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25 septembre 2024
Peu importent les précautions prises par l’employeur pour garantir la confidentialité des votes et des données transmises, l’impossibilité pour des salariés d’accéder à la plateforme de vote électronique, en raison d’un vote enregistré à leur insu par un tiers, constitue une faille du système. Le dispositif de vote ne garantit pas les principes généraux du droit électoral et les élections doivent donc être annulées.

Le recours au vote électronique lors des élections professionnelles doit répondre aux exigences posées par le code du travail (C. trav., art. R. 2314-5 et suivants). Il suppose l’établissement d’un cahier des charges soumis à l’adoption de diverses mesures et précautions visant à garantir la sécurité, la confidentialité et la sincérité du scrutin dans le but notamment d’éviter qu’une personne non autorisée puisse se substituer frauduleusement à un électeur.

En effet, le vote électronique doit garantir, au même titre que le vote physique, les principes généraux du droit électoral (Cass. soc., 3 oct. 2018, n° 17-29.022) : égalité face à l’exercice du droit de vote (Cass. soc., 1er juin 2022, n° 20-22.860), neutralité de l’employeur durant le processus électoral (Cass. soc., 18 mai 2022, n° 20-21.529), secret du vote (Cass. soc., 10 mai 2012, n° 11–25.029), sincérité et liberté du scrutin (Cass. soc., 21 sept. 2022, n° 21-14.123), etc. Le manquement à l’un d’eux constitue une irrégularité justifiant à elle seule l’annulation des élections comme l’illustre cette décision de la Cour de cassation du 11 septembre 2024.

Impossibilité d'accéder à la plateforme de vote électronique en raison d'un vote déjà enregistré à leur insu par un tiers

En l’espèce, un employeur organise des élections professionnelles aux fins de mise en place d’un CSE d’établissement par vote électronique. À l’issue du premier tour, l’ensemble des sièges est pourvu. Mais 5 salariés n’ont pas pu accéder à la plateforme de vote électronique durant le scrutin. Selon eux, un tiers avait déjà voté en leur nom, sans leur accord. Le tribunal judiciaire est saisi afin d’annuler les élections des élus du premier collège et d’ordonner à l’employeur sous astreinte l’organisation de nouvelles élections. Le tribunal fait droit aux demandeurs et annule les élections du premier collège.

L’employeur se pourvoit en cassation. Selon lui et comme constaté par le tribunal judiciaire, le dispositif de vote électronique mis en place respectait à la fois les modalités fixées par la loi mais aussi les recommandations de la CNIL sur la mise en place du dispositif de vote et sa sécurité. Ayant pris toutes les précautions et garanties visant à assurer la sécurité, la confidentialité, l’anonymat et l’intégrité du scrutin, une faille dans le système était impossible et il revenait aux demandeurs d’en rapporter la preuve matérielle.

Remarque

pour se prononcer, le tribunal judiciaire s’était basé sur des attestations de salariés affirmant n’avoir pas pu voter au motif qu’un vote était déjà enregistré à leur nom lorsqu’ils se sont connectés sur le site de vote, et de courriers de représentants syndicaux dénonçant la fraude électorale.

Nullité des élections pour non respect des principes généraux du droit électoral 

La Cour de cassation confirme le jugement rendu par le tribunal judiciaire constatant l’impossibilité pour certains salariés d’accéder à la plateforme de vote. Elle considère que : « (…) en dépit des différentes mesures prises par l’employeur pour garantir la confidentialité des votes et des données transmises, une faille du système de vote était démontrée ». Le respect par l’employeur des exigences imposées apparaît sans importance et la faille du système de vote, ici constatée, constitue une atteinte à la sincérité et au secret du vote, principes généraux du droit électoral. Les élections doivent donc être annulées.

Dans la lignée des solutions retenues par la Cour de cassation, celle-ci reste protectrice de l’exercice du droit de vote des salariés. A partir du moment où des salariés invoquent leur impossibilité d’exercer leur droit de vote en raison d’une usurpation de leur droit, l’exigence d’une preuve matérielle n’est pas imposée. Aucun code de connexion ni aucune liste d'émargement n'ont été demandés par les juges pour vérifier les allégations de fraude. Au regard des éléments de faits qui lui sont rapportés, le juge judiciaire se fonde sur son appréciation souveraine et se porte en garant des principes généraux du droit électoral.

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Jean-David FAVRE
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