Actualité
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28 janvier 2022
Nous avons sélectionné pour vous les arrêts les plus marquants rendus cette semaine par la Cour de cassation.
Une semaine de jurisprudence sociale à la Cour de cassation
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Exécution du contrat

  • Ne constitue pas une discrimination directe en raison des convictions religieuses du salarié la mutation disciplinaire prononcée à son encontre dès lors qu'elle est justifiée par une exigence professionnelle essentielle et déterminante, au sens de l'article 4, § 1, de la directive 2000/78 du Conseil du 27 novembre 2000, au regard, d'une part de la nature et des conditions d'exercice de l'activité de l'intéressé, chef d'équipe dans le secteur de la propreté affecté sur un site pour exécuter ses tâches contractuelles en vertu d'une clause de mobilité légitimement mise en oeuvre par l'employeur, d'autre part du caractère proportionné au but recherché de la mesure, laquelle permettait le maintien de la relation de travail par l'affectation du salarié sur un autre site de nettoyage. En conséquence, le licenciement prononcé en raison du refus de cette mutation n'est pas nul (Cass. soc. 19-1-2022 n° 20-14.014 FS-B).
  • En raison de l'atteinte qu'il porte à la liberté d'expression, en particulier au droit pour les salariés de signaler les conduites ou actes illicites constatés par eux sur leur lieu de travail, le licenciement d'un salarié prononcé pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de faits dont il a eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions et qui, s'ils étaient établis, seraient de nature à caractériser des infractions pénales ou des manquements à des obligations déontologiques prévues par la loi ou le règlement, est frappé de nullité. Est donc nul le licenciement d'un salarié pour avoir relaté des faits dont il avait eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions, et qui, s'ils étaient établis, seraient de nature à caractériser une violation du Code de déontologie de la profession de commissaire aux comptes, et alors que l'employeur ne soutenait pas que l'intéressé aurait eu connaissance de la fausseté des faits qu'il dénonçait, la mauvaise foi de ce dernier n'étant ainsi pas établie (Cass. soc. 19-1-2022 n° 20-10.057 FS-B).
  • Le droit dont la personne dispose sur son image porte sur sa captation, sa conservation, sa reproduction et son utilisation. La seule constatation d'une atteinte au droit à l'image ouvrant droit à réparation, une cour d'appel ne peut pas débouter des salariés de leur demande de dommages-intérêts motivée par le délai mis par l'employeur pour supprimer leur photographie de son site internet au motif qu'ils ne démontrent pas l'existence d'un préjudice (Cass. soc. 19-1-2022 n° 20-12.420 F-D).
  • Ayant constaté que les modifications apportées au règlement intérieur initial, qui avait été soumis à la consultation des institutions représentatives du personnel, résultaient uniquement des injonctions de l'inspection du travail auxquelles l'employeur ne pouvait que se conformer sans qu'il y ait lieu à nouvelle consultation, la cour d'appel ne pouvait pas annuler les sanctions disciplinaires notifiées aux salariés au motif que le règlement intérieur leur serait inopposable (Cass. soc. 19-1-2022 n° 20-12.196 F-D).

Prévoyance

  • Dès lors que seul un accord collectif conclu entre l'employeur et une ou plusieurs organisations syndicales représentatives dans l'entreprise, qui ont vocation à négocier pour l'ensemble des salariés et anciens salariés, pouvait apporter, de façon opposable aux anciens salariés de l'entreprise, des modifications au régime de retraite surcomplémentaire à prestations définies et garanties, les modifications apportées par l'employeur à ce régime mis en place par décision unilatérale sont inopposables à ces derniers même si la procédure de révision des engagements unilatéraux a été respectée (Cass. soc. 19-1-2022 n° 19-23.272 FS-B).

