Congés
- Si tout justiciable a le droit de contester la constitutionnalité de la portée effective qu'une interprétation jurisprudentielle constante confère à une disposition législative, sous la réserve que cette jurisprudence ait été soumise à la Cour suprême compétente, il n'existe pas, en l'état, d'interprétation jurisprudentielle constante relative à l'article 37 de la loi 2024-364 du 22 avril 2024, relatif à l'acquisition des congés payés en cas de maladie, les jurisprudences visées par la question prioritaire de constitutionnalité ne portant pas sur cette disposition législative. D'autre part, la question posée ne présente pas un caractère sérieux, et n'a pas à être renvoyée au Conseil constitutionnel, dès lors que l'article 37 de cette loi se borne à tirer les conséquences nécessaires de dispositions inconditionnelles et précises de l'article 7 de la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail et de l'article 31 § 2 de la Charte des droits fondamentaux, et ne met en cause aucune règle ni aucun principe inhérent à l'identité constitutionnelle de la France (Cass. soc. QPC 22-1-2025 n° 24-40.030 FS-B).
Paie
- Lorsqu'elles ont décidé, avant le 2 janvier 1993, de cotiser, au titre de la retraite complémentaire, à des taux supérieurs aux taux obligatoires afin que leurs salariés acquièrent des droits à la retraite plus importants, les entreprises concernées et celles nouvellement créées pour reprendre leur activité sont tenues de respecter les engagements ainsi pris (Cass. soc. 22-1-2025 n° 22-19.992 F-D).
Durée du travail
- Le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni ne déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit. Eu égard aux conditions particulières dans lesquelles il exerce ses fonctions et aux risques auxquels il est exposé, le marin n'est pas dans la même situation qu'un autre salarié et l'exclusion par la loi de l'application des dispositions de droit commun relatives à la preuve de la durée du travail ne lui interdisant pas d'obtenir le paiement des heures de travail accomplies, dont la preuve est assurée selon les dispositions spécifiques applicables aux gens de mer, notamment par la tenue à bord d'un registre des heures quotidiennes de travail ou de repos, la différence de traitement qui en résulte se trouve en rapport direct avec la loi qui l'établit (Cass. soc. QPC 22-1-2025 n° 24-17.726 FS-B).
Rupture du contrat
- Le seul refus par un salarié d'une modification de son contrat de travail ne constitue pas une cause réelle et sérieuse de licenciement, et la rupture résultant du refus par le salarié d'une modification de son contrat de travail, proposée par l'employeur pour un motif non inhérent à sa personne, constitue un licenciement pour motif économique. Est sans cause réelle et sérieuse le licenciement du salarié consécutif à son refus d'une modification de son contrat, dès lors que celle-ci est motivée par la volonté de l'employeur d'externaliser ses activités commerciales dans un certain nombre de pays d'Afrique dont le salarié avait la charge, sans qu'il soit allégué que cette réorganisation résultait de difficultés économiques ou de mutations technologiques ou qu'elle était indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise (Cass. soc. 22-1-2025 n° 22-23.468 F-B).
- Un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut pas justifier, en principe, un licenciement disciplinaire, sauf s'il constitue un manquement de l'intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail. Par ailleurs, un trouble objectif dans le fonctionnement de l'entreprise résultant d'un fait tiré de la vie personnelle d'un salarié ne permet pas en lui-même de prononcer une sanction disciplinaire à l'encontre de celui par lequel il est survenu. Est donc sans cause réelle et sérieuse le licenciement disciplinaire de la salariée pour des faits qui, bien que commis au cours d'un voyage organisé par l'employeur à titre de récompense, s'étaient déroulés hors du temps et du lieu de travail, ce dont il ressortait qu'ils relevaient de sa vie personnelle et ne pouvaient pas constituer un manquement aux obligations découlant de son contrat de travail, sans qu'il y ait lieu de rechercher si le comportement de l'intéressée avait créé un trouble caractérisé au sein de l'entreprise (Cass. soc. 22-1-2025 n° 23-10.888 F-B).
- Le licenciement pour motif disciplinaire ne peut pas intervenir plus d'un mois après le jour fixé pour l'entretien préalable. Si le report de l'entretien préalable au licenciement résulte de la seule initiative de l'employeur, le délai maximal de notification du licenciement disciplinaire d'un mois court à compter de la date prévue pour l'entretien initial (Cass. soc. 22-1-2025 n° 23-19.892 F-D).
