Exécution du contrat
- Selon l'article 15 quater de la convention collective nationale du personnel des entreprises de manutention ferroviaire et travaux connexes du 6 janvier 1970, réglant les conditions de transfert du personnel entre entreprises, le statut collectif de l'entreprise entrante se substituera de plein droit à celui de l'entreprise sortante dès le premier jour de la reprise du marché. La CJUE, dans son arrêt du 6 septembre 2011, a dit pour droit que la mise en œuvre de la faculté consistant à remplacer, avec effet immédiat, les conditions dont bénéficient les travailleurs transférés en vertu de la convention collective en vigueur auprès du cédant par celles prévues par la convention collective en vigueur auprès du cessionnaire ne saurait avoir pour but ou pour effet d'imposer auxdits travailleurs des conditions globalement moins favorables que celles applicables avant le transfert. Elle a ajouté que s'il en était autrement, la réalisation de l'objectif poursuivi par la directive 77/187 pourrait facilement être mise en cause dans tout secteur régi par des conventions collectives, ce qui porterait atteinte à l'effet utile de ladite directive (CJUE 6-9-2011 aff. C-108/10, Scattolon, point 76). Il en résulte que le transfert conventionnel effectué en application de la convention collective précitée, interprété à la lumière de la directive 2001/23/CE du Conseil du 12 mars 2001 concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transferts d'entreprise, qui a codifié la directive 77/187/CEE du Conseil du 14 février 1977, impose à l'entreprise entrante de maintenir aux salariés qui en bénéficient le niveau de rémunération octroyé avant leur transfert, nonobstant l'existence d'une substitution immédiate de statut collectif, afin que ceux-ci ne soient pas placés, du seul fait du transfert, dans une position globalement défavorable par rapport à leur situation immédiatement antérieure au transfert (Cass. soc. 6-3-2024 n°s 21-23.962 FS-B, 21-23.963 FS-D, 21-23.964 FS-D, 21-24.184 FS-D).
- Il résulte de l'article L 1224-3 du Code du travail qu'à la suite du transfert d'une entité économique, employant des salariés de droit privé, à une personne publique dans le cadre d'un service public administratif, les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le personnel de l'entreprise et le nouvel employeur qui est tenu dès la reprise de l'activité de continuer à rémunérer les salariés transférés dans les conditions prévues par leur contrat de droit privé jusqu'à ce que ceux-ci acceptent le contrat de droit public qui leur sera proposé, ou jusqu'à leur licenciement, s'ils le refusent ou s'il n'est pas possible pour la personne publique, au regard des dispositions législatives ou réglementaires dont relève son personnel, de maintenir le contrat de travail de droit privé en cours au jour du transfert ou d'offrir à l'intéressé un emploi reprenant les conditions de ce contrat. Ayant constaté que la commune, qui avait repris l'activité de l'association, avait refusé de reprendre la salariée qui occupait le poste de directrice, ne lui avait soumis aucun contrat de droit public et n'avait mis en œuvre aucune procédure de licenciement, la cour d’appel en a exactement déduit, le contrat de travail de la salariée ayant été transféré de plein droit à la commune, que celle-ci était tenue de payer les salaires à compter de la date à laquelle cette activité lui avait été transférée et a pu retenir que les manquements de la commune à ses obligations rendaient impossible la poursuite du contrat de travail et justifiaient sa résiliation (Cass. soc. 6-3-2024 n° 22-22.315 FS-B).
- Ayant, d'une part, constaté que l'environnement de travail des ingénieurs des mines, qui travaillent à proximité des sites d'exploitation, les expose à des sources de pollution, soit des poussières, fumées et résidus de mines, induisant un risque accru de voir leur espérance de vie réduite et retenu que l'employeur établissait ainsi que, compte tenu de ces contraintes environnementales imposées par l'emploi, il poursuivait un objectif légitime de préservation de la santé et de la sécurité des travailleurs et que la mesure de mise à la retraite était justifiée par cet objectif légitime et ayant, d'autre part, relevé que le salarié avait été placé en invalidité et qu'à compter de cette date il avait perçu une prime d'invalidité à laquelle s'était substituée une pension de retraite, faisant ainsi ressortir que cette mesure de mise à la retraite n'avait pas modifié le mode de vie de l'intéressé qui ne travaillait plus depuis plus de 5 ans sans diminution de ses revenus, la cour d'appel a pu en déduire que les moyens mis en œuvre par l'employeur pour atteindre l'objectif légitime lié à la préservation de la santé et de la sécurité des travailleurs étaient en l'espèce appropriés et nécessaires et que la mise à la retraite de l'intéressé n'avait pas porté une atteinte disproportionnée à ses droits, excluant ainsi toute discrimination en raison de l'âge (Cass. soc. 6-3-2024 n° 22-18.100 F-D).
