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4 février 2022
Nous avons sélectionné pour vous les arrêts les plus marquants rendus cette semaine par la Cour de cassation.
Une semaine de jurisprudence sociale à la Cour de cassation
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Exécution du contrat

  • Si l'indépendance du médecin du travail exclut que les actes qu'il accomplit dans l'exercice de ses fonctions puissent constituer un harcèlement moral imputable à l'employeur, elle ne fait pas obstacle à l'application de la règle selon laquelle le commettant est civilement responsable du dommage causé par un de ses préposés en application de l'article 1242, alinéa 5 du Code civil. En conséquence, le médecin du travail, salarié de l'employeur, qui agit sans excéder les limites de la mission qui lui est impartie, n'engage pas sa responsabilité civile personnelle. Cette immunité du préposé ne pouvant toutefois pas s'étendre aux fautes susceptibles de revêtir une qualification pénale ou procéder de l'intention de nuire, le médecin du travail n'en bénéficie pas en ce qui concerne le grief de harcèlement moral et celui de violation du secret professionnel (Cass. soc. 26-1-2022 n° 20-10.610 FS-B).

Durée du travail

  • Le salarié qui le souhaite peut, en accord avec son employeur, renoncer à une partie de ses jours de repos en contrepartie d'une majoration de son salaire. L'accord entre le salarié et l'employeur est établi par écrit. Le nombre de jours travaillés dans l'année ne peut excéder un nombre maximal fixé par l'accord prévu à l'article L 3121-39 du Code du travail. A défaut d'accord, ce nombre maximal est de 235 jours. Un avenant à la convention de forfait conclue entre le salarié et l'employeur détermine le taux de la majoration applicable à la rémunération de ce temps de travail supplémentaire, sans qu'il puisse être inférieur à 10 %. En l'absence de conclusion d'un tel accord, le juge fixe, dans le respect du minimum de 10 %, le montant de la majoration applicable à la rémunération due en contrepartie du temps de travail excédant le forfait convenu. Après avoir constaté l'absence d'accord écrit relatif à la renonciation des jours de repos en contrepartie d'une majoration de salaire et que l'employeur, qui en avait connaissance, avait payé les jours accomplis au-delà du forfait, de sorte que les parties étaient convenues de la renonciation aux jours de repos correspondants, la cour d'appel, appréciant les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, a estimé le montant des sommes restant dues au salarié en contrepartie des jours travaillés en dépassement du forfait de 215 jours fixés par la convention individuelle de forfait en jours (Cass. soc. 26-1-2022 n° 20-13.266 FS-BR).
  • Au cours d'une même semaine, la durée du travail ne peut dépasser 48 heures. Une cour d’appel ne saurait débouter le salarié de sa demande en dommages-intérêts pour violation de la durée maximale du travail après avoir constaté qu’il avait travaillé 50,45 heures durant la semaine du 6 au 11 juillet 2015 en retenant que celui-ci doit démontrer très exactement en quoi ces horaires chargés lui ont porté préjudice alors que le seul constat du dépassement de la durée maximale de travail ouvre droit à réparation (Cass. soc. 26-1-2022 n° 20-21.636 FS-B).

Paie

  • Selon l'article 1er, III, de l'arrêté du 17 octobre 1995 relatif à la tarification des risques d'accidents du travail et de maladies professionnelles, dans sa rédaction issue de l'arrêté du 15 février 2017, applicable au litige, les salariés des entreprises mentionnées aux 1° et 3° des articles D 242-6-2 et D 242-30 du CSS constituent, sur demande de l'entreprise, un établissement distinct soumis à une tarification propre lorsqu'ils occupent à titre principal des fonctions support de nature administrative dans des locaux non exposés aux autres risques relevant de la même entreprise. Pour l'application de ce texte, les fonctions support de nature administrative s'entendent des tâches de gestion administrative communes à toutes les entreprises telles que le secrétariat, l'accueil, la comptabilité, les affaires juridiques, la gestion financière et les ressources humaines. Ayant constaté que les salariées concernées exerçaient respectivement les fonctions d'assistantes de travaux, d'assistante du service étude et d'assistante technique amiante, la cour d’appel a relevé que les missions de ces salariées, relatées dans leur fiche de poste, ne consistaient pas en des tâches de gestion communes à toutes les entreprises mais en des missions spécifiques directement liées à l'activité de gros-œuvre de l'entreprise et qui requéraient une technicité et une connaissance du secteur pour être menées à bien et en a déduit à bon droit que, les salariées concernées n'exerçant pas des fonctions support de nature administrative, les conditions requises pour l'application de la tarification propres aux salariés occupant à titre principal de telles fonctions n’étaient pas remplies (Cass. 2e civ. 27-1-2022 n° 20-20.764 F-B).
  • Le taux de cotisation dû au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles déterminé par les caisses régionales d'assurance maladie peut être remis en cause par une décision de justice qui en modifie les éléments de calcul. L'employeur est recevable, à l'occasion de la notification du taux ainsi rectifié, à contester, devant la juridiction de la tarification, l'ensemble des bases de la tarification afférente à l'année en cause (Cass. 2e civ. 27-1-2022 n° 20-17.330 F-B).
  • La mise en demeure, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, doit permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation. A cette fin, il importe qu'elle soit, à peine de nullité, notifiée au débiteur des cotisations réclamées, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice. Le défaut de réception par son destinataire d'une mise en demeure adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception n'affecte ni la validité de celle-ci ni la validité des actes de poursuite subséquents. Ayant retenu que la mise en demeure adressée au cotisant et dont l'accusé de réception avait été signé, produisait son effet quel qu'en soit le mode de délivrance, le seul fait pour le cotisant de contester être le signataire de l'avis de réception n'anéantissant pas cet effet, le tribunal en a exactement déduit que la contrainte était valide (Cass. 2e civ. 27-1-2022 n° 20-21.538 F-D).
  • La Carsat peut imposer des cotisations supplémentaires au titre des accidents du travail pour tenir compte des risques exceptionnels résultant de l'inobservation des mesures de prévention prescrites en application des articles L 422-1 et L 422-4 du même Code. Il appartient à l'employeur qui n'a pas mis en œuvre les mesures prescrites par l'injonction devenue définitive, en l'absence de recours auprès du Direccte (devenu Dreets), de rapporter la preuve de ce qu'à la date du contrôle, les risques d'accident avaient disparu ou étaient très faibles. Ayant relevé qu'aucun procès-verbal de réception n'a été établi entre l'entreprise chargée du montage de l'échafaudage et l'entreprise utilisatrice de cette installation et qu'il n'est pas non plus démontré qu'un panneau ait été fixé à l'échafaudage, mentionnant les conditions d'utilisation et interdisant l'accès aux entreprises et personnes non autorisées et ainsi constaté que la société ne justifiait pas de l'exécution complète des mesures préconisées dans l'injonction, la Cnitaat a pu décider, sans méconnaître les stipulations de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qu'au vu de la gravité des risques qui persistaient au sein de la société, la cotisation supplémentaire devait être maintenue (Cass. 2e civ. 27-1-2022 n° 20-10.478 F-D).