- Le juge ne peut pas aggraver la qualification de la faute retenue par l'employeur. Ayant constaté que l'employeur avait dispensé le salarié d'exécuter son préavis tout en précisant qu'il lui serait rémunéré, ce dont il résultait qu'il ne lui imputait pas une faute grave, la cour d'appel ne pouvait pas retenir que le salarié avait commis une telle faute (Cass. soc. 22-1-2025 n° 23-15.397 F-D).
- Ayant constaté que le salarié avait tenu à l'encontre d'une collègue sur laquelle il exerçait une autorité hiérarchique, des propos dégradants à caractère sexuel, la cour d'appel a pu retenir, au regard du caractère unique de cet incident et des qualités professionnelles de l'intéressé qui avait 22 ans d'ancienneté dans l'entreprise, que ces faits, s'ils justifiaient la rupture du contrat de travail, ne rendaient pas pour autant impossible son maintien dans l'entreprise durant le temps du préavis (Cass. soc. 22-1-2025 n° 23-18.124 F-D).
Une cour d'appel a pu décider que l'excès de vitesse commis par le salarié au volant du véhicule de l'entreprise méritait une sanction, compte tenu de sa fonction de technico-commercial itinérant, mais qu'il ne constituait pas une cause réelle et sérieuse de licenciement dès lors que (Cass. soc. 22-1-2025 n° 23-20.792 F-D) :
- conformément à ses obligations contractuelles, l'intéressé a immédiatement avisé sa hiérarchie ;
- il a proposé à son employeur plusieurs solutions alernatives lui permettant d'exercer ses fonctions pendant la suspension de son permis de conduire de 3 mois ;
- cet excès de vitesse était le seul commis par le salarié en 8 ans d'activité ;
- et la société ne pouvait pas se prévaloir de sa particulière vigilance en matière de prévention des risques routiers alors qu'elle ne justifiait pas avoir sensibilisé particulièrement ses salariés, par le biais notamment de formations à la prévention de la vitesse au volant.
- Ayant constaté que l'examen des pièces produites confirmait de façon précise, détaillée et individualisée les griefs formulés par l'employeur dans chacune des lettres de licenciement s'agissant du fait, pour les télé-secrétaires d'un centre d'appels, de laisser traîner les appels, d'attendre trop longtemps entre deux appels quand il n'était pas justifié d'activités annexes de nature à expliquer de telles anomalies, la cour d'appel a pu en déduire que ces faits constituaient une violation, par les salariées, des obligations résultant de leurs contrats de travail d'une importance telle qu'elle rendait impossible leur maintien dans l'entreprise (Cass. soc. 22-1-2025 n° 22-15.793 F-D).
- Est illicite comme portant une atteinte injustifiée et disproportionnée au droit d'agir en justice reconnu à tout salarié la clause du plan de sauvegarde de l'emploi qui subordonne le versement des indemnités qu'il prévoit, d'une part, à l'absence de contentieux collectif des instances représentatives du personnel sur la régularité de la procédure de licenciement économique ainsi que sur les mesures de reclassement proposées et, d'autre part, à la fourniture des mêmes garanties écrites tenant à l'absence de contentieux individuel sur tout aspect du licenciement économique. Ayant relevé que la clause litigieuse, tant que son caractère illicite n'avait pas été sanctionné, avait fait planer une certaine pression sur les salariés leur occasionnant par là même un préjudice, certes immatériel mais réel, la cour d'appel a souverainement apprécié le montant de ce préjudice (Cass. soc. 22-1-2025 n° 23-11.033 F-D).
Représentation du personnel
- Lorsqu'elle est fondée sur le défaut de prise en compte d'une candidature syndicale et l'absence d'organisation du premier tour des élections en vue duquel la candidature litigieuse avait été déposée, la contestation n'est plus recevable au-delà d'un délai de 15 jours suivant la publication du procès-verbal de carence. Il en résulte que celui qui saisit le tribunal judiciaire d'une telle contestation est recevable à demander, dans la même requête, l'annulation des élections à venir en conséquence de l'organisation contestée d'un second tour, sans avoir à réitérer cette demande dans le délai de 15 jours suivant les élections (Cass. soc. 22-1-2025 n° 23-19.384 F-B).
