pour la cour d’appel, "l'absence de manquement imputable à l'employeur".
La Cour de cassation ne voit pas les choses ainsi.
En effet, "l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité envers les salariés, doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Il ne méconnaît pas cette obligation légale s'il justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.
Remarque
l’article L. 4121-1 prévoit notamment que les mesures à prendre pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs comprennent des actions d'information et de formation et "la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés". L’article L. 4121-2 est quant à lui celui qui liste les neufs principes de prévention qui servent à guider l’employeur dans l’élaboration et la mise en œuvre de sa politique de prévention.
Or, comme cela avait été constaté, "contrairement à ce qu'il soutenait, l'employeur ne justifiait pas avoir mis en œuvre des entretiens annuels au cours desquels étaient évoquées la charge de travail du salarié et son adéquation avec sa vie personnelle". De ce fait, il y avait donc bien eu un manquement de sa part à l’obligation de sécurité.
Remarque
en cas d’accident du travail, une charge de travail excessive peut faire partie des éléments pris en compte pour caractériser une faute inexcusable de l’employeur (Cass. 2e civ., 19 sept. 2013, n° 12-22.156). En dehors de tout AT, elle peut caractériser un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité et justifier une prise d’acte de rupture du contrat par le salarié (par exemple, Cass. soc., 7 juill. 2016, n° 15-10.546). Dans cette affaire, bien qu’alerté à plusieurs reprises par le salarié sur sa charge de travail et sur son état d’anxiété, l’employeur n’avait apporté aucune réponse à l’intéressé et n’a pris aucune mesure de nature à améliorer ses conditions de travail.