Actualité
7 min de lecture
6 janvier 2023
Nous avons sélectionné pour vous les arrêts les plus marquants rendus la semaine dernière par la Cour de cassation.
Une semaine de jurisprudence sociale à la Cour de cassation
©Gettyimages

Embauche

  • Ayant constaté que le travailleur était intégré dans une équipe, qu'il était soumis à des contraintes en matière de temps de travail et de formation, qu'il devait faire parvenir son compte-rendu hebdomadaire chaque vendredi midi au plus tard, qu'il utilisait les locaux de la société, une adresse mail au nom de la société, ainsi que des moyens de communication, des process backoffice et des outils informatiques propres à la société, qu'il était soumis à une limitation forte d'initiatives dans le déroulement de son activité par des validations systématiques et qu'il dépendait du gérant de la société, la cour d'appel, qui a fait ressortir que ces éléments plaçaient l'intéressé dans un lien de subordination juridique permanent, a pu en déduire l'existence d'un contrat de travail (Cass. soc. 14-12-2022 n° 22-12.263 F-D).

Exécution du contrat

  • Le logement attribué à titre gratuit à un salarié pour l'exercice de ses fonctions, qui est l'accessoire du contrat de travail et dont il bénéficie dans sa vie personnelle, ne peut pas lui être retiré ou donner lieu au versement d'un loyer, pendant une période de suspension du contrat de travail pour maladie. Le défaut de fourniture de logement de fonction pendant l'arrêt de travail constitue donc un manquement aux obligations de l'employeur dont la cour d'appel doit apprécier la gravité (Cass. soc. 14-12-2022 n° 21-15.685 F-D).
  • Ayant retenu que le salarié, qui estimait avoir fait l'objet d'une discrimination à l'embauche en raison de son nom à consonnance extra-européenne, produisait une analyse faite à partir du registre unique du personnel communiqué par l'employeur et sur l'organigramme de la société à partir desquels il avait fait des analyses statistiques et avait conclu que, parmi les salariés à patronyme européen recrutés sous « contrat à durée déterminée intérim », 18,07 % s'étaient vus accorder un contrat à durée indéterminée contre 6,9 % pour les salariés à patronyme extra-européen, que les salariés en « contrat à durée déterminée intérim » à patronyme extra-européen représentaient 8,17 % de l'ensemble des salariés en « contrat à durée déterminée intérim » mais seulement 2,12 % de l'ensemble des salariés en contrat à durée indéterminée pour les mêmes postes, 80,93 % des salariés à patronyme européen étaient sous contrat à durée indéterminée pour seulement 21,43 % des salariés à patronyme extra-européen, la cour d'appel a pu en déduire que ces éléments pris dans leur ensemble laissaient supposer une discrimination à l'embauche. Considérant que l'employeur ne justifiait pas d'éléments objectifs étrangers à toute discrimination, la cour d'appel a pu le condamner à verser des dommages-intérêts au salarié (Cass. soc. 14-12-2022 n° 21-19.628 F-D).

Durée du travail

  • Il résulte de l'article L 3121-35 al. 1 du Code du travail que le seul constat du dépassement de la durée maximale de travail ouvre droit à la réparation. Une cour d'appel ne peut donc pas, pour débouter le salarié de sa demande en dommages-intérêts pour violation de l'obligation de sécurité résultant du non-respect du mi-temps thérapeutique, des durées maximales de travail et du repos journalier et hebdomadaire retenir que le salarié ne justifie en tout état de cause d'aucun préjudice à ce titre, se bornant à invoquer un préjudice nécessaire (Cass. soc. 14-12-2022 n° 21-21.411 F-D).
  • Une cour d'appel ne peut pas rejeter les demandes d'un salarié au titre d'heures travaillées et non rémunérées sans examiner, même sommairement, le relevé de pointage, le décompte journalier des heures de travail, le tableau récapitulatif des horaires individuels des salariés de l'entreprise et l'attestation d'un autre salarié, que le salarié produisait au soutien de sa demande, après avoir retenu que la production par le salarié d'un décompte faisant ressortir des chiffres différents et ne contenant pas de calcul des heures revendiquées par semaine civile mais par mois, ne permet pas d'étayer la demande par des éléments suffisamment précis et cohérents quant aux horaires prétendument réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments (Cass. soc. 14-12-2022 n° 21-21.411 F-D).

Rupture du contrat

  • Dès lors qu'il résulte des stipulations contractuelles que, dans la formule permettant de déterminer le montant de l'indemnité de licenciement, l'âge du salarié est exprimé en années (mois complet en décimales) et que le mois au cours duquel le licenciement intervient est compris dans cette indemnité, le salarié âgé de 51 ans, 7 mois et 10 jours a droit à une indemnité calculée sur un paramètre de l'âge exprimé en année de 51,67 (Cass. soc. 14-12-2022 n° 21-19.501 F-D).

Congés

  • La prime de campagne payée trois fois l'an, en exécution d'un engagement unilatéral de l'employeur, assise sur des résultats produits par le travail du salarié, affectés pendant la période de congés, doit être incluse dans le calcul de l'indemnité de congés payés (Cass. soc. 14-12-2022 n° 21-14.268 F-D).

