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10 octobre 2024
Le franchiseur qui ne met pas en garde son franchisé sur le caractère très optimiste des comptes prévisionnels établis par celui-ci ne commet pas un dol dès lors que les informations qu'il lui a transmises sont sérieuses et que le franchisé est expérimenté.
Le franchiseur commet-il un dol en n'alertant pas le franchisé sur un prévisionnel trop optimiste ?
©Getty Images

Après avoir adhéré à un réseau de franchise de location automobile, un franchisé constate que ses résultats des deux premières années sont très inférieurs aux comptes prévisionnels qu’il a établis sur la base du document d’information précontractuelle (DIP) fourni par le franchiseur. Estimant que ce dernier aurait dû, lorsqu’il a reçu ce prévisionnel, en vérifier le sérieux et l’avertir s’il était irréaliste, le franchisé demande l’annulation du contrat de franchise pour dol du franchiseur.

Demande rejetée. En effet, il résultait des éléments suivants que les données communiquées par le franchiseur pour que le franchisé établisse ses comptes prévisionnels présentaient un caractère sérieux et que le franchisé disposait des compétences et des informations nécessaires pour établir ces comptes en connaissance de cause, de sorte que l'absence de réaction du franchiseur à la transmission du budget prévisionnel du franchisé n'était pas constitutive d'un dol :

- il n'était pas justifié du caractère trompeur des informations communiquées par le franchiseur quant au chiffre d'affaires mensuel moyen par véhicule des franchisés ; si le franchiseur avait par ailleurs communiqué au franchisé un business plan et un « tableau patrimoine », il ne lui avait pas transmis de budget prévisionnel, mais une « matrice » destinée à accompagner le futur franchisé dans la construction de son prévisionnel ; ce compte prévisionnel avait été élaboré par le franchisé puis transmis au franchiseur ; l’indication dans le DIP que le franchiseur ferait ses efforts pour assister le franchisé dans l'élaboration de ce prévisionnel et lui apporterait son assistance indiquait bien que cette élaboration revenait au franchisé ;

- il ne pouvait pas être déduit de l'écart entre les évaluations du prévisionnel ou annoncées au DIP et les résultats obtenus par le franchisé que les informations transmises par le franchiseur étaient irréalistes ; le franchiseur justifiait que les chiffres d'affaires annoncés dans son DIP avaient été atteints par plusieurs franchisés ;

- le franchisé, une société dont le dirigeant était un entrepreneur expérimenté dans le domaine de l'automobile et connaissant déjà le marché local, avait été informé par le franchiseur de la récente déconfiture d’un franchisé du département ; il avait fait le choix délibéré de retenir dans son prévisionnel un chiffre d'affaires par véhicule supérieur aux valeurs moyennes figurant dans le DIP, bien qu'il s'agisse de la création d'une agence franchisée, anticipant des synergies avec les autres activités de son dirigeant.

A noter :

Les articles L 330-3 et R 330-1 du Code de commerce qui fixent le contenu du DIP n'imposent pas au franchiseur de transmettre des comptes d'exploitation prévisionnels au franchisé : ce dernier doit les établir lui-même, avec l'aide de son expert-comptable. Le franchiseur n'encourt donc ni responsabilité ni la nullité du contrat si les comptes prévisionnels du franchisé sont trop optimistes (Cass. com. 7-3-2018 n° 16-25.654 F-D).

Mais si le franchiseur prend l'initiative de fournir au franchisé des comptes prévisionnels, ceux-ci doivent être sincères et sérieux (Cass. com. 31-1-2012 n° 11-10.834 F-D : RJDA 8-9/12 n° 763 ; Cass. com. 10-6-2020 n° 18-21.536 F-D : RJDA 8-9/20 n° 417 ; Cass. com. 1-12-2021 n° 18-26.572 F-D : RJDA 5/22 n° 243). Il en est de même lorsque le franchiseur fournit les éléments permettant au franchisé de réaliser les comptes prévisionnels (Cass. com. 10-2-2021 n° 18-25.474 F-D : RJDA 7/21 n° 464). A défaut, le contrat de franchise peut être annulé pour dol ou erreur si les informations communiquées par le franchiseur au franchisé ont été déterminantes du consentement de ce dernier (C. civ. art. 1130).

Document et liens associés :

Cass. com. 26-6-2024 n° 23-11.499 F-D

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