- La Cour de cassation juge qu’il résulte de l’article L 2141-5-1 du Code du travail, relatif à la garantie d’évolution salariale des représentants du personnel, que les salariés relevant de la même catégorie professionnelle et dont l'ancienneté est comparable, au sens de ce texte, sont ceux qui relèvent du même coefficient dans la classification applicable à l'entreprise pour le même type d'emploi, engagés à une date voisine ou dans la même période (Cass. soc. 20-12-2023 n° 22-11.676 FS-BR). Il résulte du même texte qu'en l'absence de tout salarié relevant de la même catégorie professionnelle au sens des dispositions susvisées, l'évolution de la rémunération du salarié doit être déterminée par référence aux augmentations générales et à la moyenne des augmentations individuelles perçues dans l'entreprise, y compris lorsque certaines augmentations individuelles résultent d'une promotion entraînant un changement de catégorie professionnelle (Cass. soc. 22-1-2025 n° 23-20.466 F-B).
- L'arrêt relève d'abord que, si les documents des négociations annuelles obligatoires ne distinguent pas les augmentations générales et les augmentations individuelles, ils offrent une base de référence objective qui, pour l'ensemble du personnel, permet de déterminer une augmentation générale pour une année et que les documents des négociations annuelles obligatoires présentent un degré de pertinence objectif. L'arrêt retient ensuite que le pourcentage d'augmentation déterminé dans les documents des négociations annuelles obligatoires ne porte que sur les salariés présents au 31 décembre d'une année donnée pour peu qu'ils aient été présents au moins un jour durant cette année, que la période d'un an visée par les documents de la négociation annuelle obligatoire correspond à une période au cours de laquelle le salarié disposait d'heures de délégation dépassant 30 % de sa durée de travail et que le panel de comparaison des salariés présents au 31 décembre de l'année précédant l'année de référence n'est pas incompatible avec les dispositions de l'article L 2141-5-1 du Code du travail, relatif à la garantie d’évolution salariale des représentants du personnel. La cour d'appel a pu en déduire que le montant de l'évolution de la rémunération du salarié devait être calculé en soustrayant les salaires perçus par le salarié du salaire de base majoré du pourcentage moyen des augmentations moyennes telles que déterminées par référence aux documents des négociations annuelles obligatoires (Cass. soc. 22-1-2025 n° 23-20.466 F-B).
- Un salarié ne peut par avance renoncer au droit d'être désigné délégué syndical qu'il tient des dispositions d'ordre public de l'article L 2143-3 du Code du travail lorsqu'il a obtenu un score électoral d'au moins 10 %. Le tribunal, après avoir relevé que la totalité des 28 candidats du syndicat avaient renoncé à leur droit de priorité avant même le premier tour des élections et qu'aucun d'entre eux n'avait confirmé cette renonciation après le premier tour, en a exactement déduit que ces renonciations n'étaient pas valables, de sorte que les désignations litigieuses devaient être annulées (Cass. soc. 22-1-2025 n° 23-22.216 F-B).
- L'action engagée par un syndicat afin de faire juger que les salariés se trouvaient dans une situation contraignante telle qu'ils ont été obligés de cesser le travail pour faire respecter leurs droits essentiels, directement lésés par suite d'un manquement grave et délibéré de l'employeur à ses obligations, constitue une action engagée dans l'intérêt collectif de la profession (Cass. soc. 22-1-2025 n° 23-17.782 F-B).
- Si un syndicat peut agir en justice pour faire reconnaître l'existence d'une irrégularité commise par l'employeur au regard de dispositions légales, réglementaires ou conventionnelles ou au regard du principe d'égalité de traitement et demander, outre l'allocation de dommages-intérêts en réparation du préjudice ainsi causé à l'intérêt collectif de la profession, qu'il soit enjoint à l'employeur de mettre fin à l'irrégularité constatée, le cas échéant sous astreinte, il ne peut prétendre obtenir du juge qu'il condamne l'employeur à régulariser la situation individuelle des salariés concernés, une telle action relevant de la liberté personnelle de chaque salarié de conduire la défense de ses intérêts (Cass. soc. 22-1-2025 n° 23-17.782 F-B).
- Aux termes de l'article L 2143-4 du Code du travail, dans les entreprises d'au moins 500 salariés, tout syndicat représentatif dans l'entreprise peut désigner un délégué syndical supplémentaire s'il a obtenu un ou plusieurs élus dans le collège des ouvriers et employés lors de l'élection du comité social et économique (CSE) et s'il compte au moins un élu dans l'un des deux autres collèges. Ce délégué supplémentaire est désigné parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au CSE, quel que soit le nombre de votants. Ce texte fait obligation au syndicat représentatif qui désigne un délégué syndical supplémentaire de le choisir parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au CSE. Ayant constaté que M. X n'avait pas été candidat lors des dernières élections au CSE organisées au sein de l'établissement Printemps siège et n'avait donc pas recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour de ces élections, le tribunal judiciaire en a exactement déduit qu'il ne satisfaisait pas à la condition d'audience électorale personnelle, en sorte que sa désignation en qualité de délégué syndical supplémentaire au sein de l'établissement Printemps siège devait être annulée (Cass. soc. 22-1-2025 n° 23-22.792 F-D).
