Quand le temps de trajet est considéré comme temps de travail effectif
En principe le temps de trajet d’un salarié itinérant entre son domicile et les sites des premier et dernier clients n’est pas du temps de travail effectif ; lorsqu'il dépasse le temps normal de trajet, il doit être indemnisé (C. trav. L. 3121-4). Néanmoins, si le salarié démontre que lors du temps de trajet, il reste à la disposition de son employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer à des occupations personnelles, ces temps de trajet ne relèvent pas de l'article L. 3121-4 mais répondent à la définition du temps de temps de travail effectif défini à l'article L. 3121-1 du code du travail.
C 'est ce qui résulte d'une jurisprudence constante et que confirme la Cour de cassation, dans un arrêt du 15 janvier 2025. Le fondement est la combinaison des articles L. 3121-1 et l. 3121-4 du code du travail interprétés à la lumière de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003.
Remarque
à noter qu’avant un revirement opéré en 2022 (Cass. soc., 23 nov. 2022, n° 20-21.924 FPBR), pour se mettre en conformité avec le droit communautaire (CJUE 10 septembre 2015, n° C-266/14 ; dir. 2003/88/CE du 4 novembre 2003), la Cour de cassation avait une vision très restrictive du temps de trajet puisqu’elle ne reconnaissait pas la possibilité de le requalifier en temps de travail effectif même s’il remplissait tous les critères de l'article l. 3121-1 du code du travail (Cass. soc., 30 mai 2018, n° 16-20.634, BC V n° 97).
Le rôle du juge dans la qualification juridique du temps de trajet
En l'espèce, un salarié, itinérant, demande la requalification en temps de travail effectif de certains temps de trajets effectués entre son domicile et les sites des premier et dernier clients pour réclamer le paiement d'heures supplémentaires. La cour d'appel le déboute.
La Cour de cassation, saisie de l’affaire, reproche à la cour d'appel de ne pas avoir vérifié les conditions effectives d’accomplissement des trajets litigieux alors qu'elle avait constaté que le salarié, itinérant, :
- utilisait, pour se rendre sur son secteur d'intervention, un véhicule de fonction équipé à son bord un système de géolocalisation, qui n'était pas un système de surveillance du travail mais d'optimisation des interventions auprès des clients dans une activité réglementée ;
- pouvait être contraint de dormir à l'hôtel lorsque le dernier lieu d'intervention était éloigné de plus de cent kilomètres ou une heure de son domicile
- était contraint de séjourner occasionnellement à l’hôtel.
Elle aurait dû vérifier si ces éléments de fait ne permettaient pas aux temps de trajets litigieux de remplir les critères du temps de travail effectif.