Représentation du personnel

  • Si le juge judiciaire ne peut, en l'état de l'autorisation administrative accordée à l'employeur de licencier un salarié protégé, sans violer le principe de la séparation des pouvoirs, apprécier le caractère réel et sérieux du licenciement, il reste cependant compétent pour apprécier les fautes commises par l'employeur pendant la période antérieure au licenciement, et notamment l'existence d'une discrimination syndicale (Cass. soc. 14-12-2022 n° 21-16.084 F-D).
  • Il n'y a pas un droit général à l'expertise. Le comité social et économique d'établissement ne peut faire appel à un expert que lorsqu'il établit l'existence de mesures d'adaptation spécifiques à l'établissement.

    Ayant retenu que le CSE d'établissement n'identifiait pas de façon précise et concrète les modifications importantes qui découleraient du passage en location-gérance de chacun des 9 magasins, ni en quoi concrètement la location-gérance entraînerait des variations d'effectifs, des augmentations ou diminutions de temps de travail ou une redéfinition des postes et des tâches, le transfert des contrats de travail étant encadré par la loi et des garanties sociales spécifiques ayant été négociées et conclues avec les organisations syndicales au sein de l'entreprise avec la mise en place d'une instance paritaire de suivi des passages en location-gérance par accord collectif du 4 juillet 2018, le tribunal judiciaire a pu en déduire que le CSE d'établissement ne démontrait pas l'existence d'un projet important de nature à entraîner des incidences sur la santé, la sécurité ou les conditions de travail des salariés des magasins concernés et a pu annuler la délibération par laquelle ce comité a décidé de recourir à un expert pour projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail (Cass. soc. 14-12-2022 n° 21-22.426 F-D).

Santé et sécurité

  • Le salarié membre d'un conseil de prud'hommes, travaillant en service continu ou discontinu posté, a droit à un aménagement d'horaires de son travail de façon à lui garantir un temps de repos minimum. Ayant constaté que l'employeur avait fixé les repos périodiques du salarié sur des jours où il siégeait au conseil des prud'hommes, la cour d'appel ne pouvait pas débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts au titre de la violation par l'employeur de son obligation de sécurité (Cass. soc. 14-12-2022 n° 21-17.537 F-D).

Statuts particuliers

  • Ne donne pas de base légale à sa décision selon laquelle  la cession du périodique est la cause de la rupture du contrat de travail à l'initiative du journaliste la cour d'appel qui, sans rechercher l'existence d'un lien de causalité entre ladite rupture et la cession du journal intervenue 3 ans auparavant, condamne la société à payer au salarié une certaine somme au titre de l'indemnité prévue par l'article L 7112-3 du Code du travail après avoir notamment retenu que, pour le journaliste professionnel, le droit de rompre son contrat de travail, en application de l'article L 7112-5, 1° du Code du travail pour cause de cession du journal ou du périodique trouve son fondement dans un acte juridique objectif, en l'espèce non contesté, de cession du périodique, qu'il ne se prescrit pas et n'est soumis à aucune condition de délai, qu'il n'est pas davantage soumis à une appréciation des circonstances de sa formulation, quand bien même à cette occasion le journaliste professionnel élèverait des griefs à l'encontre de son employeur et qu'il est indépendant de celui que prévoit le 3° du même article en cas de changement notable dans le caractère ou l'orientation du journal ou du périodique de nature à porter atteinte à l'honneur, la réputation ou, d'une manière générale, aux intérêts moraux du journaliste professionnel, qui n'a donc pas besoin de remettre en cause sa ligne éditoriale (Cass. soc. 14-12-2022 n° 21-17.994 F-D). 

Contrôle - contentieux

  • Le pourvoi dirigé contre deux décisions, dont l'une émane du juge pénal et l'autre du juge civil, est recevable lorsque, même non rendues en dernier ressort et alors qu'aucune d'elles n'est susceptible d'un recours ordinaire, elles sont inconciliables et aboutissent à un déni de justice (Cass. soc. 14-12-2022 n° 21-15.601 FS-D).
  • Ayant constaté, d'une part, que la lettre adressée le 28 avril 2011 aux ayants droit du salarié décédé par la société Allianz vie mentionnait expressément qu'un contrat collectif de prévoyance avait été souscrit par l'employeur, révélant ainsi l'existence du contrat d'assurance de groupe dont les ayants droit du salarié se prévalaient au soutien de leur demande d'indemnisation au titre du manquement de l'employeur à son obligation d'information du salarié concernant un contrat de prévoyance, d'autre part, qu'il n'était pas établi que les ayants droit s'étaient trouvés, entre avril 2011 et leur acte de saisine, le 5 novembre 2015, dans une impossibilité d'agir suspendant la prescription par suite d'un empêchement de solliciter une indemnisation devant la juridiction prud'homale dans le délai de prescription, la cour d'appel en a déduit à bon droit que les ayants droit du salarié avaient connaissance des faits leur permettant d'exercer leur action en responsabilité à l'encontre de la société dès le 28 avril 2011, en sorte que le point de départ de la prescription prévu par l'article L 1471-1 du Code du travail devait être fixé à cette date et, qu'ayant saisi la juridiction prud'homale le 5 novembre 2015, leur action était prescrite (Cass. soc. 14-12-2022 n° 21-17.286 F-D).

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