Rupture du contrat

  • Le salarié ne peut pas être laissé dans l'incertitude quant à l'étendue de sa liberté de travailler. Il en résulte qu'en matière de rupture conventionnelle, l'employeur, s'il entend renoncer à l'exécution de la clause de non-concurrence, doit le faire au plus tard à la date de rupture fixée par la convention, nonobstant toutes stipulations ou dispositions contraires (Cass. soc. 26-1-2022 n° 20-15.755 FS-B).
  • La contrepartie financière de l'obligation de non-concurrence ayant la nature d'une indemnité compensatrice de salaires, elle ouvre droit à congés payés. Dès lors, une cour d'appel ne peut pas débouter le salarié de sa demande d'indemnité compensatrice de congés payés au motif que la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, certes calculée sur la base du salaire, est payable postérieurement à la rupture du contrat de travail et n'ouvrirait pas droit à des congés payés (Cass. soc. 26-1-2022 n° 20-15.755 FS-B).

Santé et sécurité

  • L'obligation de reclassement du salarié inapte est présumée satisfaite si l'employeur lui a proposé loyalement, en tenant compte des préconisations et indications du médecin du travail, un autre emploi approprié à ses capacités, aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail. Ayant constaté qu'un poste de conducteur d'engins était disponible à proximité, que le salarié avait demandé à être reclassé sur un tel poste qu'il avait occupé plusieurs années et qu'il maîtrisait, et que l'employeur ne justifiait d'aucune évaluation de ce poste avec le médecin du travail, comme celui-ci le lui proposait, la cour d'appel a pu en déduire que l'employeur n'avait pas loyalement exécuté son obligation de reclassement et que le licenciement du salarié pour inaptitude et impossibilité de reclassement était dépourvu de cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 26-1-2022 n° 20-20.369 FS-B).
  • Est irrecevable la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité des dispositions de l'article 14-2 de la loi  2021-1040 du 5 août 2021 relatives à la gestion de la crise sanitaire au préambule de la Constitution du 4 octobre 1958 rappelant l'engagement formel de la France de respecter ou faire respecter l'ensemble des conventions internationales et notamment la convention n° 95 de l'Organisation internationale du travail sur la protection des salaires de 1949 qui fait interdiction à tout pays signataire de priver tout travailleur quel qu'il soit, d'une rémunération d'une protection sociale par différents artifices et notamment une suspension arbitraire du contrat de travail, dès lors, d'une part, que la question ne précise pas à quels droits et libertés garantis par la Constitution la disposition législative critiquée porte atteinte et, d'autre part, que le grief tiré du défaut de compatibilité d'une disposition législative avec les engagements internationaux de la France ne constitue pas un grief d'inconstitutionnalité (Cass. soc. QPC 26-1-2022 n° 21-40.028 F-D et n° 21-40.029 F-D).

Statuts particuliers

  • Une cour d’appel ne saurait débouter un salarié de sa demande de requalification des contrats de mission dirigée contre l'entreprise de travail temporaire alors qu'il résultait de ses énonciations, à l'occasion de l'examen de la même demande dirigée contre l'entreprise utilisatrice, que quatre contrats de mission pour remplacement ne comportaient pas la qualification du salarié remplacé (Cass. soc. 26-1-2022 n° 20-17.817 F-D).
Dossier spécial Loi de financement de la sécurité sociale pour 2024

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