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8 juillet 2022
Nous avons sélectionné pour vous les arrêts les plus marquants rendus cette semaine par la Cour de cassation.
Une semaine de jurisprudence sociale à la Cour de cassation
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Exécution du contrat

  • En cas de licenciement d'un salarié à raison de la commission de faits de harcèlement sexuel ou moral, le rapport de l'enquête interne, à laquelle recourt l'employeur, informé de possibles faits de harcèlement dénoncés par des salariés et tenu envers eux d'une obligation de sécurité lui imposant de prendre toutes dispositions nécessaires en vue d'y mettre fin et de sanctionner leur auteur, peut être produit en justice pour justifier la faute imputée au salarié licencié. Il appartient aux juges du fond, dès lors qu'il n'a pas été mené par l'employeur d'investigations illicites, d'en apprécier la valeur probante, au regard le cas échéant des autres éléments de preuve produits par les parties (Cass. soc. 29-6-2022 n° 21-11.437 FS-B).
  • Sauf abus, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression. Le caractère illicite du motif du licenciement prononcé, même en partie, en raison de l'exercice, par le salarié, de sa liberté d'expression, liberté fondamentale, entraîne à lui seul la nullité du licenciement (Cass. soc. 29-6-2022 n° 20-16.060 FS-B).
  • Selon l'article 7.1 de la convention collective nationale des entreprises de propreté et services associés du 26 juillet 2011, qui garantit aux salariés affectés sur un marché la continuité de leur contrat de travail, le transfert n'est prévu que pour les salariés attachés au marché ayant fait l'objet du changement de prestataire pour des travaux effectués dans les mêmes locaux. Il en résulte que le marché dévolu au nouveau prestataire doit avoir le même objet et concerner les mêmes locaux. Dès lors, viole ce texte une cour d'appel qui considère que les conditions de transfert étaient réunies alors qu'elle a constaté que les salons d'accueil d'une société de transport aérien, à l'entretien desquels les salariés étaient affectés, avaient été déplacés au sein d'un terminal aéroportuaire lors du changement de prestataire, de sorte qu'il ne s'agissait pas des mêmes locaux (Cass. soc. 29-6-2022 n° 20-17.021 FS-B et n° 20-17.024 FS-D).

Paie

  • Il appartient à l'employeur de communiquer les éléments nécessaires au calcul de la part de rémunération variable d'un salarié et, lorsqu'il se prétend libéré du paiement de cette part variable, de rapporter la preuve du fait qui a éteint son obligation (Cass. soc. 29-6-2022 n° 20-19.711 FS-B).

Rupture du contrat

  • Il résulte de la convention collective nationale des activités de marchés financiers d'une part, que la faculté, pour le salarié licencié pour faute grave ou lourde, de saisir la commission paritaire ayant uniquement mission de formuler un avis non suspensif sur le caractère « grave » ou « lourd » de la faute invoquée et non de se prononcer sur le principe du licenciement, dans les 15 jours qui suivent la notification de son licenciement, ne constitue pas une garantie de fond et, d'autre part, que les stipulations de la convention collective n'imposent pas à l'employeur d'informer le salarié de sa faculté de saisir la commission paritaire. Doit en conséquence être censuré l'arrêt qui, pour dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, ne constate ni la violation d'une garantie de fond, ni une irrégularité commise dans le déroulement de la procédure disciplinaire prévue par une disposition conventionnelle (Cass. soc. 29-6-2022 n° 20-19.711 FS-B).