Rupture du contrat

  • Dès lors que l'accident de la circulation visé dans la lettre de licenciement, dont le salarié ne contestait pas la matérialité, était intervenu alors qu'il conduisait sous l'empire d'un état alcoolique son véhicule de fonction, au retour d'un salon professionnel, où il s'était rendu sur instruction de son employeur, les faits reprochés se rattachaient à la vie professionnelle de l'intéressé et pouvaient jusitifier son licenciement pour faute grave (Cass. soc. 19-1-2022 n° 20-19.742 F-D).
  • Dès lors que la société, ayant décidé de procéder à des modifications d'implantation de ses magasins, avait proposé des mutations aux salariés concernés, en application de la clause de mobilité insérée dans leur contrat de travail, et qu'il n'était pas démontré que ces clauses de mobilité aient été mises en oeuvre de mauvaise foi ni que la société faisait face à des difficultés économiques l'ayant conduite à fermer des boutiques en procédant ainsi à des suppressions d'emploi, les licenciements faisant suite au refus des salariés de ce changement d'affectation constituaient des licenciements pour motif personnel et non des licenciements pour motif économique, et la société n'était pas tenue de présenter un plan de sauvegarde de l'emploi (Cass. soc. 19-1-2022 n° 20-15.541 F-D).
  • Lorsqu'elles ont une cause économique et s'inscrivent dans un processus de réduction des effectifs dont elles constituent la ou l'une des modalités, les ruptures conventionnelles doivent être prises en compte pour déterminer la procédure d'information et de consultation des représentants du personnel applicable ainsi que les obligations de l'employeur en matière de plan de sauvegarde de l'emploi. Une cour d'appel ne peut pas débouter un salarié de sa demande de nullité de son licenciement économique pour manquement de l'employeur à son obligation de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi alors qu'elle constate que les nombreuses ruptures conventionnelles intervenues au cours des mois précédant les licenciements étaient intervenues dans un contexte de suppression d'emplois dues à des difficultés économiques et qu'elles s'inscrivaient dans un projet global et concerté de réduction des effectifs au sein de l'entreprise (Cass. soc. 19-1-2022 n° 20-11.962 F-D).

