Une SCI donne en location des locaux commerciaux et obtient une garantie bancaire à première demande du paiement des loyers. Le locataire ayant cessé de payer les loyers en raison de la fermeture de son commerce pendant la crise sanitaire, la SCI demande alors à la banque de lui régler le montant de la garantie.
Le locataire agit en référé pour qu'il soit interdit à la banque de procéder à ce règlement. Il soutient que la mise en oeuvre de la garantie à première demande méconnaît le dispositif adopté pendant la crise sanitaire pour protéger les locataires affectés par des mesures de police administrative.
La Cour de cassation lui donne raison. L'article 14 de la loi 2020-1379 du 14 novembre 2020 interdit la mise en oeuvre de sûretés réelles et personnelles garantissant le paiement des loyers et des charges afférents aux locaux commerciaux pendant une période courant du 17 octobre 2020 jusqu'à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle l'activité du locataire, éligible à ce dispositif, cesse d'être affectée par une mesure de police administrative. La garantie à première demande constituant une sûreté personnelle (C. civ. art. 2321), sa mise en oeuvre en violation de ces dispositions constitue un trouble manifestement illicite.
A noter :
Pour protéger les locataires touchés par la crise sanitaire, plusieurs textes dérogatoires ont été adoptés ayant pour effet de neutraliser, avec plus ou moins de vigueur, les sanctions encourues en cas de non-paiement des loyers (notamment, Ord. 2020-306 et Ord. 2020-316 du 25-3-2020 pour le premier confinement ; Loi 2020-1379 du 14-11-2020 pour le second).
Le texte ici invoqué par le locataire concernait les loyers dus pour l'occupation de locaux à compter de l'automne 2020 (second confinement). En paralysant en référé le jeu d'une garantie à première demande, la décision commentée montre que, dès lors que le locataire y est éligible, ce dispositif est très efficace pour bloquer toute sanction en cas de défaut de paiement des loyers.
Il n'en reste pas moins que les loyers sont exigibles et que la Haute Juridiction a repoussé tous les arguments de droit commun avancés par les locataires pour échapper au paiement des loyers (Cass. 3e civ. 23-11-2022 n° 21-21.867 FS-B et 22-12.753 FS-B : BRDA 1/23 inf. 15). Ainsi, même si les textes de droit dérogatoire, en paralysant les sanctions et les poursuites, ont offert un sursis aux locataires et leur ont évité des pénalités de retard, ils ne les dispensent pas définitivement du paiement des loyers échus pendant cette période.
Documents et liens associés
Cass. 3e civ. 25-1-2023 n° 22-10.648 FS-B, SCI Togar c/ SARL Boggi
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