Paie
- La cour d'appel, qui a constaté qu'une prime de bilan, désignée prime exceptionnelle sur la fiche de paye, avait été versée chaque année à la salariée et que l'employeur ne contestait pas avoir fait bénéficier ses salariés de cette prime pour l'année 2017, en excluant toutefois l'intéressée sans aucune justification, en a exactement déduit que l'employeur était tenu au paiement de la prime litigieuse (Cass. soc. 6-3-2024 n° 22-17.451 F-D).
Rupture du contrat
Le salarié a droit, même au temps et au lieu de travail, au respect de l'intimité de sa vie privée. Il en résulte qu'un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut pas justifier, en principe, un licenciement disciplinaire, sauf s'il constitue un manquement de l'intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail. L'employeur ne peut pas, pour procéder à un licenciement disciplinaire, se fonder sur le contenu des messages à caractère raciste et xénophobe envoyés par la salariée d'une caisse de sécurité sociale à l'aide de sa messagerie professionnelle dès lors que (Cass. soc. 6-3-2024 n° 22-11.016 FS-B) :
- les messages litigieux s'inscrivaient dans le cadre d'échanges privés à l'intérieur d'un groupe de personnes, qui n'avaient pas vocation à devenir publics et n'avaient été connus par l'employeur que suite à une erreur d'envoi de l'un des destinataires ;
- la lettre de licenciement ne mentionnait pas que les opinions exprimées par la salariée dans ces courriels auraient eu une incidence sur son emploi ou dans ses relations avec les usagers ou les collègues, l'employeur ne versant aucun élément tendant à prouver que les écrits de l'intéressée auraient été connus en dehors du cadre privé et à l'extérieur de la caisse et que son image aurait été atteinte, de sorte que le moyen tiré du principe de neutralité découlant du principe de laïcité applicable aux agents qui participent à une mission de service public est inopérant ;
- si le règlement intérieur de la caisse interdisait aux salariés d'utiliser pour leur propre compte et sans autorisation préalable les équipements lui appartenant, y compris dans le domaine de l'informatique, un salarié pouvait toutefois utiliser sa messagerie professionnelle pour envoyer des messages privés dès lors qu'il n'en abusait pas et, qu'en l'espèce, l'envoi de 9 messages privés en l'espace de 11 mois ne peut pas être jugé comme excessif, indépendamment de leur contenu.
- Lorsque la société mère ne réintègre pas le salarié expatrié après son licenciement par la filiale étrangère, les indemnités de rupture auxquelles l'intéressé peut prétendre doivent être calculées par référence aux salaires perçus par celui-ci dans son dernier emploi. Par conséquent, l'indemnité compensatrice de préavis, l'indemnité conventionnelle de licenciement, les salaires dus au titre de l'allocation de congé de reclassement et les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse dus au salarié devaient être calculés sur la base de son salaire d'expatriation au Maroc, peu important les stipulations contractuelles et les dispositions de la convention collective applicable moins favorables que la règle légale (Cass. soc. 6-3-2024 n° 22-19.879 F-B).
Représentation du personnel
- L'accord collectif portant reconnaissance d'une UES, dont l'objet est essentiellement de mettre en place un comité social et économique selon les règles de droit commun prévues par le Code du travail, ne constitue ni un accord interentreprises qui permet la mise en place, dans les conditions prévues par l'article L 2313-9 de ce Code, d'un comité social et économique spécifique entre des entreprises d'un même site ou d'une même zone et dont les attributions seront définies par l'accord interentreprises, ni un accord interentreprises permettant de définir les garanties sociales des salariés de ces entreprises dans les conditions prévues par les articles L 2232-36 à L 2232-38 du même Code. Il en résulte que toutes les organisations syndicales présentes dans les entités composant l’UES doivent être conviées à la négociation (Cass. soc. 6-3-2024 n° 22-13.672 FS-BR).
Contrôle - contentieux
- Pour les instances introduites devant les conseils de prud'hommes antérieurement au 1er août 2016, période durant laquelle l'article R 1452-6 du Code du travail relatif au principe d'unicité de l'instance était applicable, lorsqu'une décision d'une juridiction d'un Etat membre est reconnue en France en application des articles 33 et 36 du règlement 44/2001, sont irrecevables des demandes liées au contrat de travail entre les mêmes parties formées dans une nouvelle procédure devant la juridiction prud'homale dès lors que leur fondement est né avant la clôture des débats de l'instance antérieure devant la juridiction étrangère (Cass. soc. 6-3-2024 n° 19-20.538 FS-B).
- Doit être renvoyée au Tribunal des conflits la question de la compétence du juge judiciaire pour connaître d'un litige opposant un agent recruté par contrat pour exercer des fonctions d'assistant funéraire dans un crématorium, laquelle question suppose de savoir si un crématorium est un service public industriel et commercial ou un service public administratif (Cass. soc. 6-3-2024 n° 22-12.477 FS-D).
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