Nous avons sélectionné pour vous les arrêts les plus marquants rendus cette semaine par la Cour de cassation.
Contrat de travail
- L'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs. Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné (Cass. soc. 16-11-2022 n° 21-17.276 F-D)
Paie
- Inverse la charge de la preuve la cour d’appel qui, pour rejeter la demande en paiement d'un rappel de salaire, retient que le salarié est bien fondé à réclamer l'application de la structure de l'ancien plan de rémunération variable pour la période s'étendant d'avril à décembre 2016 mais que les calculs théoriques proposés par l'intéressé ne tiennent pas compte du décalage des paiements et ne démontrent nullement que l'application de l'ancien plan aurait conduit à une augmentation supérieure de sa rémunération par rapport à celle dont il a déjà bénéficié en raison de l'application du nouveau lequel accélérait grandement le versement des commissions et que le salarié ne peut cumulativement exiger le maintien de l'ancien plan et le bénéfice du nouveau, alors qu'il appartenait à l'employeur de justifier de ce qu'il s'était libéré de son obligation de payer la rémunération variable due au salarié en application de l'ancien plan de rémunération variable pour la période sur laquelle portait la réclamation de l'intéressé (Cass. soc. 16-11-2022 n° 20-23.301 F-D).
- Une cour d’appel ne saurait débouter les salariés de leur demande en paiement d’indemnités de repas et de cantine en retenant qu’ils ne rapportent pas la preuve qu’ils étaient en déplacement pour les besoins du service durant l’intégralité de chaque période de pause méridienne concernée et ne justifient pas remplir les conditions nécessaires pour bénéficier des indemnités réclamées alors qu'il n'était pas contesté que les salariés techniciens clientèle étaient en déplacement sur la journée dans leur zone habituelle de travail et qu'elle constatait que ceux-ci produisaient les listings établis par leurs employeurs comportant aux dates visées les noms des communes et périodes de leurs interventions ainsi que les annexes à leurs bulletins de paie portant sur « les éléments variables de temps-compte rendu individuel », reprenant pour chaque mois, diverses données dont les heures de début et de fin de service par journée, de sorte qu'il appartenait aux employeurs qui se prétendaient libérés de leur obligation au paiement de l'indemnité de repas de démontrer que les salariés avaient la possibilité de revenir, entre 11 heures et 13 heures, à leur centre de rattachement (Cass. soc. 16-11-2022 n° 21-17.975 F-D).
Santé et sécurité
- Lorsque le médecin du travail a mentionné expressément dans son avis d'inaptitude que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi, l'employeur, qui n'est pas tenu de rechercher un reclassement, n'a pas l'obligation de consulter les représentants du personnel (Cass. soc. 16-11-2022 n° 21-17.255 F-B et n° 21-21.050 F-D).
- Constitue une visite médicale de reprise l'examen médical du salarié passé à l'initiative de l'employeur, qui fait suite à un premier examen organisé antérieurement, et à l'issue duquel la salariée a été déclarée inapte à son poste par le médecin du travail. Par conséquent, la cour d'appel ne pouvait pas débouter l'intéressée de sa demande de reprise du versement du salaire dans le délai d'un mois à compter de cet examen médical (Cass. soc. 16-11-2022 n° 21-16.629 F-D).
- L'obligation de reclassement qui pèse sur l'employeur préalablement à un licenciement pour inaptitude physique ne s'étend pas à d'autres entreprises qui ne relèvent pas d'un même groupe. Par conséquent, une cour d'appel ne peut pas dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse au motif que l'employeur, qui a pris l'initiative de rechercher des postes auprès de sociétés extérieures au groupe, n'a pas proposé au salarié les postes disponibles au sein de celles-ci et a ainsi manqué de loyauté dans la recherche d'un poste de reclassement (Cass. soc. 16-11-2022 n° 21-12.809 F-D).
Statuts particuliers
- En l'absence d'un arrêté d'extension des accords spécifiques fixant les rémunérations minimales des salariés annexés à la convention collective nationale des journalistes, la prime d'ancienneté des salariés des entreprises de presse non-signataires et non adhérentes à une organisation patronale signataire de ces accords, doit être calculée par référence au Smic. Ayant relevé qu'il n'était pas contesté que les barèmes minima des traitements prévus par les articles 22 et 23 de la convention collective nationale des journalistes ne figuraient pas parmi les dispositions qui avaient été étendues et constaté que la société avait calculé la prime d'ancienneté de tous ses salariés sur la base du Smic, la cour d'appel a pu en déduire que la société était en droit de calculer la prime d'ancienneté de l'intéressé, rédacteur-graphiste, sur cette même base (Cass. soc. 16-11-2022 n° 21-16.073 F-D).
- Lorsque l'employeur est assujetti à une convention collective applicable à l'entreprise, le voyageur, représentant ou placier (VRP) peut, dans les cas de rupture du contrat de travail mentionnés aux articles L 7313-13 et L 7313-14 du Code du travail, prétendre à une indemnité qui sera égale à celle à laquelle il aurait eu droit si, bénéficiant de la convention, il avait été licencié, dès lors que la convention collective applicable n'exclut pas les VRP de son champ d'application. Une cour d’appel ne saurait donc débouter le salarié de sa demande de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement fondée sur la convention collective nationale de travail des cadres, techniciens et employés de la publicité française du 22 avril 1975 en retenant que les VRP peuvent bénéficier de la convention collective dont relève leur employeur si elle contient des dispositions qui leur sont rendues expressément applicables alors que la convention collective précitée n'exclut pas les VRP de son champ d'application (Cass. soc. 16-11-2022 n° 21-15.801 F-D).
Contrôle - contentieux
- L'obligation de prévention des risques professionnels en matière de harcèlement moral et la prohibition des agissements de harcèlement moral sont les suites que donne la loi au contrat de travail. En conséquence, un salarié qui s'est vu allouer par le juge du contrat de travail une somme en réparation de son préjudice lié à l'existence d'un harcèlement moral dispose d'une créance de nature contractuelle, et non de nature délictuelle ou quasi-délictuelle (Avis Cass. soc. 16-11-2022 n° 21-80.478 FS-D).
- Doit être condamnée solidairement au paiement des rémunérations, indemnités et charges allouées au salarié, dont la cour d'appel a évalué le montant au vu des justificatifs produits, la société définitivement reconnue coupable d'avoir recouru en connaissance de cause, directement ou par personne interposée, aux services d'une personne exerçant un travail dissimulé, l'intéressé n'ayant pas reçu de bulletins de salaire mentionnant l'intégralité des heures qu'il avait accomplies dans le cadre de ses fonctions au regard de ses plannings de vol produits aux débats. En revanche, la cour d'appel ne peut pas condamner cette société au paiement d'une somme à titre de dommages-intérêts pour prêt illicite de main d'oeuvre sans rechercher si le salarié mis à sa disposition effectuait pour son compte une tâche spécifique impliquant une formation et une compétence particulières dont ne disposaient pas les salariés de cette société et s'il était demeuré sous la subordination juridique de son employeur (Cass. soc. 16-11-2022 n° 21-19.494 F-D).