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10 mai 2022
La décision de validation d'un accord collectif portant sur le PSE doit être annulée lorsque l'un des syndicats signataires ne remplit pas le critère de représentativité relative à la transparence financière, quand bien même il justifie d'une audience électorale importante.

L’administration saisie d’une demande de validation d’un accord d’entreprise conclu dans le cadre de la mise en œuvre d’un PSE doit vérifier que cet accord remplit les conditions nécessaires à sa validité, et notamment la qualité des signataires (CE, 22 juill. 2015, n°385668 et CE, 30 mai 2016, n° 385730).

En effet, pour pouvoir valablement signer un accord collectif, et notamment un accord déterminant le contenu d’un PSE, un syndicat doit être représentatif.

Les critères de représentativité sont fixés par l’article L.2121-1 du code du travail. Parmi eux, figure la transparence financière qui suppose que le syndicat ait régulièrement publié ses comptes.

Ce critère ne doit pas être négligé car en cas de défaillance d'un syndicat signataire, la décision de validation du PSE doit être annulée. Telle est la position du Conseil d’État dans un arrêt du 6 avril 2022.

La transparence financière comme critère de la représentativité doit être contrôlée par l’administration

Un accord portant sur le PSE signé par un syndicat majoritaire qui n’a pas publié ses comptes

A l’origine des faits, un accord collectif relatif au PSE signé le 23 août 2019 par deux syndicats ayant obtenu, respectivement, 80 % et 20 % de l’ensemble des suffrages aux dernières élections professionnelles.

L’accord est validé le 16 septembre 2019 par le Direccte (devenue Dreets). Un syndicat et un salarié saisissent le juge administratif pour faire annuler la décision de validation. Ils estiment que l’un des signataires de l’accord n’a pas qualité pour le signer, dans la mesure où il ne répond pas aux critères de représentativité fixés par la loi, faute d’avoir régulièrement publié ses comptes.

Le contrôle de l’administration ne se limite pas au caractère majoritaire de l’accord

La cour administrative d’appel de Marseille leur donne gain de cause et annule la décision de validation de l’accord portant sur le PSE. Elle considère que le syndicat mis en cause ne satisfaisait pas au critère de transparence financière faute d’avoir respecté l’obligation de publicité de ses comptes, de sorte que l’accord ne peut être regardé comme ayant été conclu conformément aux conditions de représentativité et de majorité prévues à l’article L. 1233-24-1 du code du travail.

Elle est approuvée en ce sens par le Conseil d’État qui considère qu’il appartient à l’administration, saisie d’une demande de validation d’un accord portant sur le PSE, de vérifier que ce dernier a été régulièrement signé pour le compte d’une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations reconnues représentatives lors du premier tour des dernières élections professionnelles au sein de l’entreprise.

Il en déduit qu’il lui incombe de vérifier que le ou les syndicats signataires satisfont aux critères de représentativité énoncés par l’article L. 2121-1 du code du travail, dont celui de transparence financière. Peu importe que la représentativité « des syndicats n’ait pas été contestée devant le juge judiciaire à l’occasion du contentieux des élections professionnelles ».

Comptes non publiés, accord invalidé !

La défaillance du syndicat dans la publication de ses comptes…

Le Conseil d’État précise que, pour les syndicats, le respect de l’obligation de publicité des comptes doit être regardé, comme une des conditions à remplir pour répondre au critère de transparence financière requis pour établir leur représentativité, sauf à ce qu’ils puissent faire état de l’accomplissement de cette obligation de publicité par des mesures équivalentes.

Le code du travail prévoit différentes modalités de publicité des documents comptables. Ainsi lorsque ses ressources annuelles n’excèdent pas 230 000 €, ce qui semble être le cas en l’espèce, le syndicat peut adopter une présentation simplifiée de ses comptes avec la possibilité de n’enregistrer ses créances et ses dettes qu’à la clôture de l’exercice Cette présentation simplifiée prend la forme d’un bilan, d’un compte de résultat et d’une annexe simplifiés (C. trav., art. L. 2135-1 et art. D. 2135-3). Il assure la publicité de ses comptes dans un délai de 3 mois à compter de leur approbation par l’organe délibérant statutaire soit dans les conditions prévues à l’article D. 2135-7, soit par publication sur leur site internet ou, à défaut de site, en les adressant à la Dreets par voie électronique.

Les juges relèvent, en l’espèce, que :

- le syndicat n’a publié sur son site internet, au titre du dernier exercice clos ayant précédé la signature de l’accord, ainsi que, d’ailleurs, des deux exercices l’ayant précédé, que ses bilans simplifiés ;

- les comptes de résultat simplifiés ainsi que le tableau annexe de ses ressources n’ont quant à eux fait l’objet d’aucune publicité ;

- il n’a pas été constaté que le syndicat aurait mis en œuvre des mesures de publicité équivalentes.

Le Conseil d’État en déduit que le syndicat qui ne remplit pas le critère de transparence financière ne peut prétendre au statut de syndicat représentatif, quand bien même il justifie d’une audience électorale importante.

... entraîne l’annulation de la décision de validation de l’accord sur le PSE

Le syndicat n’ayant pas qualité pour signer l’accord, ce dernier n’est pas valable. L’administration n’aurait donc pas dû le valider. Le Conseil d’État en déduit que la décision de validation doit être annulée.

La solution ainsi retenue par le Conseil d’État n’est pas surprenante. Elle est conforme à sa jurisprudence selon laquelle l’administration saisie d’une demande de validation d’un accord collectif portant sur un PSE doit s’assurer de la qualité de ses signataires (CE, 12 juin 2019, n° 420084).

De l’intérêt pour l’employeur de s’assurer de la qualité des signataires de l’accord portant sur le PSE

Une telle décision est évidemment lourde de conséquences pour l’employeur qui a mené de bonne foi les négociations. La défaillance d’un syndicat à son obligation de transparence financière se transforme alors, par ricochet, en condamnation pécuniaire de l’employeur lorsque la décision de validation de l’accord portant sur le PSE est annulée.

En effet, en pareilles circonstances, cette défaillance peut lui coûter cher puisqu’en application de l’article L. 1235-16 du code du travail :

- les salariés licenciés peuvent être réintégrés dans l’entreprise avec maintien de leurs avantages acquis, à condition que l’employeur soit d’accord ;

- à défaut, ils ont droit à une indemnité au moins égale aux salariés des 6 derniers mois, en plus de l’indemnité de licenciement.

On le voit, cette décision invite l’employeur à la plus grande vigilance s’agissant du respect par chaque syndicat représentatif au sein de l’entreprise de ses obligations, notamment de transparence financière. Il lui est fortement conseillé, lors de la conclusion un accord collectif, que celui-ci concerne un PSE ou non, de vérifier la qualité de chacun des signataires. Et s’il constate une défaillance, de demander au syndicat de régulariser la situation …

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