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30 juin 2023
Lorsque les faits invoqués dans la lettre de licenciement ne caractérisent pas une cause réelle et sérieuse de licenciement, il appartient à l'employeur de démontrer que la rupture du contrat de travail ne constitue pas une mesure de rétorsion à la demande antérieure du salarié d'organiser des élections professionnelles au sein de l'entreprise.

Le salarié qui demande l'organisation des élections professionnelles est protégé, mais seulement lorsqu'il agit sur mandat d'un syndicat (C. trav., art. L. 2411-14), ou si sa demande est reprise par un syndicat qui demande à son tour à l'employeur d'organiser des élections (Cass. soc., 10 janv. 2006, n° 04-41.736), lequel doit remplir les conditions pour négocier le protocole électoral et présenter des candidats au premier tour des élections (Cass. soc., 15 oct. 2015, n° 14-15.995).

Mais le salarié qui n'est pas au courant et qui demande l'organisation des élections s'est bel et bien exposé. Quid lorsqu'il est licencié suite à cette demande ? C'est sur ce cas que se penche la Cour de cassation dans cet arrêt publié du 28 juin 2023. Elle se prononce, pour la première fois à notre connaissance, sur le mode de preuve applicable.

Si un salarié est licencié après avoir demandé l'organisation des élections dans son entreprise...

Dans cette affaire, un salarié est convoqué à un entretien préalable à son licenciement, quelques semaines après sa demande d'organisation d'élections professionnelles. Il fait l'objet d'une mise à pied conservatoire et est licencié pour faute grave quelques jours plus tard.

Il invoque une discrimination syndicale et conteste le bien-fondé de son licenciement. Il demande à ce titre l'annulation de son licenciement et sa réintégration, outre le paiement de rappels de salaires et indemnités.

Il est débouté de ses demandes au motif que lorsqu'un salarié invoque une discrimination, les règles de preuve lui imposent de présenter des éléments de faits constituant selon lui une discrimination, et il appartient au juge d'apprécier si ces éléments laissent supposer une telle discrimination. Il incombe alors à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. 

Remarque

il s'agit de l'application des règles de preuve en matière de discrimination fixées par l'article L. 1134-1 du code du travail.

Pour les juges, invoquer la seule concomitance entre la demande d'organisation des élections et l'engagement de la procédure de licenciement ne suffit pas : le salarié n'a présenté dans ses conclusions aucun élément de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination.

...c'est à l'employeur de prouver qu'il ne s'agit pas d'une mesure de rétorsion

Cependant, soulève la Cour de cassation, les juges ont  retenu que le licenciement prononcé n'était pas justifié par une cause réelle et sérieuse, et ils ont bel et bien constaté cette concomitance entre la demande d'organisation d'élections et le licenciement. Dans ce cas, précise la chambre sociale, il appartient alors à l'employeur de démontrer que la rupture du contrat de travail ne constitue pas une mesure de rétorsion à la demande antérieure du salarié d'organiser des élections professionnelles au sein de l'entreprise.

Remarque

l’arrêt ne précise pas quels étaient les motifs de licenciement invoqués, mais la cour d’appel les a estimés dépourvus de cause réelle et sérieuse.

En d'autres termes, si dans ce cas le salarié n'est pas protégé en tant que demandeur d'élections, et que son licenciement est jugé comme dépourvu de cause réelle et sérieuse, la charge de la preuve s'inverse, et c'est alors à l'employeur de démontrer qu'il n'y a pas de lien entre son licenciement et sa demande. 

La Cour se fonde sur les articles L. 1132-1 et L. 2141-5 du code du travail relatifs à la discrimination.

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