- L'employeur ne peut contester la délibération du comité social et économique décidant du recours à une expertise pour d'autres motifs que ceux tenant à la nécessité de l'expertise, sa nature, son objet ou le choix de l'expert s'il entend contester la désignation de ce dernier (Cass. soc. 22-1-2025 n° 23-13.304 F-D).
- La perte de la qualité de salarié protégé d'un candidat aux élections professionnelles intervient à la date à laquelle le jugement, se prononçant sur une contestation électorale, annule cette candidature, peu important les motifs de l'annulation de celle-ci (Cass. soc. 22-1-2025 n° 23-15.302 F-D).
Négociation collective
- La Cour de cassation juge (Cass. soc. 31-5-2011n° 10-14.391 FS-PB) qu'un syndicat représentatif catégoriel peut, avec des syndicats représentatifs intercatégoriels, et sans avoir à établir sa représentativité au sein de toutes les catégories de personnel, négocier et signer un accord d'entreprise intéressant l'ensemble du personnel, son audience électorale, rapportée à l'ensemble des collèges électoraux, devant alors être prise en compte pour apprécier les conditions de validité de cet accord. Il en résulte que, lorsqu'un accord n'a pas été signé par des organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations représentatives au premier tour des dernières élections des titulaires au comité social et économique, un syndicat représentatif catégoriel ayant signé un tel accord peut demander, avec un ou plusieurs syndicats représentatifs intercatégoriels l'ayant également signé, une consultation des salariés visant à le valider, à la condition que ces organisations syndicales représentatives aient recueilli ensemble au premier tour des dernières élections des titulaires au comité social et économique plus de 30 % des suffrages exprimés en faveur des syndicats représentatifs, tous collèges confondus (Cass. soc. 22-1-2025 n° 23-21.936 F-B).
Contrôle-contentieux
- L'obtention et la production en justice par l'employeur d'une preuve tirée de l'exploitation de données personnelles issues du logiciel de gestion du centre d'appels pour contrôler et surveiller l'activité des salariées, sans qu'elles en eussent été informées préalablement, constitue une atteinte à leur vie privée. Toutefois, ayant constaté que, pour établir les griefs imputés aux salariées, consistant à réduire la cadence de travail et faire de l'obstruction délibérée au bon fonctionnement de l'entreprise en ne prenant pas de nombreux appels alors qu'elles étaient disponibles, l'employeur s'était borné à produire l'exploitation des données issues du logiciel de gestion informatisée du centre d'appels ne portant que sur les communications professionnelles passées ou reçues dans le cadre de leur activité professionnelle et qu'il avait fait procéder à un constat d'huissier afin de déterminer le relevé des appels entrants et sortants, les temps de traitement des appels, les temps d'attente, le nombre d'appels pris ou perdus, et ce pour chaque collaboratrice identifiée par son prénom, la cour d'appel a fait ressortir que cette production d'éléments portant atteinte à la vie privée des salariées était indispensable à l'exercice du droit à la preuve et proportionnée au but poursuivi, soit la défense de l'intérêt légitime de l'employeur au bon fonctionnement de l'entreprise (Cass. soc. 22-1-2025 n° 22-15.793 F-D).
- Les dépens afférents aux instances, actes et procédures d'exécution comprennent les frais de traduction des actes lorsque celle-ci est rendue nécessaire par la loi ou par un engagement international. Le juge des référés ne peut donc pas condamner l'employeur à verser au salarié une somme au titre des frais de traduction alors qu'elle l'a condamné aux dépens (Cass. soc. 22-1-2025 n° 23-19.035 F-D).
- En l'absence de disposition légale prévoyant la désignation de représentants syndicaux au comité de groupe, dont la composition est fixée par l'article L 2333-1 du Code du travail, il est statué en premier ressort et à charge d'appel par la juridiction saisie de la contestation d'une telle désignation (Cass. soc. 22-1-2025 n° 23-18.489 F-D).
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