Actualité
5 min de lecture
1 décembre 2023
Qui est concerné par la suspension temporaire du repos hebdomadaire prévue à l’occasion des jeux olympiques de 2024 ? Quelle procédure doit être respectée ? Dans un questions-réponses du 30 novembre, le ministère du Travail vient détailler les conditions de cette mesure.

Selon le code du travail, il est interdit de faire travailler un salarié plus de 6 jours par semaine (article L. 3132-1), un repos d’une durée minimale de 24 heures consécutives doit lui être accordé (article L. 3132-2), et, dans son intérêt, ce repos hebdomadaire est donné le dimanche (article L. 3132-3). « Cependant, compte tenu de l’accroissement attendu des activités liées à l’organisation des jeux olympiques et paralympiques, des impératifs liés au bon déroulement des jeux et à la nécessité de disposer de compétences indispensables à leur tenue, certains établissements connaissant un surcroît extraordinaire de travail et intervenant directement et de façon essentielle dans l’organisation des jeux peuvent suspendre le repos hebdomadaire de façon temporaire en application de l’article L. 3132-5 du code du travail ». Cela a donc été acté par un décret du 23 novembre : en plus de la dérogation temporaire au repos dominical lors des JO, une suspension du repos hebdomadaire sera possible pour la période comprise entre le 18 juillet et le 14 août 2024. Si le décret posait le principe, des précisions étaient attendues sur les modalités pratiques de cette suspension. C’est désormais chose faite via un questions-réponses publié le 30 novembre… qui laisse toutefois encore planer quelques incertitudes.

Remarque

une première zone d’ombre réside dans le fait que le questions-réponses vise à la fois les jeux olympiques et paralympiques, alors que le décret ne concernait que les premiers. De fait, la période du 18 juillet au 24 août semble incohérente, les jeux paralympiques ne débutant que le 28 août.

Quel champ d’application pour la suspension ?

« Tous les acteurs liés à l’organisation des jeux olympiques et paralympiques ne peuvent suspendre le repos hebdomadaire de leurs salariés en application du décret n° 2023-1078 du 23 novembre 2023 ». Sont ainsi uniquement concernés les établissements connaissant un surcroît extraordinaire de travail dans la réalisation d’activités essentielles au bon déroulement et au succès de ces jeux. Plus précisément, il s’agit exclusivement des activités liées :

  • à la captation, la transmission, la diffusion et la retransmission des compétitions (salariés employés directement par la filiale du comité international olympique (CIO) dédiée à ces activités ou par les entreprises de médias et d’agences événementielles techniques mobilisés par Olympic broadcasting services (OBS)).
  • à l’organisation des épreuves et au fonctionnement des sites liés à l’organisation et au déroulement des jeux olympiques et paralympiques (structures intervenant dans l’organisation des compétitions sportives et/ou la gestion des sites, les prestations d’hospitalités ou de livraison des événements, les expertises de traitement des données de chronométrage ou d’affichage sur écrans géants temporaires, l’accompagnement et l’encadrement des athlètes et de la famille olympique).

En ce qui concerne ces « sites liés à l’organisation et au déroulement des jeux », une liste sera fixée par arrêté conjoint des ministres chargés de l’environnement et des sports.

Quelle procédure de mise en œuvre ?

Conformément à l’article R. 3172-7 du code du travail, la possibilité de suspendre le repos hebdomadaire sur le fondement de l’article L. 3132-5 ne relève pas d’une décision prise par une autorité administrative, l’employeur la met en œuvre sous sa seule responsabilité. Il doit alors informer immédiatement l'inspection du travail territorialement compétente et ce, sauf cas de force majeure, avant le commencement du travail. Cette information doit contenir les circonstances qui justifient la suspension, la date et la durée de cette suspension, le nombre de salariés auxquels elle s'applique, ainsi que les 2 jours de repos mensuels réservés aux salariés.

Remarque

là aussi une incertitude persiste. L’article L. 3132-5 énonce que le repos hebdomadaire des salariés peut être suspendu 2 fois au plus par mois. La période visée par le décret étant de 5 semaines et 2 jours, faut-il proratiser ?

Le questions-réponses ajoute que « l’obligation d’information de l’inspection du travail dans le cadre de la mise en œuvre de la suspension du repos hebdomadaire fera l’objet d’un suivi particulier ». Des demandes de remontées d’informations seront ainsi prévues afin d’assurer une veille régulière sur la mise en œuvre de ce dispositif.