Représentation du personnel

  • Le juge judiciaire ne peut pas, sans violer le principe de séparation des pouvoirs, statuer sur la demande d'un salarié protégé de requalification du contrat de travail à durée déterminée en un contrat de travail à durée indéterminée alors que la rupture d'un contrat à durée déterminée arrivé à son terme a été autorisée par l'inspecteur du travail. Par conséquent, il ne peut pas analyser la rupture de la relation de travail du fait de la survenue du terme du contrat à durée déterminée en un licenciement nul intervenu en violation du statut protecteur (Cass. soc. 19-1-2022 n° 19-18.898 FS-B).
  • La contestation portant sur les résultats des élections, lorsqu'elle est la conséquence d'une contestation du périmètre dans lequel les élections ont eu lieu, lequel n'est pas un élément spécifique au premier tour, est recevable si elle est faite dans les 15 jours suivant la proclamation des résultats des élections (Cass. soc. 19-1-2022 n° 20-17.286 F-B).
  • Selon la jurisprudence constante de la Cour de cassation, ne peuvent exercer un mandat de représentation les salariés qui, soit disposent d'une délégation écrite particulière d'autorité leur permettant d'être assimilés au chef d'entreprise, soit représentent effectivement l'employeur devant les institutions représentatives du personnel ou exercent au niveau de l'entreprise à l'égard des représentants du personnel les obligations relevant exclusivement du chef d'entreprise. Dès lors qu'ils interviennent de façon ponctuelle lors des seules réunions visées à l'article L 2314-3 du Code du travail en matière de santé, de sécurité et des conditions de travail afin d'éclairer les membres du CSE et disposent d'une voix seulement consultative, le responsable du service de sécurité et des conditions de travail, ainsi que l'agent chargé de la sécurité et des conditions de travail, ne représentent pas l'employeur devant les institutions représentatives du personnel. Il en résulte qu'ils sont éligibles au comité social et économique (Cass. soc. 19-1-2022 n° 19-25.982 FS-B).
  • Il ne résulte pas des articles R 2314-8 et R 2314-15 du Code du travail applicables aux élections du CSE que le test du système de vote électronique et la vérification que l'urne électronique est vide, scellée et chiffrée doivent intervenir immédiatement avant l'ouverture du scrutin et l'article L 63, alinéa 3, du Code électoral qui dispose que, dans les bureaux de vote dotés d'une machine à voter, le bureau de vote s'assure publiquement, avant le commencement du scrutin, que la machine fonctionne normalement et que tous les compteurs sont à la graduation zéro n'est pas applicable au vote électronique organisé pour ces élections (Cass. soc. 19-1-2022 n° 20-17.076 FS-B).
  • L'obligation faite à l'expert, de rembourser à l'employeur les sommes qu'il a perçues, en cas d'annulation définitive par le juge de la décision du CHSCT répond, d'une part, aux exigences constitutionnelles de participation des travailleurs à la détermination des conditions de travail ainsi que de protection de la santé des travailleurs, qui découlent des 8e et 11e alinéas du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, en ce qu'elle permet l'exercice par ce comité du droit à expertise nonobstant l'absence de budget propre, et, d'autre part, aux exigences découlant de l'article 16 de la Déclaration de 1789, en ce qu'elle garantit le respect du droit au recours effectif de l'employeur. Elle est proportionnée à ces objectifs et ne méconnaît pas le principe de responsabilité découlant de l'article 4 de la Déclaration de 1789 dans la mesure où elle ne vaut que dans le cas d'annulation définitive de la décision dudit comité et où le comité d'entreprise peut, à tout moment, décider de prendre en charge les frais d'expertise dans les conditions prévues à l'article L 2325-41-1 du Code du travail (Cass. soc. QPC 19-1-2022 n° 21-40.025 FS-B).
  • Toute personne intéressée est recevable à contester le résultat des élections. Lorsque le ministre compétent annule, sur recours hiérarchique, la décision de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement d'un salarié protégé, ou lorsque le juge administratif annule la décision d'autorisation de l'inspecteur du travail ou du ministre compétent, le salarié concerné a le droit, s'il le demande dans un délai de 2 mois à compter de la notification de la décision, d'être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent. Il en résulte que, dès lors que le salarié a demandé sa réintégration dans le délai précité, le contrat de travail se poursuit et le salarié est électeur et éligible aux élections professionnelles. C'est dès lors à bon droit que le tribunal qui a constaté que, par lettre du 14 mai 2019, le salarié avait informé la société qu'il serait susceptible de contester les élections professionnelles, à défaut de faire droit à sa demande de réintégration et de le mettre en mesure de se porter candidat, a jugé que l'action du salarié et du syndicat UNSA Postes fondée sur l'impossibilité pour le salarié, faute de réintégration, d'être électeur et éligible, ne portait pas seulement sur l'électorat mais également sur la régularité des élections (Cass. soc. 19-1-2022 n° 21-10.264 FS-D).
  • Le refus illégal d'un employeur, tenu de réintégrer un salarié protégé en application des dispositions de l'article L 2242-1 du Code du travail, de le réintégrer et, par voie de conséquence, de lui permettre d'être électeur et éligible aux élections professionnelles, constitue une irrégularité qui influence le résultat du scrutin et justifie à elle-seule l'annulation des élections (Cass. soc. 19-1-2022 n° 21-10.264 FS-D).
  • Tout syndicat doit, pour pouvoir exercer des prérogatives dans l'entreprise, satisfaire au critère de transparence financière. Le tribunal, qui a constaté que le syndicat n'a présenté aux débats qu'un compte de résultat publié sur son site, sans présenter ni bilan ni annexe simplifiée, ni aucun autre document permettant d'établir la véracité des comptes, a pu en déduire qu'il ne justifiait pas satisfaire au critère de transparence financière lorsqu'il a procédé aux désignations contestées (Cass. soc. 19-1-2022 n° 20-20.456 F-D).

Contrôle - contentieux

  • La juridiction prud'homale n'est pas compétente pour connaître de la demande incidente formée par un salarié pour obtenir la condamnation du liquidateur de la société qui l'employait à garantir le paiement des sommes fixées au titre des créances salariales, au passif de la liquidation (Cass. soc. 19-1-2022 n° 19-19.313 FS-B).
  • Les dispositions fiscales frappant les revenus sont sans incidence sur les obligations des personnes responsables du dommage et le calcul de l'indemnisation de la victime. Il en résulte que le préjudice économique du salarié au regard de la retraite complémentaire résultant de la minoration de l'assiette des cotisations ne doit pas être calculé en tenant compte de l'incidence fiscale des pensions de retraite complémentaire (Cass. soc. 19-1-2022 n°s 20-21.290 F-D, 20-21.291 F-D et 20-21.292 F-D).
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