Un associé, cogérant d'une société civile immobilière (SCI), demande le prononcé de la nullité de la vente d'un immeuble de la société, consentie par un autre gérant. Ce dernier conteste cette demande au motif que l'objet social de la SCI, comprenant toutes opérations immobilières civiles se rattachant à la propriété des immeubles, implique le droit d'en disposer, caractéristique du droit de propriété, sauf à ce que les statuts excluent expressément une telle cession, ce qui n'était pas le cas en l'espèce.
Les juges prononcent néanmoins la nullité de cette cession, la décision de vendre un immeuble ne figurant pas dans l'objet social et excédant donc les pouvoirs du gérant.
Ils observent que la clause des statuts concernant l'objet social comprenait : "L'acquisition, la propriété, l'administration, l'exploitation de tous biens mobiliers ou immobiliers, la prise à bail à construction de tous immeubles en vue de la location, ainsi que toutes opérations juridiques, administratives, financières et de gestion, à caractère mobilier ou immobilier concernant directement ou indirectement la réalisation de l'objet social, pourvu que ces opérations ne modifient pas le caractère civil de la société."
Ils observent également qu'une telle clause n'inscrivant pas dans l'objet social la vente de biens immobiliers, la cession d'immeubles de la société excédait les pouvoirs du gérant et ne pouvait être décidée qu'à l'unanimité des associés. Ils prononcent la nullité de cette vente, consentie par le cogérant.
Les juges du fond ayant ainsi légalement motivé leur décision, le pourvoi est rejeté.
Remarque
cette décision est fondée sur le principe selon lequel le gérant d'une société civile ne l'engage que par des actes qui entrent dans l'objet social (C. civ., art. 1849, al. 1). Elle illustre le caractère fluctuant de la jurisprudence de la troisième chambre civile dans l’interprétation des clauses de statuts de SCI relatives à leur objet social, certains arrêts étant dans le sens de la solution rendue (Cass. 3e civ., 6 sept. 2011, n° 10-21.815 ; Cass. 3e civ., 5 nov. 2020, n° 19-21.214), alors que d’autres considèrent que la mention du terme « propriété » implique le droit de disposer des biens visés (Cass. 3e civ., 18 déc. 2001, n° 00-16.530 ; Cass. 3e civ., 11 mai 2022, n° 21-15.387). Pour éviter d’être confronté au fort aléa judiciaire qui prévaut en la matière, il convient de prévoir expressément dans les statuts si la vente des immeubles sociaux entre ou non dans l’objet social.