Quelles sont les garanties octroyées au salarié en cas de suspension du repos hebdomadaire ?

Tout d’abord, le ministère insiste, « en aucune manière la possibilité de suspendre le repos hebdomadaire ne permet à l’employeur de s’affranchir des règles de droit commun en matière de durée du travail ». Les salariés concernés ont donc droit au respect du repos quotidien et des durées maximales de travail quotidiennes et hebdomadaires.

Par ailleurs, la possibilité de suspendre le repos hebdomadaire au titre du décret du 23 novembre suppose le respect de 2 types de garanties pour le salarié :

  • les heures ainsi réalisées doivent être considérées comme des heures supplémentaires et donc traitées comme telles en matière de contrepartie financière et/ou en repos (C. trav., art. L. 3121-28), le ministère rappelant à cette occasion les règles applicables concernant le taux de majoration des heures supplémentaires ;
  • un repos compensateur au moins égal à la durée du repos suspendu est accordé « le plus rapidement possible après le 14 aout 2024 ».

Exemple

M. X a son repos hebdomadaire suspendu et travaille 8 heures supplémentaires le jour où il est habituellement en repos hebdomadaire. L’accord d’entreprise qui lui est applicable prévoit que la réalisation d’heures supplémentaires ouvre droit à contrepartie sous forme d’un repos compensateur majoré à hauteur de 25 %. En conséquence, M. X devra se voir attribuer un premier repos compensateur, au titre des heures supplémentaires réalisées, d’une durée de 10 heures (correspondant à 8 h majorées à hauteur de 25 %), et un second repos compensateur d’une durée de 8 heures.

Une suspension qui « ne doit être mise en œuvre que de façon exceptionnelle »

Le ministère est très clair, « les employeurs concernés par cette mesure ne doivent mettre en œuvre la possibilité de suspendre le repos hebdomadaire qu’en dernier recours. Tout autre mode d’organisation doit ainsi être privilégié, la suspension du repos hebdomadaire ne devant intervenir que de façon limitée et marginale ». Il invite donc les employeurs à organiser le recrutement et l’emploi du temps de leurs salariés de manière à garantir leur repos hebdomadaire, l’utilisation de la dérogation ne pouvant s’envisager que si toute autre forme d’organisation n’apparaît pas mobilisable. Il rappelle à ce titre que les établissements bénéficiant d’une dérogation au repos dominical peuvent d’ores et déjà employer un salarié jusqu’à 12 jours consécutifs et que la privation du repos hebdomadaire ne doit intervenir qu’une fois épuisée cette possibilité.

Quelles sanctions en cas de manquements dans la mise en œuvre de cette dérogation ?

Si l’employeur ne peut justifier son recours à la suspension, l’absence de respect de la durée minimale du repos hebdomadaire, des dispositions relatives aux dérogations ainsi que l’emploi d’un salarié plus de 6 jours par semaine peuvent faire l’objet d’une contravention de 5ème classe (C. trav., art. R. 3135-2). Une sanction administrative est aussi encourue s’agissant du non-respect de la durée minimale de repos hebdomadaire.

Par ailleurs, le code du travail prévoit des sanctions pénales (également une contravention de 5ème classe) en cas de manquement aux obligations en matière de contrôle du repos hebdomadaire et d’information de l’agent de contrôle de l’inspection du travail (C. trav., art. R. 3135-6).

A noter que ces contraventions donnent lieu à autant d’amendes qu’il y a de salariés illégalement employés.

Changements importants sur l’acquisition des congés payés en cas de maladie ou d'accident

Une véritable révolution jurisprudentielle : tout arrêt de travail pour maladie ou accident ouvre droit à congés, la prescription ne court pas si l’employeur est défaillant et les congés non pris avant un congé parental sont conservés. Modification du régime des congés payés : découvrez gratuitement l’analyse de notre rédaction dans Navis Social.

Elise DRUTINUS
Documents et liens associés
Aller plus loin
actuEL RH - Le journal en ligne dédié à votre métier
Chaque matin, en 5 minutes, faites le point sur l’actualité sociale, juridique et managériale qui impacte les ressources humaines.
à partir de 75.83€ HT/mois

actuEL RH - Le journal en ligne dédié à votre métier