L’organisation des congés payés incombe à l’employeur. La détermination des dates de congé constitue une de ses prérogatives dans le cadre de son pouvoir de direction (C. trav., art. L. 3141-15 et s.). Ainsi un salarié ne peut pas fixer lui-même ses dates de congé et partir sans autorisation préalable de l’employeur. A défaut, il peut faire l’objet d’une sanction disciplinaire pouvant aller, selon le contexte, du simple avertissement au licenciement pour faute grave (Cass. soc., 23 nov. 1989, n°87-40..555 ; Cass. soc., 19 janv. 2005, n°02-46.418).
Mais cette autorisation doit-elle être donnée expressément ou le silence de l’employeur vaut-il accord ? Autrement dit, un salarié peut-il être sanctionné pour s’être absenté de son poste de travail une journée alors qu’il a fait une demande de congé payé à son employeur et que ce dernier n’a pas refusé expressément sa demande ?
Si l’employeur peut sanctionner le salarié qui ne respecte pas ses dates de congé, sa propre attitude peut constituer une circonstance atténuante. Il a été ainsi jugé qu’en l’absence de décision de sa part, un employeur ne peut pas reprocher au salarié d’être parti sans autorisation (Cass. soc., 11 oct. 2000, n° 98-42.540 ; Cass.soc., 14 nov. 2001, n° 99-43.454).
La Cour de cassation confirme cette solution dans un arrêt du 6 avril 2022.
Une demande de congé payé restée sans réponse
A l’origine des faits, un salarié formule oralement une demande d’une journée congé à laquelle il n’obtient aucune réponse.
Estimant sa demande acceptée car « au vu de la loi le silence vaut acceptation », il s’absente le 27 juin 2016, ce qui lui vaut un avertissement pour absence injustifiée. Il saisit alors le conseil de prud’hommes pour obtenir l’annulation de cette sanction.
De son côté, l’employeur justifie l’avertissement par l’impossibilité pour le salarié, sauf disposition conventionnelle ou usage contraire, de fixer lui-même les dates de ses congés sans avoir obtenu une autorisation préalable expresse de la direction. Il soutient également que cette absence a causé « une réelle désorganisation dans le fonctionnement de l’entreprise et dans l’organisation du travail ».
Ne pas refuser une demande de congé payé revient à l’accepter lorsqu’il n’existe pas de consigne imposant un accord exprès préalable
La cour d’appel, suivie par la Cour de cassation, fait droit à la demande du salarié et annule l’avertissement. Elle considère que l’employeur ne justifie d’aucune consigne précise imposant au salarié d’obtenir un accord exprès préalable à la prise de congé.
En l’espèce, il n’est pas établi que l’employeur a expressément formulé un refus, de sorte que le salarié a pu considérer que sa demande a été acceptée.
Une solution conforme à la jurisprudence classique de la Cour de cassation qui appelle à la vigilance
Cette décision ne remet pas en cause la position classique de la Cour de cassation sur l’obligation pour le salarié d’obtenir l’autorisation préalable de l’employeur avant de s’absenter (voir ci-dessus). Elle ne concerne que les modalités de cette acceptation. Elle vient seulement préciser que cette dernière peut être tacite en l’absence de règle contraire applicable dans l’entreprise.
La solution aurait été différente si une règle ou un usage avait imposé une réponse expresse pour valider la demande de congés payés. Dans cette hypothèse, il ne faut pas de doute que la sanction du salarié aurait été confirmée par les tribunaux.
Il est donc fortement conseillé à l’employeur, non seulement, de faire le point sur la procédure de validation des congés applicable dans l’entreprise, mais surtout de ne pas laisser sans réponse les demandes de congés payés de ses salariés.