Représentation du personnel

  • Le CSE d'établissement est informé et consulté sur toute mesure d'adaptation, relevant de la compétence de ce chef d'établissement et spécifique à cet établissement, des aménagements importants modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail arrêtés au niveau de l'entreprise, dès lors que cette mesure d'adaptation n'est pas commune à plusieurs établissements. D'abord, l'arrêt d’appel relève que le plan de reprise d'activité post-Covid de la société prévoit, premièrement, concernant le « volet sanitaire », des règles applicables en matière de santé et de sécurité communes et homogènes, en précisant les mesures sanitaires générales en matière de déplacement et de transport, la prise en charge des personnes contact, ainsi que les mesures concernant les salariés sur site, à distance, seuls ou en équipe ou en cas de co-activité, deuxièmement, pour les ressources humaines, un retour progressif des équipes à partir du 11 mai sur une période de 4 à 6 semaines, avec « en cible », le « retour physique de la moitié du collectif de travail d'ici le mois de juillet à adapter selon les contraintes d'environnement », troisièmement, l'énonciation du principe d'un rythme de reprise adapté dans le séquencement du plan de relance national et d'une différenciation par territoires (rouge/vert) avec la prise en compte du contexte local de chaque direction ainsi que d'une progressivité accrue appuyée sur le maintien du travail à distance comme un des modes normaux d'activité, quatrièmement, pour la dimension métier, la définition d'un « cadre de cohérence national » avec la nécessité de prioriser les activités par grands métiers (« opérations », « raccordement et ingénierie », « client », « programme Linky »). Ensuite, l'arrêt énonce, d'une part, que le plan de reprise d'activité de la direction régionale Pyrénées et Landes, qui précise qu'il décline sans subsidiarité le projet de reprise d'activité de la société, comporte une présentation du dispositif de reprise d'activité dans l'établissement, qui rappelle les mesures sanitaires et les modalités pour assurer leur respect, ainsi qu'un « planning de retour sur les sites », dont il est indiqué qu'il se fera « conformément à la note d'orientation générale pour la relance des activités du distributeur » et qu'il sera « progressif » et tiendra compte de plusieurs paramètres dont « l'évolution des décisions des pouvoirs publics et le cadrage national d'Enedis contenu dans le PRA », et détaille, de plus, les modalités de reprise des activités en fonction des équipes (« tertiaires », « terrain ») et des métiers en indiquant les spécificités de chacun et en déduisant soit la possibilité d'un retour sur site de manière progressive et dans le respect des mesures sanitaires soit l'exécution du travail à distance, lequel est considéré comme « mode de fonctionnement privilégié ». Il constate, d'autre part, que le document intitulé « Volume prévisionnel d'activités pendant la reprise », établi par la direction régionale Pyrénées et Landes, s'inscrit dans le plan de reprise d'activité de la société. Enfin, l'arrêt ajoute qu'aucun élément ne permet d'établir que le chef d'établissement disposait d'une quelconque marge de manœuvre dans l'exercice de son pouvoir de décision quant aux modalités de la reprise de l'activité au sein de son établissement telles qu'elles avaient été arrêtées au niveau de l'entreprise. En l'état de ces constatations, la cour d'appel a pu retenir que le plan de reprise d'activité de la direction régionale Pyrénées et Landes ne constituait pas une mesure d'adaptation spécifique à cet établissement du plan de reprise d'activité de la société et débouter le CSE d’établissement de sa demande tendant à enjoindre à la société d’engager le processus d’information et de consultation de ce comité (Cass. soc. 29-6-2022 n° 21-11.935 F-L).
  • Aux termes de l'article L 2312-16 du Code du travail, sauf dispositions législatives spéciales, l'accord défini à l'article L 2312-19 et à l'article L 2312-55 ou, en l'absence de délégué syndical, un accord entre l'employeur et le CSE ou, le cas échéant, le CSE central, adopté à la majorité des membres titulaires de la délégation du personnel du comité, ou, à défaut d'accord, un décret en Conseil d'Etat fixe les délais dans lesquels les avis du CSE ou, le cas échéant, du CSE central sont rendus dans le cadre des consultations prévues au présent Code. Ces délais permettent au CSE ou, le cas échéant, au CSE central d'exercer utilement sa compétence, en fonction de la nature et de l'importance des questions qui lui sont soumises. A l'expiration de ces délais ou du délai mentionné à l'article L 2312-15, al. 5, le CSE ou, le cas échéant, le CSE central, est réputé avoir été consulté et avoir rendu un avis négatif. Selon l'article L 2315-91 du même Code, le CSE peut décider de recourir à un expert-comptable dans le cadre de la consultation sur la politique sociale de l'entreprise, les conditions de travail et l'emploi. Selon l'article R 2312-6 du Code du travail, à défaut d'accord, le CSE dispose d'un délai d'un mois, porté à 2 mois en cas d'intervention d'un expert, pour donner un avis motivé dans le cadre d'une consultation faite par l'employeur. Aux termes de l'article R 2315-47 du Code du travail, l'expert remet son rapport au plus tard 15 jours avant l'expiration des délais de consultation du CSE. Il en résulte que les dispositions de l'article R 2312-6 n'ont vocation à s'appliquer qu'en l'absence d'accord collectif de droit commun ou d'un accord entre le CSE et l'employeur fixant d'autres délais que ceux prévus à cet article (Cass. soc. 29-6-2022 n° 21-11.077 FS-B).
  • La décision d'autorisation de licenciement économique du salarié protégé prise par l'inspecteur du travail, à qui il n'appartient pas de rechercher si la cessation d'activité est due à la faute de l'employeur, ne fait pas obstacle à ce que l'intéressé, s'il s'y estime fondé, mette en cause devant les juridictions judiciaires compétentes la responsabilité de l'employeur en demandant réparation des préjudices que lui aurait causés une faute à l'origine de la cessation d'activité, y compris le préjudice résultant de la perte de son emploi (Cass. soc. 29-6-2022 n° 20-23.639 F-D).

Santé-sécurité

  • Lorsque le médecin du travail a mentionné expressément dans son avis d'inaptitude que tout maintien du salarié dans l'emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l'emploi, l'employeur, qui n'est pas tenu de rechercher un reclassement, n'a pas l'obligation de consulter le comité social et économique (Cass. soc. 29-6-2022 n° 21-11.816 F-D).

Contrôle-contentieux

  • Le contrat d'apprentissage conclu par une personne morale de droit public dont le personnel ne relève pas du droit privé est un contrat de droit privé. En conséquence, les litiges nés à propos de la conclusion, de l'exécution, de la rupture ou de l'échéance de ces contrats relèvent de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire. Il en va de même des litiges relatifs à l'indemnisation du chômage consécutif à cette rupture ou à cette échéance, alors même que l'employeur n'a pas adhéré au régime d'assurance chômage. Tel est également le cas si le salarié, titulaire du contrat d'apprentissage, a antérieurement, au cours de la période de référence d'affiliation, travaillé pour le même employeur dans le cadre de contrats de droit public (Cass. soc. 29-6-2022 n° 21-10.111 FS-B).
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