Pour autoriser le licenciement pour faute d'un salarié protégé, l'inspecteur du travail doit rechercher si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement, compte tenu des règles applicables au contrat de travail e l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi.
Dans cet arrêt publié, le Conseil d'État se prononce sur le cas d'un salarié protégé cadre ayant proféré à plusieurs reprises des propos racistes et sexistes envers ses subordonnées.
Des propos « brutaux et maladroits »
Dans cette affaire, un salarié protégé chef de service prononce, à l'encontre de trois salariées de son service, « des propos faisant explicitement référence, d'une part, au sexe de ces salariées et, d'autre part, à leur origine et à leur religion supposées, propos que la cour a qualifiés de " brutaux ou maladroits ", " déplacés et sexistes ", et présentant un caractère blessant pour leurs destinataires ».
Toutefois, la cour administrative d'appel, prenant en compte l'existence de tensions entre le salarié protégé et son employeur et l'absence d'antécédents disciplinaires de ce dernier, estime que le fait d'avoir proféré de tels propos ne constitue pas une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement.
Remarque
en effet, la jurisprudence prend en compte les tensions dans l'entreprise, l'ancienneté et les antécédents disciplinaires des salariés en cause dans leur appréciation de la faute pour justifier ou non le licenciement du salarié protégé (Guide DGT (salariés protégés) 20 sept. 2019, fiche 6).
Pas des « propos triviaux »
Le Conseil d'État n'a pas la même analyse. Pour lui, les propos tenus par le salarié « visaient systématiquement et de manière répétée des salariées ayant pour point commun d'être des femmes, supposément d'origine maghrébine et de confession musulmane, qui, au surplus, se trouvaient sous sa responsabilité, et ne pouvaient, dès lors qu'ils revêtent un caractère raciste pour certains, et sexiste pour d'autres, être réduits à des propos triviaux ».
Ces faits sont donc d'une gravité suffisante de nature à justifier le licenciement disciplinaire du salarié protégé, peu important l'existence de tension ou le passé disciplinaire vierge du salarié.
NDLR
ce n'est pas la première fois que le Conseil d'État considère que des propos racistes ou sexistes sont des faits d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement d'un salarié protégé (CE, 10 juill. 1995, n° 133802 ; CE, 24 nov. 2006, n° 282374). Cette décision du 7 octobre 2022, publiée, semble vouloir insister sur la gravité de ces faits, et ce malgré les circonstances extérieures comme l'absence de sanctions disciplinaires ou les tensions dans l'entreprise.